Tunisie/ Etats-Unis : Les arguments de Chahed face au pragmatisme américain !

Publié le Mardi 11 Juillet 2017 à 13:49
Entretien Youssef Chahed et Mike Pence à la Maison blanche. Dans ses visites à l’étranger en tant que chef du gouvernement, Youssef Chahed ne se montre pas généralement docile. A Berlin, où il s’est entretenu avec Angela Merkel en février dernier, il a tenu tête à la chancelière allemande sur la mise en place de camps pour les migrants sur le sol tunisien. Au Maroc, où il s’est rendu tout récemment, il s’est gardé d’engager la Tunisie sur le bourbier du Sahara occidental et de contrarier le voisin algérien, en refusant de cosigner un communiqué final qui reprend la position marocaine à ce sujet ; un refus ayant provoqué l’annulation à la dernière minute de sa rencontre avec le roi Mohamed VI. 

Quid des Etats-Unis ? Chahed a-t-il réussi à rallier la partie américaine à la cause tunisienne, et à la dissuader de revoir à la baisse ses aides militaires et économiques à notre pays. Rien n’est moins sûr, d’autant plus que l’argument invoqué, selon lequel une telle baisse risque d’envoyer un message négatif aux organisations terroristes, ne semble pas assez persuasif pour faire changer les Américains d’avis. 

Le mode de raisonnement US est connu, et est lié au jeu des intérêts, c’est ce sur quoi ils fondent leur politique étrangère. Les Américains ne s’engagent pas sur un terrain, s’ils n’ont rien à y gagner, ils sont prêts à tout, à la guerre comme à la paix, pour défendre et préserver la grandeur de l’Amérique. Une manière de faire qui s’est renforcée avec l’actuelle administration républicaine, conduite par Donald Trump.

Quel regard portent-ils sur la Tunisie ? Ce n’est ni un grand enjeu, ni un pays à abandonner, et ce pour deux raisons :

La première est sa démocratie naissante qui lui procure un statut d’exception dans la région auquel les Etats-Unis, qu’ils soient gouvernés par les républicains ou les démocrates, au même titre que tout l’Occident d’ailleurs, lui promettent soutien et assistance pour que son projet de transition soit mené à bien, étant donné qu’elle leur sert de faire-valoir. On le voit avec les positions exprimées par les responsables américains, lors de leurs derniers entretiens avec Youssef Chahed, promettant un renforcement de la coopération militaire et sécuritaire et la poursuite du soutien à la transition en Tunisie ; le même ton et les mêmes termes que ceux utilisés par leurs prédécesseurs de l’administration de Barack Obama.

Le deuxième raison est sa proximité avec la Libye, ou rien ne se fait et ne se fera sans les Etats-Unis.

Les Américains procèdent par pragmatisme, et cherchent à avoir des interlocuteurs pragmatiques.  Les prendre par les sentiments, en comptant sur leur côté bons samaritains pourrait se révéler être une démarche perdue d’avance.

Pour sortir de l’ornière, la Tunisie a besoin, incontestablement, du soutien étranger, étant à court de fonds propres lui permettant de financer des solutions à toutes les difficultés qu’elle à surmonter. Cela requiert une stratégie de négociation mettant en avant les atouts du pays, et donnant envie à ses partenaires de lui venir en aide. Et là, on a encore du pain sur la planche.
Gnet