Tunisie/ Révolution : Ni bénédiction, ni malédiction, plutôt un ratage !

Publié le Vendredi 15 Janvier 2016 à 17:46
On l'a dégagé, mais on s'est pas suffisamment engagé. Le souvenir est indélébile dans l’imaginaire collectif tunisien, mais l’enthousiasme s’émousse. En ce début 2016, on est bien loin de l’esprit et de la ferveur du 14 janvier et des jours qui ont suivi. Cinq ans après, le bilan de la révolution est loin de faire l’unanimité, deux principales visions diamétralement opposées s’affrontent :

La première présente le 14 janvier comme une bénédiction ayant permis aux Tunisiens de reconquérir leur liberté, et au pays d’amorcer un processus d’édification démocratique. Cette conception est élitiste et émane de ceux qui ont vécu la répression et la marginalisation sous l’ancien régime, et qui se trouvent aujourd’hui propulsés aux devants de la scène publique.

La seconde, largement partagée parmi la population, en voit a contrario une malédiction, dans la mesure où la vie de tous les jours devient plus pénible, et où le pays est confronté à des difficultés et des défis, qu’elle n’a guère connus par le passé, notamment avec la montée du danger terroriste, l’aggravation des problèmes socio-économiques, et l’accentuation du chômage, de la précarité et de la pauvreté, particulièrement dans les régions intérieures, berceau du soulèvement populaire.

Les tenants de telle vision ou telle autre ont tendance à présenter les choses selon une approche beaucoup plus sentimentale, que rationnelle ; objectivité et réalisme se perdent en cours de route.

La révolution est, sans conteste, une chance historique qui s’est présentée aux Tunisiens, et aux peuples de la région qui s’en sont inspirés, pour prendre leur destin en main, et changer leur vécu vers le mieux, en faisant valoir les valeurs de liberté, de justice sociale et de dignité. Ce n’était point un aboutissement, comme on avait tendance à le croire par erreur, mais l’ébauche d’un nouveau projet, dont l’amorce et la concrétisation requerraient action et effort collectifs. 

Aujourd’hui, tout le monde en convient que les objectifs de la révolution sont restés des slogans creux, et n’ont pas été réalisés ; que les gouvernements qui se sont succédé ont échoué à satisfaire les attentes et les aspirations populaires, et que le legs hérité de l’ancien régime a été encore plus alourdi par des difficultés de toues sortes. A quoi cela tient-il ?

La révolution n’est en aucun cas la cause de cet état de dégradation généralisée, le problème résidait dans la  manière dont on l’a perçue, et utilisé les valeurs et acquis qu’elle nous a procurés, la liberté en prime.

L’immaturité de la classe politique, son inexpérience et peut-être son incompétence, y sont pour beaucoup, il n’y a qu’avoir l’état lamentable dans lequel se retrouve aujourd’hui Nidaa Tounes, l’ex-parti de la majorité. Et il n’est pas le seul à avoir connu une telle décomposition, de nombreux anciens partis ont été voués au même sort, passant, en un laps de temps court, d’un état de grandeur, voire du sommet du pouvoir, ou d’une vocation à le conquérir, à un état de décadence, voire à des coquilles vides, affaiblies et désertées qu'ils étaient, par leurs dirigeants et militants.

L’immaturité du peuple doit être aussi soulignée, et on n’a pas à rougir en l’avouant. Le fait de considérer la liberté comme une arme de désobéissance massive et une rébellion contre l’ordre établi, contre l’Etat, les lois, et les principes du vivre ensemble a conduit à cette situation peu reluisante, cinq ans après.

Si on avait dès janvier 2011 retroussé les manches, si on s’était remis au travail, si l’Etat avait appliqué les lois, et si les citoyens l’avaient respectées, notre situation aurait été totalement différente aujourd’hui. C’est tout le contraire qui s'est produit ; la liberté et la démocratie qui devraient libérer les élans et les initiatives pour remettre le pays sur la voie de l’action et du redressement, se sont révélées être des freins, ayant réveillé les démons des égoïsmes, des individualismes, des tiraillements stériles…cela fait du temps perdu, une chance ratée, et des espérances trahies par nous-mêmes. Ce qui afflige le plus, c’est qu’on n’est guère en train de tirer les enseignements ; on persiste et signe dans le tort.
H.J.

 

Commentaires 

 
+1 #1 article partisan
Ecrit par Léon     18-01-2016 09:14
Monsieur,
Vous reconnaissez l'existence de deux tendances diamétralement opposées et reconnaissez même implicitement que les irréductibles de la première est constituée de gens qui se vengent. Vous reconnaissez implicitement aussi que le peuple dans sa majorité fait partie de la deuxième tendance. Celle qui diabolise la révolution et que les déshérités (régions et humains) le sont devenus davantage.
Le peuple aura mis cinq années avant de constater ce que Léon lui chantait depuis le début. Car qui détient l'information, d'tient le pouvoir, et moi, monsieur, je sais pourquoi la révolution a été faite, et connaissait donc ses conséquences. Je n'ai cessé d'en avertir les lecteurs, jadis dans leur nuage et leurs rêves, et qui aujourd'hui réveillés, se rendent compte de l'énormité et de la gravité de ce qu'ils ont fait à leur pays. Trop tard! Mais mieux vaut tard que jamais.
C'est sur cette base, ce réveil, que l'on peut espérer des lendemains meilleurs.
Mais que faites-vous suite à ce réveil populaire que vous constatez de vous-même? Vous dites que ces deux visions sont sentimentales et irrationnelles sans objectivité, ni réalisme. Vous émettez une hypothèse juste (constat du réveil) puis vous concluez comme bon vous semble (sophisme ou syllogisme?).
Que les premiers soient des sentimentaux est écrit dans vos hypothèses (vengeance par rapport à un régime), mais que les deuxièmes le soient, c'est simplement votre envie. Quoi de plus réaliste que leur quotidien, leur sécurité et leur assiette, mon cher? C'est vous même qui le dites! Alors pourquoi adoptez-vous la même conclusion pour les deux parties?
Tout simplement parce qu'en réalité votre révolution est bourgeoise et que cette bourgeoisie ne comprendra que le jour où elle verra les affamés à sa porte. C'est çà la vraie révolution!
Vous essayez encore de duper alors que vous êtes devant une évidence: Plus personne ne veut de votre révolution, sinon une certaine bourgeoisie aigrie pour ne pas avoir le pouvoir avec l'argent! Ou encore le pouvoir après l'instruction.
Ce sont d'ailleurs les médiocres clichés qui sont sortis qui confirment mes dires; comme l'histoire du bac-3 qui se retourne aujourd'hui contre le peuple. Quelle honte que le parterre de diplômés de Harvard et de l'X, ne soient pas arriver à assurer le millième de ce que faisait le bac-3.
Vous parlez de l'immaturité du peuple. Pourquoi ce vocable était perçu comme étant anti-démocratique quand les anciens le disaient. Vous faut-il ruiner votre pays pour vous permettre un constat évident?
Vous parlez aussi de se retrousser les manches! Ben Ali avait-il reproché aux tunisiens leur manque de labeur? Il a fait son travail et ne s'est pas occupé de philo. Il est facile de dire au peuple de se retrousser les manches. C'est au politique de créer de l'emploi! N'est-ce pas ce que vous demandiez à Ben Ali lorsqu'il n'y avait que 300000 chômeurs? Et il vous avait promis d'en employer 200000 en trois ans. Va dire aux malgaches de se retrousser les manches! À quoi cela servira-t-il? Il n'y a pas de travail!
N'en déplaise aux haineux, aux footeux, aux régionalistes et aux jaloux, Ben Ali avait réussi, ce que tous les tunisiens essayent de réussir, mais en vain, aujourd'hui.
VIVE LA TUNISIE,
À BAS LES TRAITRES;
Léon, Min Joundi Tounis al Awfiya;
VERSET 112 de la SOURATE des ABEILLES.
 
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