Tunisie/ Lutte anti-corruption : La défaillance politique pointée du doigt |
Publié le Mercredi 21 Mai 2014 à 17:39 |
Plusieurs experts, tunisiens et européens ont assisté le 20 et 21 mai courant au séminaire sous le thème « La lutte contre la corruption et les méthodes spéciales d’enquête », organisé par la Commission Européenne, à Tunis. La question de la lutte contre la corruption, plusieurs fois débattue depuis 14 janvier, se heurte à des obstacles coriaces qui empêchent la réalisation d’avancées palpables à ce sujet. Hatem Ressaissi, cadre à la Cour des Comptes, et président de la commission de contrôle des deniers publics à l’Association Touesna, a indiqué que les politiciens ne faisaient pas preuve d’une volonté effective pour lutter contre la corruption : « S’ils n’affichent pas leur volonté, c’est qu’ils sont complices des corrompus, et par conséquent, en Tunisie nous ne devrions pas compter sur la volonté politique pour changer les choses. Il nous faut compter sur la volonté populaire, celle de la société civile, et académique », a-t-il dit. Selon lui, il aurait été souhaitable d’ajouter un chapitre dans la constitution appelé, « Les institutions de contrôle », et qui consistent à contrôler tous les pouvoirs (exécutif, judiciaire, et législatif) et y ajouter une instance de contrôle unique, réunissant toutes celles qui existent actuellement, dont la Cour des Comptes. Corruption et malversation sont fortement liées à l’évasion des capitaux, rendant ainsi, les preuves d’implications difficiles à établir. Un magistrat français en mission en Tunisie, dans le cadre de la lutte contre la corruption, a indiqué que 4 difficultés se dressaient devant les procès de corruption. « La première difficulté, c’est le manque de spécialisation des juges dans les matières objet d'investiguation». Selon lui, on n’investigue pas de la même façon en matière d’infraction du droit commun, qu’au sujet d’une infraction de corruption, infraction financière ou affaire de terrorisme. «Au sujet des commissions rogatoires, il faut que le juge ait le temps de les rédiger, au milieu de toutes les autres affaires de droit commun qu’il a à traiter. Et il faut bien les rédiger. C’est pareil pour le pays auquel s’adresse la commission rogatoire, quand les juges n’ont pas assez de temps pour les examiner », a-t-il expliqué, appelant à ce que les juges soient bien formés et spécialisés, pour ce type d’affaires. Le deuxième défi, est l’extrême complexité des dossiers de corruption qui ont une portée internationale : «Dans ces affaires, on fait appel à des montages financiers extrêmement complexes. Ce sont des sociétés écran, des prête-noms, des virements internationaux qui font le tour de la planète en quelques heures pour aller dans des paradis fiscaux », a expliqué le juge, ce matin. Il y a aussi le problème de non-réciprocité. C’est quand le pays recevant une commission rogatoire, ne fait rien pour l’appliquer. Le juge estime qu’il faut exécuter soi-même les commissions rogatoires reçues d’un pays tiers, pour voir les siennes exécutées quand besoin est. L’autre point, est la nécessité de prévoir des juges de liaison, qui soient en contact direct avec les juges chargés de l’affaire, pour faciliter la circulation de l’information. « Je prends l’exemple d’un juge tunisien qui avait envoyé une commission rogatoire dans un dossier extrêmement important et sensible, et il n’arrivait pas à avoir de réponse. Pourtant, la commission rogatoire internationale était terminée. C’était tout simplement parce qu’elle prenait la voie diplomatique qui était complexe », a-t-il expliqué. Le juge Sadek Amari de la direction des affaires pénale au ministère de la Justice, chargé du dossier de la malversation, a déclaré que la corruption et la malversation représentaient un crime complexe, « puisque les moyens de prouver les faits sont compliqués. Le premier souci de celui qui vole est de cacher par tous les moyens son butin, l’envoyer à l’étranger et le blanchir », a-t-il dit Les marchés publics ont fait l’objet de beaucoup de malversation et de détournements lors de l’ancien régime. « Tout le monde en est certain, la société civile sait que cela s’est bien passé, mais le prouver reste difficile. On doit recourir à la commission rogatoire pour prouver l’existence de cette argent sous d’autres cieux », a-t-il expliqué. D’après le juge, 81 commissions rogatoires ont été envoyées à près de 42 pays dans le monde. Sans que le résultat ne soit satisfaisant. Plusieurs problèmes ont été rencontrés, notamment celui de manque de coopération nécessaire de la part des pays tiers. Après un long périple, certains de ces pays ont répondu aux commissions rogatoires, et d’autres n’y ont jamais répondu. Maurizio Varanese, chef inspecteur de la police et membre de la commission anti-racket au ministère de l’Intérieur Italien, a ajouté que la police devrait être habilitée dans les affaires de corruption, d’intercepter toutes sortes de communication, au moyen d’écoutes téléphoniques ou de contrôler les échanges sur internet. Charles Duchaine, Magistrat à la Juridiction interrégionale spécialisée de Marseille, estime quant à lui, que la question de la corruption est avant tout une question de volonté, « C’est bien d’en parler, c’est bien de faire des colloques, mais c’est mieux d’agir », a-t-il dit. Par ailleurs, l’information est un volet important, selon lui : « Si vous attendez que l’on vous l’apporte, vous ne l’aurez jamais. Moins les systèmes sont efficaces en matière de lutte contre la corruption, moins les informations sont communiquées. C'est-à-dire qu’un citoyen qui détient une information dans un système qui marche bien, va volontiers l’apporter aux autorités, parce qu’il sait qu’il le fait sans risques. Mais un citoyen qui détient la même information dans un système qui n’est pas efficace, ne la portera pas à la connaissance des autorités, parce qu’il sait qu’il s’expose », a-t-il expliqué, faisant endosser la responsabilité du manque de coopération au manque d’information et de communication entre les différentes instances et pays. Chiraz Kefi
|
Commentaires
Ecrit par JUSTICE 25-06-2014 21:36
Ecrit par Montygolikely 28-05-2014 21:00
Moralité, pour(commencer à)se débarrasser de la corruption, conduisons en respectant le code et les autres conducteurs et ça sera une "bonne conduite" générale qui nous mènera à l'éradication de cette gangrène...
Ecrit par Royaliste 22-05-2014 14:17