Vidéo/Mustapha Ben Jaafar : "Je suis au service de la Tunisie le jour venu"

Publié le Mercredi 01 Juin 2011 à 11:40

"Même si on était d’accord que les élections aient lieu le 24 juillet, on a toujours dit que ce n'était pas une date sacrée. On voulait que les élections se déroulent au plus tôt,  compte tenu que la période de transition est pleine de risques et de dangers, à condition que ces élections se déroulent de la meilleure manière en fonction des critères de démocratie, de transparence, de pluralisme et d’égalité des chances", souligne Dr Mustapha Ben Jaafar, Secrétaire général d’Ettakatol, qui était l’invité hier (mardi) des rencontres politiques de Gnet. 

"Sachant que la date du 24 juillet a été fixée dans un contexte particulier, il était question de passer par des élections présidentielles, mais ce qui a changé fondamentalement pour nous était l’élection d’une commission supérieure chargée des élections, dont nous avons entière confiance. Cette commission présidée par quelqu’un que nous connaissons de très longue date pour son intégrité son indépendance, et son combat contre la dictature. Le 24 juillet était une date impossible si nous voulons des élections transparentes et indépendantes. Le 16 octobre est une bonne date, raisonnable, et si l’on va l’avancer d’une semaine ou de deux, ou la reculer d’une semaine ou de deux, cela nous ne dérangera pas outre mesure, l’objectif pour nous est que les élections se déroulent dans des conditions acceptables de transparence et de respect de critères internationaux", relève-t-il.

Dr Ben Jaafar trouve "tout à fait absurde" d'organiser un référendum pour fixer la date des élections. "Ce serait le système suisse des cantons, si on veut ajouter un sucre supplémentaire dans son café, il faut consulter tout le monde".

Pour le chef d’Ettakatol, "raccourcir au plus cette période de transition en Tunisie, c’est de l’intérêt national, mais l’intérêt national suprême exige que la première pierre qui sera placée dans l’édifice de la Tunisie nouvelle soit vraiment une pierre solide pour que la fondation tienne".

Interrogé sur les raisons réelles ayant motivé sa démission du gouvernement de Mohamed Ghannouchi à peine nommé ministre de la Santé publique, Mustapha Ben Jaafar invoque "la composition du gouvernement, la manière dont elle été annoncée, la déclaration faite le même jour par le ministre de l’Intérieur qui nous a rappelé l’ère ben Ali,  le fait que j’apprenne à la télé le nom de mon secrétaire d’Etat, la manière dont ont été dispatchés par le gouvernement  les candidats proposés par l’UGTT,  sans consultations ni avec les intéressés ni avec la centrale syndicale. J’ai eu le sentiment que la continuité prévalait sur le changement, et  l’expérience de 87 a défilé devant mes yeux. On peut commettre une erreur une fois, mais non deux fois".  

Mustapha Ben Jaafar.   Mustapha Ben Jaafar.

Ce militant politique qui a blanchi sous le harnais a plutôt un préjugé favorable sur le gouvernement de Béji Caïd Essebsi. "Sa volonté de rupture est nette, mais la rupture se fait d’une manière progressive, dans ce type de révolutions". Il fait constater qu’il existe aujourd’hui une pluralité, et non un pluralisme dans les médias, et cette situation perdurerait tant qu’il n’y a pas des règles du jeu. Et l’instance des médias ? "Elle travaille discrètement, et nous attendons l’impact de ses décisions".

Pour le chef d’Ettakatol, "le financement de l’action politique se pose de la  manière la plus aiguë possible,  il n’est pas possible de continuer avec autant de disparités des moyens entre les partis qui sont en compétition. S’il y a des règles qui codifient la question du financement et qui définissent le plafond, elles seront les bienvenues". S’agissant du financement du FDTL, "la situation s’est améliorée par rapport à la pénurie et à la misère d’avant le 14 janvier".

Concernant la pléthore de partis politiques dans cette Tunisie postrévolutionnaire, Mustapha Ben Jaafar souligne qu’"il aurait peut-être fallu établir des règles plus strictes et claires dans la légalisation des partis, comme exiger un nombre déterminé d’adhérents, une certaine répartition dans les régions". "Ce nombre exagéré de partis va compliquer la tâche du citoyen qui va choisir. Pour simplifier,  je dis qu’il y a les partis d’avant et les partis d’après le 14 janvier, mais cela ne préjuge pas du tout de la valeur de gens qui ont créé récemment des partis. J’espère qu’on les retrouvera dans les années qui viennent pour qu’ils apportent les preuves de leur ténacité, de leur cohérence et de leur compétence".

Sur la question de savoir s’il a l’aspiration de devenir Président de la République, il répond : "Je suis au service du pays le jour venu, mais ce n’est pas le moment de poser ce problème et d’y répondre". Mustapha Ben Jaafar prône "un régime présidentiel un peu équilibré, un gouvernement qui soit responsable devant le parlement, et un chef de l’Etat qui ne soit pas uniquement condamné à  inaugurer les chrysanthèmes, mais doit avoir un rôle d’arbitre dans la vie nationale, de gardien de la constitution et de l’intégrité territoriale, qui soit soumis à l’interrogation, à la responsabilité, et qui pourrait faire l’objet d’un processus d’impeachment".

Dr Ben Jaafar qui se dit "apte à assumer la responsabilité de Président de la République, si les Tunisiens le veulent", indique que sa première priorité, le cas échéant, est "de faire un plan qui aille dans le sens de la lutte contre les disparités entre les individus et les régions".

Quid de la position d’Ettakatol envers les stratégies des alliances qui sont en train de se mettre en place. "Nous sommes ouverts à toute alliance, mais le mode de scrutin ne les encourage pas. Les alliances s’imposeront au lendemain des élections, elles se feront  sur un projet de société et un programme gouvernemental".

Pour le chef du FDTL, une année serait suffisante pour élaborer une constitution. Mais que pense-t-il de la proposition de Me Nejib Chebbi qui préconise une période de six mois pour l’élaboration de la constitution, d’autant plus que le leader du PDP dit avoir mis à peine trois semaines pour élaborer son projet de constitution ? "Il y a des rapides en politique, je lui laisse l’avantage de cette proposition, peut-être qu’on fera en moins de six mois, l’essentiel est qu’on aboutisse à une constitution durable, fruit d’un consensus général et qui sera un édifice qui durera un siècle au moins".

"on ne peut avoir de réconciliation sans tourner la page du passé"

Mustapha Ben Jaafar qui est de nature précautionneux et circonspect, estime que la témérité est nécessaire en politique. "Témérité ne veut pas dire, faire n’importe quoi, on peut être téméraire mais ne pas être brouillon, et chercher le coup médiatique, c’est une approche qui a existé du temps de ben Ali, et on la voit aujourd’hui, il y a des gens qui réagissent au quart de tour, qui essaient plus d’attirer l’attention que d’aller au fond des choses, et finalement ils accumulent les revers".

Quel projet de société prône Ettakatol ? "La société que nous revendiquons est une société équilibrée fondée sur une réconciliation nationale entre les différentes familles de pensée, mais on ne peut avoir de réconciliation sans tourner la page du passé, et sanctionner les fautifs".
"Nous voulons aussi une société ancrée dans notre culture arabo-musulmane, mais qui reste ouverte au monde extérieur".  Dr Ben Jaafar est un fervent défenseur de l’union maghrébine, et estime que la démocratie est la solution pour la construction du Maghreb. "Le  jour où les peuples maghrébins reprendront leur destin en main, ils ne pourront pas aller sauf dans le sens de l’unité".  

Le modèle économique défendu par Ettakatol est celui où "l’Etat retrouve son rôle de stratège et de régulateur, et récupère ainsi ce qu’il a abandonné pendant les deux dernières décennies, car, cette justice sociale ne peut être gérée que  par un Etat fort. Le secteur privé doit être le deuxième pilier de l’économie, tout en se développant par un soutien de la part de l’Etat, une entreprise citoyenne gérée d’une manière démocratique et transparente, respecte les droits syndicaux, et  un climat propice pour les investissements".

Mustapha Ben Jaafar qui reconnait le droit d’Ennahdha d’exister et de participer à la vie politique en Tunisie, déplore "certains de ses dérapages inquiétants sur le terrain, comme ces gens qui obligent des femmes de porter le voile" (…) "nous nous sommes battus pour qu’Ennahdha soit partie prenante de la vie politique, nous avons été du côté des militants d’ennahdha lorsqu’ils étaient réprimés. En 1990,  j’étais limogé du MDS et écarté de la LTDH pour ces raisons là…nous sommes pour le dialogue et la diversité, surtout avec ceux avec qui nous ne sommes pas d’accord, nous sommes pour le respect de la différence, selon  un socle de valeurs et de règles claires transparentes pour tout le monde". Mustapha Ben Jaafar nous a également répondu sur la lettre qu'il a envoyée à Nicolas Sarkozy, ses relations avec les socialistes français, sa perception de la révolution en Libye et des révolutions arabes.
H.J.


 

Commentaires 

 
+3 #83 Objectivité d’abord.
Ecrit par Musulman.     15-08-2011 12:16
La vidéo indiquée montre l’hostilité manifeste du journaliste à Ennahdha ett à l'Islam. Aussi, ce journaliste n’a nullement rejeté les déclarations du Cheikh Rached Ghannouchi de modification de ses paroles lors de la publication. Il ne l’a point laissé poursuivre et a été tendancieux. En regardant cette vidéo avec des préjugés, on peut en déduire toutes les conclusions erronées possibles et imaginables.

Il existe des critères pour reconnaître une éventuelle hypocrisie et ces critères sont totalement absents chez Le Cheikh Rached Ghannouchi.
 
 
-5 #82 RE: Vidéo/Mustapha Ben Jaafar :
Ecrit par zico     12-08-2011 15:01
la défense du Cheikh Rached Ghannouchi contre ce journaliste hostile à l’Islam
Bien sure quand un journaliste qui n'est pas pro Nahdha il est automatiquement hostile a l'islam...
Les preuves d'hypocrisie de Ghannouchi sont démontrées. Vous êtes les cas typique du militant aveuglé. Vous allez vous réveillez et retourner à la réalité après le 23 Octobre.
 
 
+4 #81 Tel est pris qui croyait prendre !
Ecrit par Musulman.     12-08-2011 10:35
@zico
Aveuglé par votre hostilité, vous avez pointé vers une vidéo qui se retourne contre vos fausses accusations. L’article en question est erroné et a été corrigé très peu de temps après. Vous n’avez point écouté la défense du Cheikh Rached Ghannouchi contre ce journaliste hostile à l’Islam. Les deux vidéos ne montrent aucun fait reprochable au Cheikh Rached Ghannouchi. D’ailleurs, vous pouvez constater que Le Cheikh Rached Ghannouchi est contre la violence en lisant l’article suivant :

gnet.tn/.../id-menu-325.html

Tous les gouvernements, Islamiques ou non, usent légitimement de la force pour appliquer la loi comme, par exemple, la poursuite de criminels ou de ceux qui ne payent pas les impôts.
 
 
-3 #80 Les preuves de l'hypocrisie
Ecrit par zico     10-08-2011 20:26
Voila la vidéo en question:

facebook.com/.../...

Voila une autre vidéo qui montre l'hypocrisie dont je parle:

facebook.com/.../...

Ça se passe de tout commentaire
 
 
-5 #79 @Musulman
Ecrit par zico     10-08-2011 17:13
Je parle bien d'usage légitime de la force pour appliquer l'ordre divin, je ne parle pas d'usage de force comme moyen de défense. La nuance est grande.
 
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