Tunisie/ Immunisation de la révolution : Une loi qui divise !

Publié le Vendredi 31 Mai 2013 à 18:04
Le bloc d'Ennahdha s'accroche à la loi sur l'immunisation de la révolution. Le projet de loi sur l’immunisation de la révolution agite de nouveau la scène politique. Dévoilé à la presse le 23 novembre 2012 par les groupes d’Ennahdha, CPR, Wafa et d’autres blocs parlementaires, ce texte vise à écarter de la vie politique pendant dix ans, ceux qui ont occupé de hauts postes sous l’ancien régime au sein de l’administration, de l’Etat et du parti, du 2 avril 1989 au 14 janvier 2011. Auréolé par les uns qui y voient le meilleur moyen d’immuniser la révolution contre le retour des Azlams (résidus de l’ancien régime), il est décrié par les autres, qui dénoncent une volonté de la majorité au pouvoir d’exclure ses adversaires politiques, pour avoir le champ libre aux prochaines élections.

Ce débat n’a fait que trop durer, et les avis à son sujet sont divergents même dans le camp de ceux qui l’ont proposé. Plusieurs caciques du mouvement Ennahdha ont du moins émis des réserves dessus, sinon s’y sont clairement opposés. Samir Dilou, ministre des droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle, estime que le projet de loi organique sur la justice transitionnelle  doit être examiné en priorité. Idem pour Rached Ghannouchi qui a déclaré en février dernier dans une interview au journal "La Presse" que la loi sur la justice transitionnelle doit passer en priorité à l’ANC. Hamadi Jebali, ancien chef du gouvernement et Secrétaire Général d’Ennahdha, a carrément rejeté ce projet de loi, estimant le 16 mai dans une interview à asharq al-awsat, qu’il "nuit fondamentalement à Ennahdha, et sera interprété comme étant une loi politique pour exclure une partie politique avant les élections".

Ces opinions ne semblent toutefois engager que ceux qui les prononcent, la position dominante notamment dans les groupes parlementaires d’Ennahdha et du CPR à l’ANC, est pour que cette loi passe en prime. Des députés sont allés jusqu’à menacer de lancer une motion de censure contre Mustapha Ben Jaâfar, et d’entamer une grève de la faim, si ladite loi ne passe pas illico presto. Sahbi Atig, président du groupe parlementaire d’Ennahdha, a démenti ces derniers jours tout arrangement avec Nida Tounes pour renoncer à ce projet de loi, estimant dénués de toute vérité les propos tenus par Mohsen Marzouk sur un supposé engagement des dirigeants d’Ennahdha d’abandonner ce texte. 

Des  palabres qui n’en finissent pas, à l’heure où l’ANC est attendue sur sa mission fondamentale soit l’examen et l’adoption du projet de constitution. Celui-ci est appelé à être examiné prochainement en plénière lors d’un débat général, puis article par article ; un processus qui va prendre beaucoup de temps.

L’Assemblée doit aussi plancher sur le projet de loi sur la justice transitionnelle qui dort depuis de longues semaines dans ses tiroirs. C’est la véritable loi à même d’immuniser la révolution, en  rendant justice aux opprimés, en questionnant et en jugeant les coupables de répression et de violation des droits de l’Homme, et en réformant les institutions afin qu’en fin de compte on arrive à exorciser les démons du passé, à cicatriser les blessures et à parvenir à la réconciliation nationale.

Les Tunisiens abhorrent l’ancien régime et ses pratiques, n’ont pas envie de les voir ressusciter, et appellent de leurs vœux que le dispositif du despotisme soit démantelé à jamais. Ils attendent que les objectifs de la révolution en termes de lutte contre la pauvreté, d’emploi et de justice sociale soient réalisés, et que des actions concrètes dans ce sens soient placées en tête des priorités. Or, ce débat interminable autour du projet de loi controversé sur l’immunisation de la révolution qui n’est qu’un doublant de la principale loi de justice transitionnelle, objet de consensus national, nous fait perdre beaucoup de temps, au détriment des multiples urgences en souffrance.

Reste un mot pour ceux qui ont été dans le sérail sous l’ancien régime, et ont occupé des postes clefs au sien de l’Etat et du parti. Il vaudrait mieux qu’ils tirent leur révérence, reconnaissent leurs responsabilités dans les répressions, les violations des droits de l’homme et le pillage des ressources du pays. Même s’ils n’ont pas participé directement à ces dérives et n’ont rien mis dans la poche, ils auraient contribué par leur silence complice à faire perpétuer un régime despotique, et à prolonger la souffrance de nombreux Tunisiens. Celui qui reconnait ses erreurs, et demande pardon, en sortira plus digne.
H.J.


 

Commentaires 

 
+15 #4 ceux de l'ancien régime
Ecrit par rabougri     01-06-2013 18:21
je suis un citoyen comme les autres de la classe moyenne tunisienne. J'ai fait mes études comme beaucoup de tunisiens et j'ai travaillé et honnêtement gagné ma vie comme beaucoup de tunisiens.
Jamais je n'ai été harcelé, embêté, volé, réprimé, opprimé ou terrorisé par qui que ce soit du temps de l'ancien régime. Je n'ai subi aucun désagrément majeur à l'époque ni de mes concitoyens ordinaires ni de ceux qui étaient bien placés pour profiter de leur pouvoir.
Par contre, depuis 2011, je me suis fait cambrioler plusieurs fois, plusieurs membres de ma famille ont été agressés, j'ai été menacé par des voyous sur la route du pont de rades...ma vie en est changée.
Mes regrets, mais je préfère ma vie comme elle l'était auparavant.
 
 
+7 #3 Ivre de haine et soif de vengence
Ecrit par Skander Ben Baccar     01-06-2013 10:16
Le prophète Moise a peché en commetant un crime "un homicide" en défendant un pauvre juif. Dieu lui a pardonné et la consacré et l'a élevé au rang de messager et de prophète de son peuple élu! Ceci n'est il pas une magnifique preuve de pardon et de reconnaissance???

Le pardon et la réconciliation peuvent opérer des miracles. Le pardon et la réconciliation sont la sublime qualité des hommes nobles et purs. Ils traduisent une sagesse et une foi pure et une paix profonde.Dieu n'a-il pas dit dans son livre "men rafa wa aslaha fa ajrouhou alalah": "celui qui pardonne et reconcilie sa récompense est offerte par Dieu"

Mais les descendants de Beni-hillal qui nous gouvernent aujourd'hui (Ghannouchi & CO) n'ont rien de tout cela. Ils sont ivres de haine et de vengence. Leur soif de pouvoir et prestige est telle que tous les moyens sont legaux pour protéger leur butain et leurs priviléges acquis par le mensonge et l'usurpation du pouvoir
 
 
+9 #2 RE: Tunisie/ Immunisation de la révolution : Une loi qui divise !
Ecrit par Montygolikely     31-05-2013 22:10
Vous ne croyez pas que ça suffit un peu ?
la rancune ne mène jamais loin, essayons un peu de tourner la page et redonnons du blason à notre pays qui en a bien besoin...
 
 
+6 #1 journalisme hypocrite
Ecrit par Royaliste     31-05-2013 19:07
LOOOL

le (a) journaliste reproche sans rougir aux anciens politiciens d'avoir contribué par un silence complice a la dictature !!

qu'a ete la ligne editoriale de Gnet sous BenAli?

combien d'articles publiés sur Gnet décriait la dictature ?

je réponds : zéro alors de grace arretez de jouer aux vierges, nous sommes, la Tunisie toute entiere le produit et le résultat de la dictature, nous sommes corrompus jusqu'a l'os, nous sommes clietelistes, racistes, regionalistes, nous sommes fénéants et anarchistes, la dictature n'est pas un hasard c'est le résultat de la somme de nos egoismes.

pour terminer, vous evoquez trop souvent le sujet des 'azlems', mais vous n'avez JAMAIS demande de réouvrir les dossiers des attentats de Sousse, de Monastir de Babsouika... ou des citoyens sont mort.
 
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