Tunisie/Constituante : le débat s’éternise, la minorité ne lâche pas du lest

Publié le Mercredi 07 Décembre 2011 à 22:59
La constituante pousuit sa séance nocturne.Une plénière à plusieurs rebondissements que celle tenue ce mercredi à l’assemblée nationale constituante. Tensions, altercations, prise de parole intempestive... l’apprentissage de la démocratie sera manifestement rude, pourvu que ça n’attente pas à la bonne marche de ce processus transitoire appelé à s’achever dans une année.

D’emblée, l’article un de cette mini-constitution a suscité une vive polémique. La pomme de discorde a trait à la limitation de la durée des travaux de la constituante à une année, avec une possibilité de prorogation de six mois, proposition d’amendement de la minorité dont ledit article n’a pas tenu compte. Les députés de l’opposition ont fustigé "un putsch contre la démocratie", et ont pointé "la machine de vote de la troïka". "Mais, que faire si la constituante n’arrive pas au bout d’une année à terminer ses travaux, elle se dissout et mène le pays à une crise politique", rétorque la majorité, par la voix de ses élus, réitérant son engagement moral à s’en tenir à la période d’une année.

Les tensions ne se sont pas dissipées l’après-midi. La consigne donnée par le Président de l’assemblée de s’en tenir aux propositions d’amendements écrits pour accélérer la cadence des travaux et hâter le vote, a contrarié les élus minoritaires. Nejib Chebbi a contesté avec virulence cette tentative de priver les élus de leur droit de s’exprimer, dénonçant le retour de pratiques du régime déchu. "Voulez-vous que l’on se retire, et qu’on vous laisse le champ libre", s’adresse-t-il emporté au président de l’assemblée. D’un calme olympien, Mustapha Ben Jaâfar lui répond courtoisement, saluant un ami avec qui il était dans le même camp de l’opposition. Histoire de lui dire, peut-être, que ce n’est pas à cet âge qu’il va entamer une carrière de dictateur.

Les débats ont continué par la suite avec l’adoption du projet de loi article par article. Les élus se sont, par moments, arrêtés au menu détails, s’éternisant sur certains articles, tel l’article 3 sur l’adoption de la constitution. Là aussi, une divergence a surgi entre Mustapha Ben Jaâfar et Nejib Chebbi sur lesquels des propositions d’amendements des élus ou des articles de la commission doivent passer en premier au vote. Le député PDP a eu gain de cause, et les amendements ont été passés au vote, mais tous ont été refusés au profit des articles de la commission.

Le recours au référendum a divisé les députés, certains ont prôné une organisation systématique de référendum, d’autres ont conditionné le recours à la consultation populaire à la nature du vote au sein de l’assemblée. "L’adoption de la constitution à une majorité de 2/3, lui confère sérieux et légitimité, et rend inutile le recours au referendum", estiment en substance les députés d’Ennahdha dont Samir Dilou et Habib Ellouz. Moncef Marzouki qui appartient à la majorité n’est pas de cet avis, il estime que le recours au référendum "est une manière pour le peuple d’assimiler et de s’approprier sa constitution".

Finalement l’article a été voté dans sa version initiale légèrement amendée telle que proposée par la commission ad hoc. Il stipule que "l’assemblée constituante adopte le projet de constitution article par article à la majorité absolue de ses membres, intervient après l’adoption de la constitution dans son ensemble à la majorité des deux tiers. A défaut l’adoption intervient à la même majorité en deuxième lecture dans un délai d’un mois de la première lecture. Au cas où cette majorité n’est pas atteinte, la constitution est soumise au référendum pour son adoption à la majorité des votants".

L’article 4 a été, à son tour, longuement discuté ; les désaccords étaient autour du nombre de députés qui sont habiletés à présenter des projets de loi, ainsi que de la majorité absolue ou qualifiée par laquelle les lois organiques doivent être adoptées. Finalement, la version amendée a été entérinée par 154 voix pour,  34 contre, et 9 abstentions. Elle stipule que "l’assemblée nationale constituante exerce le pouvoir législatif conformément à la loi. Le gouvernement ou 10 membres au moins de l’assemblée constituante ont le droit de proposer des projets de loi. L’assemblée nationale constituante vote les lois organiques à la majorité absolue (50+1) de ses membres, et les lois ordinaires à la majorité des membres présents, à condition que le taux des votants pour, ne soit pas inférieur au tiers des élus de la constituante".

L’article cinq a été adopté quasiment à l’unanimité, avec un amendement selon lequel, "l’assemblée nationale constituante peut démettre le président de l’assemblée de ses missions à une majorité absolue (au lieu de la majorité qualifiée dans la première version) sur la base d’une demande présentée au bureau de l’assemblée par  2/3 des membres au moins. La constituante sous la présidence du premier vice-président doit élire un président dans un délai de quinze jours, entretemps, c’est le vice-président qui assure la présidence provisoire de l’assemblée".

Pendant les débats, et en guise de rappel à l’ordre à une minorité tatillonne sur les détails, une députée d’Ennahdha a brandi une pancarte mentionnant les priorités de l’assemblée constituante à savoir : "l’élection d’un président, la désignation d’un gouvernement et le vote du budget de l’Etat". Mais certains ne semblent pas s’en préoccuper outre mesure, à l’instar du député du mouvement Echaab, Mohamed Brahem, qui s’en prend au vote de la majorité, allant jusqu’à contester la légitimité et la composition de l’assemblée constituante. Il a franchi une ligne rouge qui lui a valu l’admonestation du président de l’assemblée, qui a fini par lui retirer la parole.

Après la pause-diner, les députés ont repris leur troisième séance plénière de ce mercredi avec un ton apaisé, et une ambiance plus calme. Morphée semble rôder dans l’hémicycle.
H.J


 

Commentaires 

 
+1 #4 RE: Tunisie/Constituante : le débat s’éternise, la minorité ne lâche pas du lest
Ecrit par Msahsah     09-12-2011 13:49
La démocratie c’est dans les actes avant tout, pas dans les paroles. Malheureusement, nombreux sont qui se vantent « démocrates » et qui agissent d’une façon plutôt opposée.
En effet, l’opposition systématique n’a rien à voir avec la démocratie. Elle n’en a rien à voir, également, l’inobservation de la règle capitale d’acceptation du résultat du vote en cas de divergence d’opinions.
Arrêtons de nous comporter donneurs de leçons ;
Arrêtons de juger les gens sur leurs intentions ;
Arrêtons de nous vanter seuls démocrates, seuls modernistes, …
Arrêtons de contourner les vrais problèmes de la nation et de nous focaliser plutôt sur des détails ;
Renonçons aux idées reçues ;
Laissons les gens travailler et jugeons ensuite les résultats. Ils sont élus par le peuple après tout et ce peuple n’est pas dupe. C’est ou bien qu’il aille leur renouveler sa confiance plus tard ou bien qu’il aille la retirer et la donner à d’autres. Ce sont les urnes qui tranchent dans tous les cas et c’est ça au fait la démocratie.
 
 
#3 FAUX MESSIURS DE NAHDHA
Ecrit par Khammous     08-12-2011 22:05
L'argument de Nahdha est FAUX Il ne s"'agit pas du tout de remettre en cause un principe démocratique majeur à savoir que c'est la majorité élue qui a le commandent C'st une accusation fallacieuse mesquine et ridicule IL n'y a pas de mauvais perdants. Nahdha , en soutenant cela, veut nous détourner du vrai danger qu'encourt la démocratie et le pays. La majorité veut faire passer des lois contraires à la séparations des pouvoirs qui est la seule et unique garantie de démocratie et contraires aux principes des droits humains également. Voilà Messieurs de Nahdha comment? nous citoyens? nous ressentons vos prestations de ces derniers jours à l'assemblée. La méthode du forceps et du passage en force pour faire passer un vote rappelle sans aucun doute des procédés bien connus chez nous . Evitez cela. Sachez que l 'on ne peut garder durablement le pouvoir si l'on est contesté dans sa probité et sa sincérité. Nahdha peut avoir l'excuse de l'ignorer et de le dénier puisque sa référence est religieuse et non démocratique mais l'étonnant et gravissime c'est à quoi jouent les deux partis qui se déclarent démocratiques et révolutionnaires
 
 
-2 #2 Quelle minorité ??
Ecrit par al07     08-12-2011 11:33
Quelle minorité ??
L'ensemble des véritables démocrates ou les
magouilleurs qui ont passés des alliances contre nature pour dominer l'Assemblée Constituante ?
 
 
-8 #1 Ne lachez pas !
Ecrit par qwer     08-12-2011 02:16
Ne lachez pas ! c'est une question de principe et de ... foi ...
Attaquez les vendus , et gardez l'oeil sur l'adversaire ... les vendus sont vos ennemis et l'adversaire reste un adversaire ...

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