Tunisie/ Loi de finance 2015 : Des ajustements s’imposent

Publié le Vendredi 09 Janvier 2015 à 16:50
La loi de finance 2015 a fait l’objet d’un débat ce jeudi à l’Institut arabe des chefs d’Entreprises, où certains ont appelé à lui apporter quelques ajustements.

Faycal Derbel, expert comptable, a évoqué la question de l’élargissement du champ d’application de l’impôt sur les sociétés aux associations. Une disposition laconique, selon lui.  « Les associations régies par le décret loi 2011-88, doivent exercer leurs activités conformément aux textes les régissant. Tout exercice non conforme à la législation entraine une requalification de celle-ci et l’association sera soumise à l’IS au taux de 25%. Qu’est ce qu’on entend par une association exerçant une activité non conforme aux textes ? C’est le flou le plus total », a-t-il commenté.
 
Par ailleurs, quand l’administration fiscale demande des renseignements au contribuable dans le cadre d’une vérification préliminaire, elle lui accorde, conformément à la loi deux délais. Le premier est de 10 jours, et le deuxième est de 15 jours si ces renseignements sont adressés à une société ayant des filiales à l’étranger. Le premier délai a été porté à 20 jours par la nouvelle loi fiscale, et l’administration fiscale a l’obligation de notifier au contribuable le résultat de l’opération de vérification préliminaire dans un délai ne dépassant pas les 90 jours.

«Pour la vérification approfondie, la demande d’éclaircissement est passé de 10 à 15 jours, et le délai de notification des résultats de l’opération de vérification était d'un mois, et est devenu de 45 jours. Ce qui est bien c’est que l’administration est tenue par un délai de réponse par écrit à l’opposition du contribuable, avec un délai de six mois », a expliqué Derbel, ajoutant que même si l’Etat a reçu des notifications au cours des années passées, il est tenue d’y répondre dans un délai de six mois à compter du 1er janvier 2015.

Les dispositions de  2014 qui ont été reconduites, sont l’imposition des dividendes et la prolongation de la régularisation dans le cadre de l’amnistie fiscale. La loi de finance complémentaire a institué une amnistie fiscale à travers les articles, 5, 6, 7, 9, et 13.

Il s’agit de la possibilité de déposer une déclaration complémentaire en majorant l’assiette de la déclaration initiale de 20%, et on est dispensé du paiement d’une pénalité de retard, et dispensé du contrôle préliminaire ou approfondi concernant ces déclarations. « En clair, les personnes n’ayant pas régularisé leur situation, peuvent profiter de ces dispositions à condition de tout valider avant le 31 décembre 2014 », a expliqué Derbel, ajoutant qu’une note du ministère des Finances a prolongé cette disposition jusqu’au 28 février 2015.

Une autre mesure, celle de l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2015, de la levée du secret bancaire, mais aussi la suppression de la majoration de la TVA de 25%. « On sait que dans le code de la TVA, les ventes faites par les producteurs et les grossistes à des non assujettis sont soumises à une majoration de 25%. Celle-ci a été supprimée, et pour les règlements en espèce au-delà de 2000 dinars, le nom du bénéficiaire, doit être transporté sur la déclaration de l’employeur », selon l’expert-comptable.

Une autre mesure qui prend effet à partir du début de l’année, celle de la rationalisation du régime forfaitaire. Il y aura exclusion de ce régime de certaines activités, fixées par le décret 2014-2239 du 1er août 2014. Sont concernés par cette mesure, certains commerces tels que les pâtisseries, les salons de thé, les salons de coiffure…

Walid Belhaj Amor, Président du Centre Tunisien de veille et d’intelligence Economique (CTVIE), a abordé quant à lui la question de l’impact de la nouvelle loi de finances sur la compétitivité des entreprises. Il a indiqué qu’une amélioration de l’investissement public et privé n’était possible que par l’amélioration de la compétitivité. «Nous n’avons pas les moyens de nos ambitions en ce qui concerne les investissements publics. Mais il vaut mieux de mettre la barre haute et essayer de l’atteindre », a-t-il dit. Selon lui, la question qui doit être posée, est pourquoi la Tunisie est incapable de réaliser plus de 50% du niveau d’investissement qui serait nécessaire. « Les gisements de croissance en Tunisie ne seront élevés que si l’environnement de l’entreprise est modifié», a-t-il rappelé.

L’emploi, la justice sociale, la solidarité, la santé, la sécurité sociale et son déficit, sont des priorités, d’après lui. «Mais ce qui nous intéresse ici c’est la compétitivité.  La compétitivité des prix ne cesse d’être menacée. En termes d’emplois et charges sociales, les choses se sont dégradées. En termes de coûts, aussi. Il y a eu une augmentation des prix des matières premières et des charges, sans qu’il n’y ait d’amélioration de la productivité pour compenser », a-t-il dit.
 
Il a ajouté que la hausse des coûts était une entrave à la compétitivité de l’entreprise tunisienne, notamment avec la dépréciation du dinar. « La loi de finance 2015, n’apporte pas finalement grand-chose en termes de compétitivité pour l’entreprise, et on ne pourra pas redresser cette économie si on n’intervient pas de manière forte. Il est nécessaire de traduire cela dans une loi de finances complémentaire », a-t-il conclu.
Chiraz Kefi