Tunisie/ Jeudis de décembre : Des fêtes, et des enseignements !

Publié le Vendredi 18 Décembre 2015 à 17:28
Il est temps de s'engager pour se relever. Hasard du calendrier, le mois de décembre comporte trois fêtes qui s’enchaînent pendant trois jeudis consécutifs. Hier, la Tunisie a célébré le 17 décembre, date commémorant le déclenchement de la révolution tunisienne il y a cinq ans de cela. La semaine prochaine, Jeudi 24 décembre, ce sera le Mouled, commémoration de la naissance du prophète Mohamed, (paix et grâce sur lui). Jeudi 31 décembre, ce sera le réveillon, avec cette soirée charnière entre 2015 et 2016. Une commémoration récente, et deux événements que l’on célèbre depuis la nuit des temps, dont les enseignements sont à l’analyse indissociables.

Le jeudi 17 décembre 2010 : un passé proche, mais qui nous parait si lointain, tellement on s’en est éloigné de l’esprit, du sens et de la ferveur. Il y a cinq ans, le mur de la peur a été brisée et les Tunisiens, menés par une jeunesse défiante et assoiffée de liberté et de dignité d’abord dans les régions intérieures et puis dans les villes, se sont éveillés et ont décidé de prendre leur destin en main. Leur soulèvement ayant gagné petit à petit tout le pays a eu raison d’un régime autocratique, suscitant une admiration planétaire, et donnant le coup d’envoi à des soulèvements en cascade dans la région, dont l’aboutissement trahit jusque-là l’espérance de l’origine.

Ce qui a été perçu à l’époque, comme une étape augurant de changements salvateurs en Tunisie et dans la région, leur permettant de se réconcilier avec des valeurs auxquelles elles étaient réfractaires, à leur corps défendant, se révèle aujourd’hui comme un basculement redoutable émaillé de défis redoutables : terrorisme, conflits armés, guerre civile, effondrement économique, etc. La Tunisie considérée comme le seul modèle réussi dans la région, malgré l’immensité des difficultés et des dangers, et les secousses en succession qu’elle a connues, est loin d’être tranquillisée sur son présent et son avenir. Notre pays vit au rythme des menaces terroristes, qui de l’aveu des autorités sont toujours présentes et requièrent la vigilance des appareils sécuritaire et militaire et des citoyens. Elle est aussi aux prises avec une morosité économique qui s’inscrit dans la durée, et un relâchement ambiant source de démotivation et de spleen généralisés. Qu’avons-nous fait de notre révolution, de nos espoirs, et de nos rêves ?  On les a hélas malmenés, au point de les annihiler ; nous avions pourtant toutes les perspectives devant nous, pour en faire quelque chose d’inédit, et améliorer notre vécu, tout en continuant à épater le monde.

Et comme pour nous auto-flageller, on en vient à se demander si c’était une bonne idée de faire une révolution, voire à la regretter carrément et à être nostalgique à l’ancienne époque, frappés que l’on est d’amnésie. Or, le plus difficile aurait été que chacun d’entre nous s’interroge : Ai-je contribué à faire fructifier les acquis de la révolution, et à donner corps à ses objectifs, ou au contraire à les saper ? Ai-je fait un bon usage de la liberté, en la considérant comme une responsabilité, ou à l’inverse, en la percevant comme un incivisme et une violation des règles du vivre-ensemble ? Si chacun d’entre nous se pose sincèrement ces questions, l’on se rendra compte que la faute n’est pas uniquement celle des politiques, taxés d’incompétence, d’égo surdimensionné et de soif du pouvoir -même si cela n’est pas tout à fait faux- mais qu’il s’agit d’une défaillance collective. Tant qu’on ne s’adonne pas à cet exercice d’autoévaluation et d’autocritique, on ne saurait sortir de l’auberge.

Le jeudi 24 décembre 2015 : Les Tunisiens fêteront le Mouled, avec l’emblématique, succulente et hypercalorique Assida. Les fées du logis donneront libre cours à leurs dons gastronomiques les plus raffinés, et l’événement, des plus charmants de nos traditions, sera célébré dans la chaleur familiale et la bonne humeur. Au-delà des plaisirs du palais, il y a un messager et un message que l’on célèbre, et dont on doit se rappeler des enseignements. Le prophète Mohamed, paix et grâce sur lui, disait qu’il était venu pour parachever les bons comportements. إنما بعثت لأتمم مكارم الأخلاق". La morale occupe une place cardinale dans la Sira (biographie) du prophète, qui se distinguait par une rectitude irréprochable, une humilité sans égal, et une mansuétude et une générosité hors pair tant envers ses coreligionnaires, qu’avec les adeptes des autres religions. L’Islam est avant tout un code moral, nous autres Tunisiens, à l’instar de l’ensemble des musulmans, gagneront, notamment en cette étape critique de notre histoire, à l’assimiler, à s’en convaincre et à s’y conformer, seule manière de s’affranchir de cette crise morale qui mine notre société, d'amorcer notre essor, et de revenir sur les traces de la renaissance arabe. 

Le jeudi 31 décembre : Une année en chasse une autre. Un moment qui revient pour nous rappeler les années qui défilent et la vie qui passe. Le caractère éphémère de la vie qui a tendance à nous échapper, est une raison majeure de nous inciter à garder les pieds sur terre, et à ne pas trop nous prendre au sérieux, tout en demeurant toujours sérieux. Car, si l’on est certain d’une chose, c’est qu’un jour, dont on ne sait pas la date, on va quitter ce bas monde et devenir juste un souvenir.

H.J.