Tunisie/ UE : Coup de poignard dans le dos, ou vrai manquement !

Publié le Mercredi 06 Décembre 2017 à 16:38
La Tunisie ne s’attendait vraisemblablement pas à être aussi lourdement sanctionnée par l’Union européenne, qui l’a placée hier, à côté de seize autres Etats, sur une liste noire de paradis fiscaux. A s’en référer au communiqué du ministère des Affaires étrangères paru en ce début d’après-midi, les autorités tunisiennes semblent être furieuses, exprimant "étonnement" et "consternation", et percevant la décision européenne, comme un coup de poignard dans le dos.

Jusqu’à hier, mardi 05 décembre, et avant que cette décision ne tombe à l’issue d’une réunion à Bruxelles des 28 ministres des Finances de l’UE, la Tunisie se faisait bercer d’illusions, avec une ferme conviction d’être le chouchou de l’Europe. Se laissant grisés par le concert de louanges que les dirigeants européens ne manquent pas une occasion de formuler à l’adresse de notre pays et de sa transition démocratique réussie et exceptionnelle, et de leur engagement pour un soutien complet, multiforme et constant à son processus transitoire, les responsables tunisiens plaçaient de grands espoirs sur les Européens, et comptaient grandement sur leur appui et leur générosité pour sortir le pays de l’ornière. La position tunisienne a manifestement manqué de rationalité, le verdict des argentiers européens est venu le prouver.

La Tunisie a beau plaider sa cause, mettant en avant ses efforts pour s’en tenir aux normes internationales de transparence fiscale, et affirmant avoir  fourni toutes les données attestant de la conformité de son système fiscal, à la réglementation européenne en la matière, cela ne dissimule en rien le manquement. Si les Tunisiens avaient fait ce travail comme il se devait, et à temps, ils auraient eu la même chance que le Maroc, dont les experts ont réussi à convaincre les cercles européens, en leur donnant des gages et en s’engageant à changer leur politique.

Il est, en effet, clair que notre pays s’en est pris sur le tard. Résultat : ses engagements dépêchés à la dernière minute, à la veille de la réunion ministérielle de Bruxelles, n’ont pas été pris en considération, et ne lui ont pas permis d’éviter d’être blacklistée. Une révision de cette décision reste possible, si les autorités nationales persuadent la partie européenne, du bien-fondé de leur politique fiscale et de leur engagement en faveur de la lutte contre l’évasion fiscale.  

L'UGTT met en garde contre des sanctions économiques
Entretemps, les réactions  fusent, notamment celles des deux principales organisations nationales qui fustigent la démarche européenne.  

L’UTICA pointe une grave décision qui aura "des conséquences extrêmement négatives sur les relations de la Tunisie avec l’Union européenne, et sur les programmes bilatéraux de coopération, ainsi que sur la renommée de la Tunisie, son image, et sur l’investissement étranger et sa notation souveraine".

Dans un communiqué paru cet après-midi, l’organisation patronale appelle à dévoiler toutes les circonstances ayant conduit à cette décision, et presse le gouvernement à reprendre rapidement le dialogue avec l’Union européenne, et à peser de tout son poids pour rectifier le tir.

L’UGTT regrette pour sa part la décision européenne, eu égard aux "sanctions économiques" pouvant en découler, à l’heure où notre pays s’apprête à entamer un nouveau round de négociations avec l’UE dans le cadre de l’accord de libre-échange, et à mobiliser les ressources d’endettement extérieur pour le budget de 2018.

La centrale syndicale considère ce classement, comme étant inéquitable envers la Tunisie, en dépit des réformes que requiert son dispositif fiscal, et constitue une atteinte à son processus transitoire et à sa construction démocratique.

L’organisation syndicale prévient contre la faible prestation de la diplomatie économique tunisienne, et son manquement quant à régler ce dossier posé à la discussion au sein de la commission européenne depuis juin 2015. L’UGTT appelle le gouvernement à traiter ce dossier avec sérieux et responsabilité, à examiner, d’une manière participative, les causes objectives de ce classement, et à aller de l’avant en matière de réforme fiscale, en rompant avec la discrimination fiscale, et en consacrant les attributs de la transparence fiscale, conformément aux standards internationaux.   
Gnet