Tunisie/ Politique : Une loi qui risque de punir le pays et son peuple !

Publié le Vendredi 28 Juin 2013 à 17:49
Aucun Tunisien ne veut que l’ancien régime renaisse des ses cendresLa proposition de loi portant immunisation de la révolution a provoqué une profonde fissure dans la classe politique. Même si l’état de division du paysage politique tunisien était coutumier dès le 14 janvier, et encore plus depuis la proclamation des résultats des élections du 23 octobre, on a l’impression de passer à un palier supérieur en matière de clivage, qui s’apparente à une guerre politique existentielle entre Ennahdha d’un côté, et Nida Tounes de l’autre, et entre les partis qui sont dans leur sillage.

L’affrontement autour de cette proposition de loi, dont le débat article par article a été voté ce vendredi à la majorité des voix, s’annonce long et ira au-delà de l’adoption de ce texte, déjà acquise pour le parti majoritaire à l’ANC. La radicalisation des positions à son sujet laisse transparaître des risques que la situation ne dégénère et que les Tunisiens ne paieront cher le passage de la loi d’exclusion.  

La Tunisie est à ce jour dans une situation globalement fragile : sa transition démocratique marque le pas, son économie vacille, ses problèmes sociaux, du fait du chômage, de la précarité et de la pauvreté, s’aggravent, son tissu social risque l’effritement,  à cause de  la polarisation idéologique et des haines et rancœurs qui en découlent, sa stabilité est menacée par le spectre de la violence et du terrorisme… Résultat : un état de spleen et de désespoir est perceptible quant à cet aboutissement décevant d’un processus révolutionnaire, que l’on a cru salvateur. L’évocation de la loi d’immunisation de la révolution dans un tel contexte est on ne peut plus inopportune, car elle est génératrice de divisions supplémentaires.

L’enthousiasme et l’opiniâtreté, avec lesquelles les instigateurs et partisans de cette proposition de loi la défendent, sont révélatrices de blessures individuelles qui restent entières et profondes. Même s’ils récusent toute attitude vengeresse, les nahdhaouis, plus que d’autres, n’arrivent pas à évacuer les souffrances du passé, fait de répression, de marginalisation, de prison, d’éloignement et de violation des droits de l’Homme les plus élémentaires. L’ancien régime a détruit des vies et des familles, et s’est appuyé en cela sur des appareils de répression et de propagande…c’est là une vérité que personne n’ose nier.

Mais n’y-a-t-il pas un mécanisme appelé "justice transitionnelle" censé revisiter ce passé douloureux, demander des comptes et juger les coupables et rendre justice aux victimes. Pourquoi le processus de justice transitionnelle dont le projet de loi est rangé depuis des mois dans les tiroirs de l’Assemblée nationale constituante, est ainsi mis à mal, alors que son enclenchement aurait donné un signal positif aux victimes et au peuple dans son ensemble, et lancé une mise en garde aux fautifs présumés qui auraient été plus précautionneux.

Aucun Tunisien n’a envie aujourd’hui que l’ancien régime renaît de ses cendres. A fortiori qu’une révolution est, par définition, une rupture avec le passé, dans son mode de gouvernance, ses méthodes, ses pratiques et ses exactions. Tout naturellement, le démantèlement du dispositif de corruption politique et financière prend du temps, et la Tunisie est à mille lieues d’en être totalement guérie. De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer la recrudescence des pratiques de corruption et de malversation dans plusieurs domaines, du fait de la faiblesse de l’Etat et d’un certain laxisme en matière d’application des lois. La moralisation escomptée est bien lointaine, et sa concrétisation reste tributaire d’une révolution au niveau des mentalités et de l’état d’esprit général qui est encore défaillant, tant au niveau de la classe politique que de la population. Ce n’est pas par des lois d’exclusion qu’on extirpe le despotisme à la racine, et ce n’est pas par la violence des LPR qu’on immunise la révolution…mais par le développement d’une conscience collective, par la consolidation du patriotisme et du respect de l’intérêt général chez les Tunisiens, par la force de l’argument et non par l’argument de la force.  

L’élite politique a une grande responsabilité dans la défaillance tous azimuts qui gagne la société, car elle a échoué à faire preuve de respectabilité et d’exemplarité, susceptibles de produire des effets positifs sur l’opinion publique. A l’inverse, l’élite choque de plus en plus par sa conduite parfois indigne. Il n’y a qu’à voir les chamailleries permanentes à l’ANC, qui se transforme en foire d’empoigne, devant des Tunisiens éberlués. Dans ce contexte, le rôle d’un parti politique au pouvoir est de calmer les esprits et de favoriser l’unité et la cohésion, pour faire baisser autant que faire se peut la tension. Ce même parti doit peser le pour et le contre, et évaluer le rapport bénéfice/risque de toute action qu’il entreprend.

Le projet d’immunisation de la révolution comporte plusieurs risques, fait peur et pourrait se transformer en une punition de tout un pays et de tout un peuple dont le seul tort est d’avoir mené une révolution.  Ceux qui seront exclus ne resteront pas les bras croisés. Leurs adversaires crient d'emblée haut et fort qu’ils feront tout pour rendre effective cette loi. On n’ose pas imaginer à quoi tout ça peut-il nous mener. Sagesse…quant tu nous manques.
H.J.

 

Commentaires 

 
-3 #7 RE: Tunisie/ Politique : Une loi qui risque de punir le pays et son peuple !
Ecrit par Ben     01-07-2013 07:26
H.J nous rappelle les discours de nos "sages" la veille du 14 Janvier, qui voulaient la réconciliation avec Ben Ali.
 
 
#6 IL est Tounsi et reste Tounsi
Ecrit par Tounsi     30-06-2013 12:57
A mon avis il faut filtrer et admettre ceux qui sont bons, qui ont l’expérience et qui sont capable de mettre le pays économiquement à l’labrit et peuvent résoudre les autres problèmes.
XYZ Du moment où il est Tunisien il a le droit de s’intégrer au développement de son pays.
Par contre il faut appliquer juridiquement c’est qu’il doit mériter s’il est coupable.
 
 
-1 #5 Pour cette loi
Ecrit par Hamou     29-06-2013 17:12
Je suis entièrement en faveur de cette loi. Il faut barrer les routes à tous les opportunistes du passé benalien.
RCD DEGAGE
NIDAA TOUNES DEGAGE
MORJENE DEGAGE
JGHAM DEGAGE
L'auteur de cet article DEGAGE
 
 
-3 #4 PAS MOI
Ecrit par adem8     29-06-2013 15:13
Tunisie/ Politique : Une loi qui risque de punir le pays et son peuple ! ( RCD DEGAGE )
 
 
+2 #3 RE: Tunisie/ Politique : Une loi qui risque de punir le pays et son peuple !
Ecrit par Royaliste     29-06-2013 11:45
aujourdhui, les exclus d'hier s'obstinent a exclure leurs adversaire..., l'Histoire se repete

en Tunisie rien n'a changé sauf les visages, le systéme est le meme, la corruption est la meme, les 'élus' s'accrochent a leurs sieges, leurs avantages et placent leurs amis et fidéles aux postes clefs.


PS: seul les naifs ont cru que nahdha voulait démocratiser le pays
 
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