Tunisie/ Marzouki Vs Jomaâ : L’incompatibilité d’humeur !

Publié le Mardi 05 Août 2014 à 14:25
Mehdi Jomaâ et Moncef Marzouki ne semblent pas être en parfaite harmonie. Les frictions au sommet de l’Etat sont remontées à la surface ces derniers temps,  les exemples s’enchaînent pour les illustrer. A ce jour, il semble y avoir une décision à Carthage et une autre à la Kasbah, avec cette impression de double-emploi source d’incohérence, voire de cacophonie. Décryptage.

Les rapports entre la Kasbah et Carthage semblent se distendre. Chacun tire la ficelle de son côté. Les décisions, en cette conjoncture difficile et mouvante, sont plutôt prises au nom de Mehdi Jomaâ ou de Moncef Marzouki, plutôt qu’au nom de la Tunisie, un état de fait qui montre que les deux têtes de l’exécutif ont du mal à gérer leur incompatibilité d’humeur.

Pourtant, les relations entre les deux hommes avaient l’air jusqu’une date récente d’évoluer en symbiose. Elles ont manifestement commencé à se gâter, dès lors que le chef d'état-major de l’armée de terre, Mohamed Salah Hamdi, a présenté sa démission, dans la foulée du double-assaut terroriste de Chaâmbi, ayant fait 15 martyrs parmi nos valeureux soldats. Un départ regretté par Marzouki qui l’a lui-même nommé. La présidence a dit, par la voix de son porte-parole, en connaître les raisons, mais s’est gardé de les divulguer.

Une déclaration sibylline ayant ajouté au flou quant aux véritables raisons de la démission de Hamdi, au sujet de laquelle, aucun commentaire officiel n’a été formulé, excepté les spéculations médiatiques, l’ayant attribuée à une demande de la hiérarchie du Général, en l’occurrence le ministre de la Défense et le chef du gouvernement.  

Autre dossier chaud, et qui a fait monter la tension à la Kasbah avec ces réunions permanentes de la cellule de crise, celui de l’escalade militaire en Libye, et de ses répercussions directes et immédiates sur la Tunisie, avec l’afflux considérable des réfugiés au point de passage frontalier de Ras Jedir, et toutes les difficultés qui en ont découlé. Sur ce dossier, le gouvernement a évoqué d’emblée l’éventualité de la fermeture des frontières, faisant valoir l’intérêt national.

Marzouki n’a pas été de cet avis, et a préconisé lors de son entretien de jeudi 31 juillet avec le ministre des Affaires étrangères, Mongi Hamdi,  le renforcement des dispositions de contrôle au niveau des frontières, sans que le mot fermeture n’ait été prononcé. Mais, le lendemain, le vendredi 1er août, Mehdi Jomaâ n’a pas exclu la fermeture des frontières si nécessaire, "partant du principe de la priorité absolue accordée à la sûreté nationale globale du pays".

Finalement, l’approche en matière de gestion des flux des réfugiés était flexible en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain, avec l’ouverture pour principe et la fermeture provisoire en cas de débordements (comme c'était le cas vendredi dernier suite à la tentative d’envahissement du point de passage par les ressortissants égyptiens, et l'anarchie qui en a résulté).

Entre-temps, les faits montrent encore que les deux têtes de l’exécutif sont en délicatesse. Pas plus tard qu’hier, la présidence du gouvernement annonce dans un communiqué la décision de Mehdi Jomaâ de dépêcher une deuxième cargaison humanitaire à Gaza, et de lancer une campagne de collecte de dons à cet effet. Une opération adoptée auparavant par Marzouki, (exprimé dans son allocution du 23 juillet sur Gaza) et qui, plus est,  lance sur sa page officielle, un appel au don via le compte du croissant rouge tunisien.

Et puis tout dernier exemple, celui de la participation de Mongi Hamdi au Sommet Etats-Unis/ Afrique qui se tient actuellement à Washington. Un communiqué de la présidence a annoncé hier que le ministre des Affaires étrangères accompagne le président lors de son déplacement à Washington. La page de la présidence du gouvernement, précise ce mardi, que Mongi Hamdi est l’émissaire du chef du gouvernement à Washington (en intitulé de la vidéo de la conférence de presse du  MAE dans la capitale américaine).

Petits détails, profonds désaccords, a-t-on tendance à déduire. Des frictions qui risquent de s’exacerber avec l’approche des élections, étant donné l’engagement de chacun des deux présidents, et la manière dont il perçoit sa mission.

Mehdi Jomaâ qui dirige un gouvernement de compétences apolitiques ne cesse de marteler qu’il est au dessus de tout tiraillement politique, que sa mission consiste à combattre le terrorisme, à mener à bien l’étape restante du processus transitoire eu vue de réussir les prochaines échéances électorales, se défendant de toute ambition politique postélectorale.

Marzouki dont la candidature à la présidentielle de dimanche 23 novembre est quasi-certaine, a affirmé qu’il remplira sa fonction de président de la république jusqu’à la dernière minute, indépendamment de sa décision de briguer ou non un deuxième mandat présidentiel.

La rivalité, voire les désaccords entre les deux hommes, et la propension de chacun de se réapproprier le pouvoir décisionnel, voire de le monopoliser sont on ne peut naturelles, le tout est qu’elles ne jettent pas le trouble dans une situation déjà vulnérable. Une discordance au sommet de l’Etat risque d’être contreproductive et mal-perçue, à l’heure où l’unité nationale est un must, que les deux présidents ne cessent de prêcher à tout-va.  

H.J.


 

Commentaires 

 
#5 RE: Tunisie/ Marzouki Vs Jomaâ : L’incompatibilité d’humeur !
Ecrit par eshmoun     08-08-2014 11:50
c'est d'autant plus compliqué que l'un a été presque plébiscité par un éventail non négligeable de la classe politique répondant à un vrai ras-le-bol d'une frange importante pour ne pas dire - une quasi unanimité- de l'opinion publique effrayée autant qu’écœurée par les incohérences et les ambigüités de l'action des dirigeants d'alors et qui grevaient lourdement l'avenir de la nation ,tandis que que l'autre doit son poste à une "improbable" négociation de "derrière les fagots" si l'on peut dire et que sa légitimité est ,au fil des semaines et même...des années , sujette à caution sinon sérieusement écornée .
 
 
+1 #4 Rien de Naturel!
Ecrit par Houba     06-08-2014 08:53
PREVISIBLE :
Quel role pour Marzouki quand c’est Jomaa qui préside le conseil des ministres et en fixe l’ordre du jour sur proposition du Premier minister?
Marzouki, en tant que président de la République, peut-il donner des directives directement aux ministres, sans passer par Jomaa?

Marzouki, retourne à tes …bouquins et laisse le monde travailler.
 
 
+2 #3 @ Masahsah
Ecrit par Pseudo     06-08-2014 07:39
Oui appelons un chat un chat. Mais commencez par vous même ; je ne comprend rien à ce que vous voulez dire !
 
 
-2 #2 excusons leur ignorance
Ecrit par Royaliste     05-08-2014 22:25
l'Islam nous a appris que si nous sommes plus de 2 personnes, il faut désigner un et UN seul leader (Imam) pour diriger la prière.

ce principe centenaire a été ignoré par nos honorables élus et les apprentis révolutionnaires...c'est normal quand on donne le pouvoir a des incompétents et a des ex-prisonniers.
 
 
+1 #1 C'est naturel !!!
Ecrit par Msahsah     05-08-2014 17:52
Cette incompatibilité n'est autre que le reflet de celle nettement observable ente le peuple d'une part et une frange de la classe politique de l'autre. Arretons de parler de gouvernement de compétence et appelons un chat un chat !!!
 
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