Révolution : Politiques et intellectuels livrent leur analyse cinq ans après

Publié le Mercredi 13 Janvier 2016 à 17:35

"La révolution tunisienne et l’avenir du printemps arabe", un thème inépuisable qui refait surface à l’occasion du 5ème anniversaire du soulèvement populaire du 14 janvier 2011. C’est le centre des Etudes Stratégiques et Diplomatiques qui y consacre, ce mercredi,  une conférence animée par plusieurs hommes politiques et chercheurs, dont Abou Yaareb Marzouki, Jawher Ben Mbarek, Hamza Meddeb ou encore Rached Ghannouchi. 

En chercheur au Carnegie Middle east Center, notamment sur les conflits et sécurité sur les frontières au Moyen orient, Hamza Meddeb a indiqué lors de son intervention que la crise sécuritaire était liée à la crise politique : « Ils sont étroitement liés, et nous en avons eu la preuve après les assassinats de Belaïd et Brahmi, ou de nos soldats à Chaâmbi... », a-t-il dit. Dans la région, on remarquera l’usage de la violence pour des fins politiques, a-t-il ajouté,  expliquant qu’il s’agissait «d’une stratégie tactique qui a déjà été utilisée à travers l’histoire ». Avec le printemps arabe, le terrorisme a trouvé son terreau dans la précarité parmi les jeunes, surtout en Tunisie. « Il faut une politique publique qui réactive l’ascenseur social et donne de l’espoir aux jeunes…mais aussi l’Etat ne doit pas s’accaparer les affaires religieuses pour ne pas créer de courants clandestins, il doit aussi lutter contre la contrebande qui est liée au terrorisme », a-t-il dit.

En désignant une carte du monde arabe, Fathi Nouri, professeur à L’ESSECT, a rappelé que de tous les pays qui ont connu le printemps arabe, seule la Tunisie a réussi une transition démocratique pacifique. «Je parle d’une réussite relative, puisqu’on est en cours d’expérimentation d’un nouveau régime politique », a-t-il souligné. Dans ce nouveau contexte, la Tunisie fait face à différents défis, dont la question économique. L’universitaire estime que plusieurs facteurs ont été la cause de la crise économique que connait le pays. « Il existe plusieurs raisons. Parmi elles, les attentes des Tunisiens qui sont plus grandes que les moyens dont dispose le pays. Il nous manque aussi les moyens humains. Nous manquons également de personnes formées pour la gestion de crises". Il pointe du doigt plusieurs phénomènes qui ont aggravé la situation économique depuis le 24 janvier 2011. L’économiste énumère : «Nous souffrons d’un déficit des équilibres, de la culture de la fainéantise,  nos investisseurs sont devenus attentistes et indécis, de la hausse de la contrebande, et puis l’Etat a perdu sa capacité de négocier face aux autres organismes nationaux. Tout cela a contribué à cet état de fait », a-t-il indiqué.

Pouvoir et le contrepouvoir
 Jawher Ben Mbarek, chercheur et docteur en droit, a parlé de la mise en place des institutions et de la décentralisation du pouvoir. « Cinq ans après la révolution, les Tunisiens ressentent que rien n’a changé durant ces années, et ce pour plusieurs raisons : on a mis l’humain au centre des objectifs de la révolution, au lieu que ce soit les institutions. On a mis le volet social et économique au centre de la réforme, ce pourquoi le peuple ressent que la transition démocratique n’a profité qu’a la classe politique, sans avoir eu d’impact sur la vie des gens". Il a critiqué la manière avec laquelle a été abordée « la transition institutionnelle », déplorant le manque d’intérêt accordé à la décentralisation du pouvoir.  « On s’est exclusivement intéressé au régime politique à adopter, tandis que la décentralisation du pouvoir est un sujet d’importance majeure », a-t-il souligné. Le deuxième défi, selon Ben Mbarek est de faire l’équilibre entre le pouvoir et le contrepouvoir : « Nous avons tous vu comment  on a essayé de faire échouer la justice transitionnelle et l’Instance Vérité et Dignité en créant le projet de loi sur la réconciliation économique. Un autre exemple, celui du retard accusé lors de la création du Conseil Supérieur de la Magistrature, ce qui est en soi, une transgression de la constitution …tout cela reflète la profondeur des conflits », a-t-il dit. Concernant les prérogatives des collectivités locales, Jawhar Ben Mbarek regrette que les mêmes termes utilisés dans les anciennes lois, soient ceux employés dans les nouveaux textes de loi. « Ils préconisent que le pouvoir central ait la mainmise sur les collectivités locales, et dispose toutes les prérogatives pour apporter les modifications qui lui conviennent, en usant des outils qui lui conviennent », a-t-il dénoncé.

Crise dans la compréhension de la religion
Rached Ghannouchi, président du mouvement Ennahdha a quant à lui parlé de l’avenir du printemps arabe, en commençant par la Tunisie : « Il s’agit d’une vraie révolution, quoiqu’on dise. Ce n’est pas  un coup d’Etat, ou une opération de réforme. Une révolution qui veut rebâtir les fondements de la société. Si nous avons défendu un régime parlementaire, c’est parce que les principaux régimes dans le monde sont comme tel. Ceux qui ont défendu la présidence, il s’est avéré qu’ils se voyaient déjà présidents", a-t-il dit, avant d’ajouter qu’il ne souhaiterait voir aucun parti dissout ou souffrant de conflits internes, en parlant de Nidaa Tounes. « Je ne vais plus évoquer l’histoire de l’oiseau et des deux ailes, qui semble avoir dérangé certains, mais ils oublient qu’on leur a laissé plusieurs autres organes comme la tête et le cœur », a-t-il déclaré.

Le changement en Tunisie a inspiré plusieurs pays.  Ghannouchi évoquera le Maroc : « Mohamed 6 a choisi quelques mois après le 14 janvier d’apporter des changements sur la constitution marocaine et de faire participer le peuple au pouvoir, afin de créer l’équilibre…Nous avons frappé aux portes du pouvoir dans les années 80, pour faire de même, mais le pouvoir était hermétique», a-t-il dit.

Toute transition nécessite des sacrifices, Ghannouchi rappelle que ceux d’Ennahdha avaient été de quitter le pouvoir en 2013 : « Le but est de vivre son temps, tout en s’attachant à la religion…pour qu’une démocratie  soit stable, il faut qu’on s’unisse autour. Il n’y a plus de place à la politique du parti unique », a-t-il dit. Pour finir, le chef du mouvement islamiste a parlé du terrorisme, qu’il qualifie « d’une crise dans la compréhension de la religion, une crise dans la redistribution de la richesse et du pouvoir…il faut lutter contre la marginalisation économique », a-t-il terminé. 


Chiraz Kefi

 

Commentaires 

 
#5 @hold up
Ecrit par Rania     15-01-2016 11:29
les islamistes ont été victimes de la dictature, et ce sont leurs droits que le parlement leur à donné.
si non ont voit beaucoup de changement, monsieur on est libres, un peuple libre!!!!
grâce aux victimes quelques soient islamiste ou non! à part ça je respecte le fait que Rached Ghannouchi à favorisé la Tunisie avant ces principes
 
 
#4 @hold up
Ecrit par Rania     15-01-2016 11:19
c'est comme ça que tu explique! tout d'abord les islamistes n'ont rien à voir avec les terroristes qui tuent les Tunisiens, là tu vise le parti nahdha, sait bien que ce parti a fait beaucoup de sacrifices, et il fait encore, ce n'est pas facile de tendre la main au ennemis d'hier, que si on favorise l'intérêt de la patrie!
"la patrie avant le parti"
 
 
#3 RE: Révolution : Politiques et intellectuels livrent leur analyse cinq ans après
Ecrit par Zhayra     14-01-2016 07:22
Contrairement à ce qui est écrit dans votre article,le professeur Jaouhar Ben Mbarek dit que l'accent a été mis sur la refonte des institutions et non sur les revendications économiques et sociales et que l'humain n'a pas été au centre des préoccupations de la classe politique. Le volet économique et social a été négligé ce qui a amené ce sentiment chez les tunisiens que la transition n'a profité qu'à la classe politique.
 
 
#2 5 ans ?
Ecrit par A4     13-01-2016 18:33
CINQ ANS
Ecrit par A4 - Tuns, le 17 Décembre 2015

A seulement cinq ans, elle est déjà vieille
Recroquevillée, triste dans sa corbeille
Elle n'a que cinq ans et je ne sais pas comment
Elle a pu nous faire tous ces monstrueux enfants
Des enfants bâtards atteints de malformations
Traînant des maladies, souffrant d'aliénation

A seulement cinq ans, elle est vraiment laide
Vivant sans le sous, sans ressources et sans aide
Vivotant ou presque, emportée par les vents
Ne sachant comment faire sur du sable mouvant
Comment ne pas perdre son sang et sa sève
Avec des enfants fainéants ... ou en grève ?

Elle a à peine cinq ans et je la trouve moche
Avec rien dans la tête et rien dans les poches
Rien à offrir dans ce lamentable désert
Que le partage équitable de la misère
A tous ces suceurs de sang, à tous ces frérots
Et à tous ces lâches qui se prennent pour des héros

A cinq ans de survie, elle est déjà sourde
Elle a plein les oreilles de mensonges et bourdes
Elle ne veut plus entendre, elle a vraiment marre
De tous ces écervelés, de tous ces vantards
Qui lui disent la chose et puis son contraire
Qui toujours radotent sans jamais se taire

Au bout de cinq ans de nuit, moi c'est à genoux
Que je prie toutes les diablesses aux dents de loup
Tous les marabouts, les saints et même les madones
Que j'implore Satan, le grand Satan en personne
Pour qu'elle décide enfin de faire comme celles d'antan
Qui ont dévoré tout cru leurs maudits enfants !
 
 
-1 #1 Hold up
Ecrit par Royaliste     13-01-2016 18:16
le seul changement depuis la révolution est le fait que le tunisien a du payer 750 Md de Dinars en faveurs des islamistes 'victimes ' de la dictature, lesquels islamistes ont récidivés en tuant plus de citoyens
 
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