Tunisie/ Partis politiques : Une loi organique appelée à se substituer au décret-loi n’o 87

Publié le Mercredi 30 Août 2017 à 14:00
Une consultation se tiendra en septembre en vue de réviser la législation sur les partis. Le ministère des relations avec les instances constitutionnelles, la société civile, et les droits de  l’homme s’apprête à lancer une consultation sur la préparation du nouveau cadre juridique organisant les partis politiques, de manière à mettre en adéquation la législation tunisienne régissant les PP, avec les dispositions de la nouvelle constitution, notamment l’article 65 et les exigences de l’étape.

Menée suivant une approche participative, ladite consultation aura lieu le 12 septembre à Tunis, et aura à évaluer, en présence des partis politiques,  le texte actuel organisant les formations politiques. Selon Mehdi Ben Ghabia, son ministère envisage d’élaborer un nouveau projet de loi organique régissant les partis politiques, tout en préservant l’esprit libéral du décret-loi n’o 87, et en étant en phase avec les standards internationaux en la matière.

Le débat sur le cadre légal en devenir sera focalisé sur les différents aspects de gouvernance du dossier des partis politiques auprès de l’administration, à travers l’amélioration et la numérisation des mesures administratives, la mise en place d’une réglementation organisant la plateforme électronique des partis, ainsi que d’un dispositif de financement public, tout en consolidant la transparence en matière de  financement des partis, de leur gestion administrative et financière, et en dotant l’administration des mécanismes nécessaires à même de garantir la transparence de l’action partisane et le respect de la loi, indique une note du ministère des relations avec les instances constitutionnelles.

Le débat de septembre portera sur les principaux problèmes posés en termes d’application du décret-loi n’o 87, les difficultés liées à l’exercice de l’action partisane, s'agissant de la fondation, gestion, financement et gouvernance, les choix possibles en vue de l’instauration d’un système de financement public des partis, et le contrôle des activités des formations politiques, etc.

Historique de la vie partisane en Tunisie
L’avènement des partis politiques en Tunisie, comme cadre de l’action politique, remonte à la période du protectorat français. L’action partisane était à l’époque fondamentalement dirigée contre la colonisation française, jusqu’à la libération du pays de l’hégémonie étrangère. Le Destour (parti libéral destourien) a été fondé en 1920, puis le Néo-Destour en 1934, outre le parti communiste tunisien, souligne la même note.

La constitution du 1er juin 1959, la première de la Tunisie indépendante consécutive à la proclamation de la république, garantit dans son article 6 la liberté d’expression et le droit de fonder des associations. Parue la même période, la loi n’o 154 de l’année 1959, du 7 novembre 1959, était le cadre organisant l’action partisane et associative. Selon les experts de droit, cette loi a vidé l’article 6 de sa substance, pour les restrictions qu’elle a contenues à l’action associative. 

Son article 4 a institué le visa légal accordé par le secrétaire d’Etat à l’Intérieur,  pour toute nouvelle association créée, lequel avait totale latitude d’accorder ou de refuser un tel visa.
Première législation de ce type après l’indépendance, la loi organique n’o 32 de l’année 1988 organisant les partis politiques, était en dessous du seuil minimum en termes d’exercice démocratique, outre la politique programmée de l’ancien régime de restreindre l’action politique et partisane, et d’asphyxier les partis d’opposition. 

Paru après la révolution, le décret-loi n’o 87 de l’année 2011 du 24 septembre 2011 organisant les partis politiques, a stipulé dans son article premier la liberté de fonder des partis politiques, d’y adhérer, et d’être actifs en leur sein. Ce décret-loi vise à consacrer la liberté d’organisation politique, la consolidation du pluralisme politique, ainsi que le principe de transparence et de gestion des partis.

Le rôle des partis politiques s’est consolidé avec la promulgation de la constitution du 27 janvier 2014, qui a affirmé dans son préambule l’institution d’un régime républicain démocratique et participatif. Son article 35 a stipulé la liberté de formation des partis, des syndicats et associations.

Selon l’article 65 de la constitution, l’organisation des partis, syndicats et associations et leur financement relèvent du champ des lois organiques, qui sont supérieures aux lois ordinaires, en guise de garanties en matière d’organisation de ces questions liées aux droits et libertés.

Revers de la médaille : cette législation libérale a provoqué l’éclatement du paysage partisan après 2011, et une prolifération de partis politiques, qui sont, à ce stade, au nombre de 207, ce qui donne lieu à l’effritement de voix aux échéances électorales, et favorise l’instabilité politique dont le pays a beaucoup pâti ; un aspect dont il faut absolument tenir compte dans la nouvelle législation devant régir les partis politiques. 

Gnet