Tunisie/ UPUCT : "Le projet de réforme universitaire est mort-né"

Publié le Mercredi 10 Juin 2015 à 14:31
Vue de la conférence de presse de l'UPUCT.L’Union des Professeurs Universitaires et Chercheurs Tunisiens a organisé une conférence de presse autour des défaillances du projet de réforme de l’enseignement supérieur, qui sera examiné par l’ARP. Pour l’UPUCT, ce projet est « un échec total »

L’enseignement et le diplôme universitaires ne mènent quasiment plus au succès. Chaque année, il y a davantage de chômeurs et les étudiants regrettent de plus en plus les années « gaspillées » à la faculté. Ce projet proposé par le Ministère de l’Enseignement Supérieur ne résoudra pas le problème. C’est ce qu’affirme, sans laisser l’ombre d’un doute, Najmeddine Jouida, coordinateur de l’UPUCT :  « Il y a une rupture entre nous et et le ministère. Le projet de réforme a été conçu loin des principaux concernés et dans des bureaux fermés. Les idées sont parachutées, sans aucun rapport avec la réalité que nous vivons au quotidien ».

Pour commencer la réforme, il faut d’abord une évaluation claire et effectuée par des experts : « Il n’y a pas de chiffres, ni des statistiques claires. Tout est fait à la hâte et nous sommes certains que c’est un projet mort-né », a affirmé Najmeddine Jouida. Il précise : « Il n’y a même pas eu d’inspiration des expériences effectuées à l’étranger. Il n’y a ni les outils ni les indicateurs de réussite ».

Selon le ministère, le projet qui vise entre autres à réduire le taux de chômage, devrait être appliqué durant les dix prochaines années. Pour l’UPUCT, c’est complètement insensé : « Il n’y a aucune statistique du chômage par spécialité. Même lors de plusieurs réunions avec les décideurs, c’était la langue de bois avec des slogans légers », affirme Najmeddine Jouida. Son collègue et adjoint, Zied Ben Amor lui fait écho : « On nous parle de nouvelle gouvernance, mais qui va s’en occuper ? Et les comités, c’est encore pire. Qui sera aux manettes et qui va prendre des décisions ? Quels seront  leurs objectifs et stratégies ? Personne ne nous a jamais répondu ».

L’UPUCT souligne ensuite un problème qu’elle juge « très grave ». Zied Ben Amor : « Nous constatons une migration des cadres universitaires surtout vers les pays du Golfe. Nous manquons de plus en plus d’effectif de qualité. Environ 3000 professeurs universitaires sont partis. Ceux qui restent n’arrivent plus à assurer les licences, que dire des mastères. Comment s'en sort-on ? Ce sont les vacataires qui prennent le relais, sans avoir les mêmes compétences ». L’UPUCT revient ensuite sur un chiffre jugé catastrophique : « Nous avons 600 laboratoires de recherches biologiques. De l’autre côté, nous avons environ 700 chercheurs au chômage ».

L’UPUCT a proposé des solutions pour la « démocratisation de l’Université tunisienne ». Qu’est ce que ça veut dire ? Zied Ben Amor explique : « Actuellement, cela ne veut effectivement rien dire. Il y a des lobbies mis en place par les anciens cadres des universités. Il y des Docteurs titulaires qui ne peuvent pas voter. Les conseils scientifiques ? Ce sont les directeurs qui ont le dernier mot et qui ont le droit de désigner. C’est complètement inadmissible et il faut que ça change ».

L’infrastructure est dans un état lamentable. Ceci est vrai dans l’écrasante majorité des établissements universitaires du pays et pas seulement dans les régions intérieures. Le projet du ministère n’offre aucune solution. Pire encore : « La situation de tous les recteurs et les doyens de tous les établissements universitaires n'est pas légale. Pourquoi ? Le Tribunal Administratif a annulé les résultats des élections post-révolution, ce qui veut dire que ces doyens ne doivent pas exercer, et pourtant, ils sont là, sans aucune intention de résoudre ces graves problèmes »

Pour conclure, les membres de l’UPUCT ont affirmé que ce projet, qui sort après quatre années de travail, ne va qu’empirer la situation dans les Universités tunisiennes : "S'il n'y a pas d'évaluation scientifique, nous allons partir, très rapidement vers le chaos le plus total".
Selim Slimi

 

Commentaires 

 
-1 #1 erratum
Ecrit par zied ben amor     10-06-2015 16:31
Si Selim merci pour l'article. Juste une petite rectification ce ne sont pas les doctorants qui ne peuvent pas voter mais des Docteurs titulaires. C'est que le principe du vote indirect est non-représentatif. En effet, le corps B des universitaires constituant 82% du corps universitaire enseignant n'est représenté que par 25% des voix lors des élections des Présidents des Universités et par 50% des voix lors des élections des Doyens et des Directeurs d'Institutions.
Merci de bien vouloir corriger cette info,
cordialement
Zied BEN AMOR

NDLR
C'est rectifié, merci.
 
Ces commentaires n'engagent que leurs auteurs, la rédaction n'en est, en aucun cas, responsable du contenu.