Tunisie/ Martyrs de la révolution : Au-delà du choc, le droit à la vérité !

Publié le Lundi 14 Avril 2014 à 17:26
Qui a tué des manifestants pacifiques ? Depuis que le verdict dans l’affaire des martyrs et blessés de la révolution a été prononcé samedi dernier par le tribunal militaire, on assiste à une salve de critiques et de condamnations. Partis politiques, organisations de la société civile, et officiels s’émeuvent de ces jugements qui, disent-ils, constituent un choc pour l’opinion publique, n’honorent pas la mémoire des martyrs, heurtent la sensibilité des blessés, et ne rendent pas justice aux familles.  

Pendant trois ans, l’affaire des martyrs et blessés de la révolution a été sujette à de nombreux rebondissements, mais aussi à de successifs atermoiements et reports. Confiés tout d’abord aux juridictions civiles, les dossiers de ceux qui sont tombés sous les balles, ou en ont été atteints dans différentes régions de la Tunisie, ont atterri, cinq mois après la révolution, dans les juridictions militaires.

Ce transfert a été critiqué, l’été 2011, par des associations de la société civile ainsi que par des avocats et magistrats, pour qui les tribunaux militaires, étant des juridictions d’exception, ne pouvaient assurer des procès équitables, ni pour les victimes et leurs familles, ni pour les accusés. Un appel pressant a été alors exprimé de remettre ces affaires aux tribunaux civils, mais vainement.

Un long feuilleton avait alors débuté, ayant révélé la complexité et l’ambigüité de ces affaires, la difficulté d’établir les faits et de révéler la vérité. Plusieurs audiences ont été  tenues à Tunis, Sfax et au Kef, en présence des familles des martyrs et des blessés, et des blessés eux-mêmes, qui n’attendaient qu’une chose : connaître la vérité. Qui a tiré sur leurs enfants, les tuant de sang froid, ou les atteignant gravement pour certains, jusqu’à leur causer une infirmité irréparable ?

C’était là, la question lancinante qui les tourmentait, a laquelle ils attendaient une réponse claire et complète, à même de les apaiser, un tant peu, et de leur permettre à faire le deuil.

Le verdict prononcé samedi, ne permet pas hélas, après plus de trois ans d’une éprouvante attente, de répondre à leur besoin et leur droit de savoir. Même si les attendus du jugement ne sont pas encore révélés, celui-ci n’établit pas, a priori, de responsabilité pénale dans les meurtres commis. Condamnés à trois ans de prison ou à de non-lieux, les accusés sont promis à une relaxe, déjà intervenue, ou imminente. A se référer à ce jugement, le dossier des martyrs et blessés de la révolution sera clos (même si un pourvoi en cassation est envisageable), sans que l’on ne sache vraiment qui a fait couler le sang de manifestants pacifiques.

C’est là où réside l’affliction des familles, et du peuple tunisien dans son ensemble. C’est d’ignorer tout sur ces événements sanglants, et d’être tiraillés entre plusieurs versions et lectures, qui ne font que semer le doute et la confusion dans les esprits. On ne se lasse pas de s’interroger : Que s’est-il passé le 14 janvier et les jours qui l’ont précédé et lui ont succédé à Kasserine, Thala, Sidi-Bouzid, Douz, Regueb, Tunis … ? Qui a ouvert le feu sur des Tunisiens désarmés ? Qui a donné l’ordre de tirer ? Personne n’en sait rien, hormis les supputations et les conjectures.

Les familles, ainsi que le peuple ne cherchent pas à ce que tel ou tel soient condamnés à de lourdes peines, et qu’ils portent la responsabilité de ce qui s’est passé, ils veulent juste savoir la vérité, et connaître les vrais coupables. Que ceux-ci reconnaissent leur crime, qu’ils s’en excusent, et qu’ils soient jugés dans des procès équitables. Le pardon interviendrait le moment venu ; l’indulgence et la clémence étant des valeurs intrinsèques des Tunisiens.

On ne peut construire le présent et se projeter dans le futur, en falsifiant le passé. Réformer, démocratiser et bâtir une nation, doit se faire sur un soubassement solide, dont la vérité est le principal pilier. Y compris la vérité de ce passé récent, et de cette révolution de plus en plus intrigante, qui a occasionné des mutations fulgurantes, sans pour autant donner lieu à la renaissance souhaitée. Si on va se permettre d’altérer et de travestir les vérités d’un passé vieux de trois ans, que ferons-nous de notre passé de presque six décennies que l’on compte revisiter à travers le processus de justice transitionnelle ?

Le droit des victimes d’être réhabilités, l’obligation pour les coupables de répondre de leurs actes, la lutte contre l’amnésie, et le devoir de mémoire, sans ses étapes clefs, on ne parviendra pas à cicatriser les blessures du passé, et à réaliser la réconciliation et la concorde nationales préalables à à toute œuvre de reconstruction.
H.J.



 

Commentaires 

 
+3 #3 RE: Tunisie/ Martyrs de la révolution : Au-delà du choc, le droit à la vérité !
Ecrit par Linux     15-04-2014 20:54
Et qui a mit au monde un imbécile tel que toi Royaliste :D :lol:
 
 
-5 #2 2 poids, 2 mesures
Ecrit par Royaliste     15-04-2014 11:59
Qui a autorisé et protégé les camps d'entrainement terroriste a Chaambi?

qui a donné l'ordre des attentats de Sousse, de Monastir et de Babsouika?

Qui a facilité l'envoie de terroristes tunisiens en Syrie et qui a payé qui?

L'argent sale des élections, qui a financé 'l'exil' doré de ghannouchi a Londres....


Vous dites: C’est là où réside l’affliction des familles, et du peuple tunisien dans son ensemble

vous n'avez pas le droit de parler au nom du peuple!
 
 
+6 #1 H.J.
Ecrit par Dali     15-04-2014 11:30
Nous savons très bien qui a tiré: c'est la police et l'armée.
Ce que nous ne savons avec précision: les circonstances des tirs et par conséquent, si légalement, ceux qui étaient chargés de la sécurité avaient utilisé les armes conformément aux procédures et à la loi.
Et puis, ce dossier ne doit pas être traité globalement, chaque cas est à part.
Et puis, ce n'est pas uniquement une affaire de justice. C'est un dossier qui revêt aussi une dimension politique notamment côté indemnisations et accompagnement. Or, cet aspect a complètement cafouillé, au bout de trois ans, on n'a même pas été capable d'arrêter la liste définitive des victimes et bcp de soupçons pèsent sur les dossiers de certains blessés se déclarant victimes de la répression.
 
Ces commentaires n'engagent que leurs auteurs, la rédaction n'en est, en aucun cas, responsable du contenu.