Tunisie/ Vie locale : Les électeurs ont réussi le pari de la rupture !

Publié le Jeudi 10 Mai 2018 à 17:04
Siège de la Mairie de Tunis. En attendant l’annonce des résultats définitifs, une fois la période des recours aura expirée, l’instance électorale a révélé hier les résultats préliminaires des élections municipales du dimanche 06 Mai, à l’issue desquelles, les listes indépendants ont raflé la mise, faisant tomber les principaux partis de leur piédestal, en récoltant 2367 sièges, soit 32,9 %, talonné par Ennahdha 2135 sièges, (29.68 %), qui creuse l’écart avec Nidaa Tounes ayant décroché 1595 sièges (22.17 %). A la quatrième et cinquième place, le Front populaire et le Courant démocrate récoltent respectivement 259 (3.6 %) et 205 sièges (2.85 %) des sièges.

Le fait que les électeurs se soient rués en majorité sur les listes indépendantes pourrait avoir deux explications :

La première a trait à l’importance de la proximité dans ce scrutin local, où la notoriété des têtes de listes, pour la plupart des dignitaires venus d’horizons divers, et bénéficiant d’un capital-confiance dans leur localité, a été déterminant dans le choix des électeurs.

La seconde est cette lassitude des partis, de leurs tiraillements, et querelles politiciennes, exprimée dans les urnes, d’autant que pendant toutes ces années où elles étaient au pouvoir, les formations politiques n’ont pas fait grand-chose au pays. Le climat délétère de division et d’affrontement permanent qu’ils ont contribué à instaurer, a tout au contraire empêché la Tunisie d’avancer, et aux problèmes de fond de connaître le chemin du règlement.

Les municipales de dimanche ont révélé une désaffection populaire de la politique, à travers le taux de participation (35,6 %), qui, quoique jugé honorable par l’ISIE, est en deçà des espérances. Il en ressort que les Tunisiens ont été, en majorité, divisés entre ceux qui ont choisi de rester chez eux, et d’autres qui ont préféré s’exprimer dans une tentative d’opérer une rupture au niveau local, en donnant les clefs des communes à des personnalités, qui soit n’ont pas de couleur politique, soit ils en ont une, mais dont la technicité, l’aura, et une certaine sagesse dépassent l’appartenance politique étriquée.

L’autre fait à souligner, qui tient à la spécificité du scrutin local, est que les listes des partis étaient composées, en grande partie, de figures indépendantes, avec des hommes et des femmes de la société civile, des milieux sportif, médical, etc., un atout dont les partis se sont servis sont modération pour redorer leur blason.

Moralité de l’histoire : Le paysage local issu du scrutin du 06 Mai 2018, est totalement différent de celui national, il est peu politisé et peu idéologisé…et si l’on s’en tient aux résultats préliminaires des différentes circonscriptions, on aura à avoir d’un côté des conseils municipaux unicolores et homogènes, en cas d’une victoire écrasante d’une liste donnée (indépendante, partisane ou de coalition), et des conseils municipaux mixtes ou panachés, en cas de victoire relative des uns et des autres.

Il pourrait y avoir, conséquemment, des conseils municipaux formés par des partis considérés comme étant des ennemis jurés, d'autres par d’élus indépendants et d’autres partisans et plusieurs autres combinaisons selon l'issue du scrutin d'une circonscription à l'autre.

Les alliances qui seront nouées seraient beaucoup plus tributaires des résultats des élections et des décisions de nouveaux élus locaux, que du bon-vouloir des partis.

Reste l’influent poste de maire de Tunis qui est, à ce stade, disputé entre Ennahdha avec sa tête de liste à Tunis, Souad Abderrahim, ancienne membre de l’ANC ; et le candidat de Nidaa Tounes, Kamel Iddir, ancien handballeur, et qui n’est pas étranger à ladite municipalité puisqu’il en a occupé la vice-présidence entre 1995 et 2005. 

Ennahdha est en tête à Tunis, mais n’a pas la majorité requise qui lui permet d’avoir le dernier mot. Nidaa veut lui barrer la route, moyennant des alliances. Le débat n’est pas tranché et part dans tous les sens. Mais quoiqu’il en soit, ce sera un(e) pharmacien (enne), les deux postulants sont issus de la même profession, qui sera intronisé(e) Cheïkh el-Médina, une fois cette dispute sera arbitrée, forcément au moyen des alliances.

Gnet