Tunisie/ Violences policières : Comment rétablir le contact entre la police et le citoyen ?

Publié le Mardi 18 Septembre 2018 à 15:54
Comment rétablir le dialogue ? C’est le thème de la conférence organisée, ce mardi 18 septembre par la Ligue Nationale Sécurité et Citoyenneté en collaboration avec l’Institut Arabe des Droits de l’Homme et la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme.



Les tensions entre police et citoyens sont de plus en plus fortes. De nombreux cas de violence ont été recensés ces derniers temps, même ceux auparavant inimaginables, de citoyens qui s’en prennent à des policiers.  Le dernier en date s’est passé à Bizerte où un agent de police a été agressé par un jeune homme qui importunait une passante en pleine rue. La scène a été filmée et largement diffusée sur les réseaux sociaux.

La Ligue Nationale Sécurité et Citoyenneté a été créée en juillet dernier. Une première dans son genre sur le continent africain et dans le monde arabe. Elle a pour but de gérer les conflits qui peuvent exister entre la police et le citoyen.

« Nous travaillons déjà avec des associations de la société civile. Mais nous nous sommes dit qu’il fallait également travailler avec des organismes qui défendent les Droits de l’Homme. Et nous avons choisi de collaborer avec l’Institut Arabe des Droits de l’Homme et la Ligue tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH). Nous voulons montrer que le ministère de l’Intérieur est ouvert au dialogue avec tous les citoyens tunisiens » confie à Gnet le Président de la LNSC, Moez Dabbabi.

Moez Dabbabi


Le but de ce séminaire est tout d’abord d’analyser la situation. Une situation difficile puisque la Tunisie est dans une période transitoire, pleine  d’incertitudes tant au niveau politique que sécuritaire.

Avant la révolution, les questions liées à la sécurité n’étaient pas posés dans le débat public. L’Etat policier donnait plein droit à la violence policière. Cette image est encore très présente aujourd’hui. «Nous avons encore des cas de torture dans les prisons tunisiennes. La situation est alarmante en termes de criminalité, en l’absence d’un système de Droits de l’Homme et de contrôle constitutionnel. Les lois existantes n’assurent pas une protection réelle des droits de tous. Il y a aussi un manque de confiance qui doit être géré par l’amélioration de la relation », nous dit Abdelbasset Ben Hassen, Président de l’Institut Arabe des Droits de l’Homme.

Afin de pouvoir résoudre ce phénomène, il faut d’abord comprendre d’où vient-t-il.  Dans un entretine avec Gnet, Sami Nasr, sociologue, spécialisé en criminologie, a déclaré «les deux camps se renvoient la balle. Mais chacun à sa part de responsabilité. Nous sommes arrivés à un stade où la violence se banalise. Une culture de la violence qui a conquis tous les espaces et toutes les catégories : dans la rue, sur les chaines de télévisions, au parlement, à l’école, dans les hôpitaux. »

Sami Nasr


Selon une étude récente, réalisée sur 600 jeunes, il apparaît que 88% d’entre eux disent recourir à la violence, dont 62% ont été eux même victimes de violence dans leur cercle familial. Il s’en suit donc inexorablement un phénomène de reproduction dans la rue ou même à l’école.

Le but de ce séminaire est l’élaboration d’une charte citoyenne afin d’encadrer les relations entre police et citoyens. L’objectif ultime étant de sensibiliser la population, en commençant  par les enfants, puis les adolescents, à l’école ou dans le milieu sportif par exemple. Moez Dabbabi insiste  « cela doit faire partie intégrante de l’éducation civique de chaque tunisien, afin de créer une nouvelle génération impliquée pour son pays».
Wissal Ayadi