Tunisie/ Economie : La gestion dans l’urgence du gouvernement Jomaâ

Publié le Vendredi 04 Avril 2014 à 18:00
Le ministre chargé des Affaires économiques, Nidhal Ouerfelli, a démenti hier, au JT d’al-Wataniya, les informations faisant état de l’incapacité de l’Etat à payer les salaires des fonctionnaires ce mois d’avril, ou encore qu’il sera incapable de le faire à partir du mois de juillet. La Tunisie à des échéances de remboursement de la dette, au mois d’avril et de juillet, mais cela n’aura pas de répercussions directes sur le versement des salaires, a-t-il souligné, attirant l’attention sur les difficultés de la finance publique. Une situation qui requiert la conjugaison de tous les efforts pour mobiliser les ressources nécessaires, a-t-il dit en substance.


Poignée de main Mehdi Jomaâ et Christine Lagarde.    Mehdi Jomaâ avec le président du groupe de la Banque mondiale.

Momentanément rassurant, s’agissant des revirements des salaires effectués par l’administration, le plus grand employeur du pays, cette déclaration suscite en creux la question suivante : Pour combien de temps encore ? A fortiori que le ministre rappelle sans détours, à qui semble l’oublier,  la persistance de la crise économique et financière en Tunisie. On sait d’ores et déjà, que le budget de 2014 souffre d’un trou de 4,5 milliards de dinars, que les autorités comptent combler à travers des sollicitations de fonds et de soutien financier "des pays frères et amis" et autres bailleurs de fonds -d’ où la récente tournée de Mehdi Jomaâ dans le Golfe et son actuelle visite aux Etats-Unis- ainsi que par le lancement prévu vers la fin de ce mois d’avril d’un emprunt national. D’autres pistes sont étudiées par le gouvernement dont la révision du dispositif de compensation, qui a augmenté de 270 % en trois ans. Cette réforme se fera sans affecter les couches démunies, ne cesse-t-on de marteler. Le gouvernement annonce également une levée totale de la subvention sur le prix du ciment, et une levée progressive de la subvention sur les hydrocarbures, notamment pour les gros consommateurs.

Des mesures que l’équipe de Mehdi Jomaâ lance dans l’urgence, pour alléger, autant que faire se peut, les lourdes charges qui pèsent sur le budget de l’Etat. Ces réformes sont d’autant plus incontournables, que la Tunisie y est contrainte par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, qui en font des conditions sine qua non à la poursuite de leur concours financier.

La Tunisie qui a échoué à repenser sa politique économique, et à mener des réformes structurelles pourtant indispensables dès la première période de la révolution, à cause notamment d’une situation sociale explosive à laquelle étaient confrontés les différents gouvernements qui s’y sont succédé, est en train de subir une politique de relance basée grandement sur l’endettement.

Aux commandes depuis un peu plus de deux mois, le gouvernement actuel a une marge de manœuvre réduite pour pouvoir redresser les comptes et circonscrire les déséquilibres financiers. Il continue sur la lignée des précédents gouvernements,  et se jette dans le giron des bailleurs de fonds, notamment le FMI et la Banque mondiale. Ces institutions financières maintiennent jusque-là leurs engagements envers la Tunisie. La DG du FMI, Christine Lagarde, a déclaré hier à  l’issue de son entretien avec Mehdi Jomaâ que le Fonds monétaire international continuera à accompagner la Tunisie dans ses réformes. Mais pour le FMI, la frontière entre accompagner et imposer est tellement ténue que l’on peut passer rapidement des simples concours financiers et assistance technique, au redoutable plan d’ajustement structurel.

Autant notre économie ne peut se passer à ce jour de la manne financière extérieure, autant elle se doit de l’exploiter à bon escient, notamment dans l’investissement et la création des richesses, pour qu’elle puisse rapidement s’en affranchir, et mener les politiques économiques et les réformes à même de consolider son assise économique d’une manière durable, et garantir la justice sociale, principale revendication populaire de la révolution, encore non satisfaire.

L’expérience de Lula au Brésil fait valeur d’exemple. Lorsqu’il a été élu à la tête du Brésil en 2002, le pays était au bord de la faillite économique, Lula était obligé de recourir au FMI.  Mais grâce à une politique de rigueur doublée d’une politique sociale, ce dirigeant emblématique est parvenu, en un laps de temps court, à obtenir des résultats économiques encore plus performants que ceux exigés par le Fmi et de rembourser les fonds qu’il a contractés avant terme.

Tout cela pour dire que les politiques économiques menées par les précédents gouvernements d’après la révolution, tout autant que celle mise en œuvre par ce gouvernement de technocrates, pendant le court mandat dont il est investi, ont vocation à impacter le pays pour de longues années. Les éventuelles erreurs commises se grefferont sur une situation déjà fragile et minée de déficiences. D’où la nécessité d’appréhender le présent en se préoccupant de l’avenir, et en mettant le pays sur les rails du véritable redressement à travers l’impulsion de l’investissement, l’encouragement de l’initiative privée, la revalorisation du travail, la promotion des microcrédits notamment dans les régions intérieures afin de mettre le pied à l'étrier des jeunes à court de ressources…bref, notre économie a besoin d’idées innovantes et d’un effort national, à traves lesquels nous autres Tunisiens, devons prendre nos problèmes à bras le corps, afin que l’on puisse développer nos moyens propres, et nous libérer du joug des bailleurs de fonds, qui, à partir d’un certain seuil, risque de nous étouffer pendant très longtemps.

H.J.


 

Commentaires 

 
#2 Plus que jamais!
Ecrit par zarzour     08-04-2014 16:01
Il est grand temps de se rendre à l'évidence:les lacunes s'entassent et se multiplient chaque jours et que les revendications de tout bord foisonnent.Les tunisiens doivent absolument changer leur façon de penser et repenser leur avenir en comptant sur eux-mêmes,pour ne pas hypotéquer le pays et l'avenir des générations futures.Le Gouvernement actuel doit absolument se frayer un chemin ,imposer une conduite et un cap pour sortir le pays,faire revenir la confiance pour l'entreprenariat aussi bien des nationaux que des investisseurs étrangers.Le Tourisme doit renaître,la sécurité doit être encore plus renforcée,arrêter l'importation des produits chinois qui tuent notre artisanat,notre tissu social,proliférer le chomage.Il faut absolument que le tunisien comprenne qu'en consommant tunisien est un acte patriotique.
 
 
+2 #1 RE: Tunisie/ Economie : La gestion dans l’urgence du gouvernement Jomaâ
Ecrit par Montygolikely     07-04-2014 08:37
Se jeter dans "le giron des bailleurs de fonds ", comme vous le dites si bien, autant dire se jeter dans la gueule du loup...
il est grand temps que les tunisiens assument leur destin pour que les dirigeants n'aient d'autre solution d'aller "quémander" à droite et à gauche...
 
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