Tunisie : Youssef Chahed s’en prend à ses prédécesseurs, pour leur "échec économique"

Publié le Lundi 27 Février 2017 à 10:39
Youssef Chahed le dimanche 26 février. Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, s’en est pris dimanche soir aux gouvernements qui ont précédé le sien, au cours de ces six dernières années, pour n’avoir rien fait sur le plan économique. Il a fait état d’un "échec total" sur le plan économique, déplorant qu’aucune réforme  structurelle n’ait été entreprise.

Dans une interview dimanche soir, 26 février, à la chaîne al-Hiwar Ettounsi, le locataire de la Kasbah a souligné que son gouvernement avait rempli ses engagements et a pu sur les six derniers mois faire bouger les lignes, en donnant corps à un certain nombre de programmes dont le contrat de dignité destiné aux chômeurs longue durée, la promotion de l’initiative privée à travers les microcrédits, le premier logement, etc.

Il a fait état d’une amélioration de la situation générale notamment sur le plan sécuritaire, mais la vigilance reste de mise car les menaces persistent. Cette évolution positive se traduit, selon ses dires, par de meilleurs résultats dans le secteur du phosphate, et du tourisme qui commence à remonter la pente, se réjouissant que certains pays étrangers  aient levé l’interdiction de voyage vers la destination Tunisie. La situation économique demeure néanmoins encore difficile, a-t-il prévenu, notamment celle des finances publiques, et l’Etat contracte encore des crédits pour payer les salaires.

"Les retraites sont en danger",
Youssef Chahed a énuméré les quatre principales réformes de son gouvernement qui vont commencer en 2017 à savoir, celle du financement de l’économie, celle de la fonction publique, la réforme des entreprises publiques, et la réforme des caisses sociales.

Il a mis en garde contre la gravité de la situation des caisses sociales, "les retraites sont en danger", a-t-il lancé. Il a imputé le déficit de la sécurité sociale au prolongement de l’espérance de vie, évoquant les trois éventuelles solutions pour sauver les CS dont le prolongement de l’âge de la retraite à 62 ou 65 ans, un âge qui sera déterminé de commun accord avec les partenaires sociaux, l’augmentation des cotisations ou l’institution d’une TVA sociale.

Youssef Chahed a donné sa perception du rôle qui doit être celui de l’Etat, un Etat régulateur, qui garde la tutelle sur les secteurs stratégiques, tout en se désengageant des secteurs compétitifs.

Il a préconisé la privatisation des trois banques publiques (STB, BH, BNA), la Tunisie a-t-elle besoin de trois banques publiques ? S’est-il interrogé, en soulignant les difficultés que traversent ces trois établissements bancaires. Les banques publiques censées être le bras financier de l’Etat ne sont pas en train de jouer leur rôle et ne contribuent pas au développement, étant donné qu’elles souffrent de grandes difficultés.

Il a pris l’exemple de Société tunisienne des banques (STB), dans le capital de laquelle l’Etat a injecté l’année dernière 700 millions de dinars, et si sa situation demeure inchangée, l’Etat sera amené à lui injecter encore 500 millions de dinars, estimant que cette situation n’est plus tenable.

Réaffirmant le tournant libéral de son gouvernement tout au long de son propos, il a plaidé pour la promotion de l’initiative privée, indiquant que l’administration n’est plus en mesure de résorber tous les demandeurs d’emploi.

"Moi, je pense à 2039"

Il s’en est pris à l’opposition qui se prépare à 2019, alors que c’est maintenant que le pays a besoin de ses propositions. Faisant allusion notamment à Mehdi Jomaâ, Mohsen Marzouk, Néji Chebbi et autres qui sont critiques envers son gouvernement, il s’est interrogé sur leurs propositions concrètes en matière de réduction de masse salariale (Ndlr : injonction du FMI), ou d’autres problèmes dans lesquels se débat le pays. 

Sur la question de Hamza Balloumi s’il pense lui-même à 2019, il a répondu sur un ton ironique : "moi, je pense à 2039".

Sur les critiques qui lui ont été adressées de ne pas avoir consulté les partis politiques et les partenaires sociaux, notamment l’UGTT, lors du remaniement ministériel partiel qu’il a annoncé samedi dernier, Chahed a rétorqué que le remaniement relevait de ses prérogatives, signalant avoir démis de ses fonctions Abid Briki pour ne pas avoir respecter la discipline gouvernementale, et récusant toute intention de déposer le ministre de l’Education, Néji Jelloul, pour accéder à la demande du syndicat, car ce n’est pas le syndicat qui décide du remaniement, mais c’es lui-même.

Youssef Chahed a fait état de bons rapports entre Béji Caïd Essebsi et lui-même, n’en déplaise à ceux qui souhaitent le contraire, a-t-il lâché en substance. Il a reconnu consulter le président de la république et l’écouter, pour son expérience de 60 ans, récusant le fait qu’il est en train de recevoir les instructions de Carthage.
Gnet

 

Commentaires 

 
+2 #2 Dommage ..
Ecrit par Mongi_T     28-02-2017 00:39
Au lieu de trouver une solution pour renaitre de ses cendres et se remettre sur pieds après le chaos de son "printemps", en s'alignant aux pays qui cherchent à l'aider (plus précisément au Maghreb), elle a plutôt préféré s'aligner à ceux qui cherchent bien au contraire à la maintenir sous leur coupe et l'empêcher de progresser, car il n'est pas dans leur intérêt qu'elle s'en sorte !!
Dommage pour nous autres, et je crains que nous soyons encore très loin de voir le bout du tunnel !
 
 
+2 #1 RE: Tunisie : Youssef Chahed s’en prend à ses prédécesseurs, pour leur
Ecrit par Agatacriztiz     27-02-2017 12:04
Il ne faut pas que le Premier Ministre donne l'impression de vouloir en faire un peu trop, car à la moindre anicroche, on lui fera porter le chapeau de toutes les erreurs, y compris celle où il n'y est pour rien et c'est peut-être là où réside tout le cynisme de sa nomination en tant que chef du Gouvernement.

Il faut d'abord qu'il sache procéder par étapes et surtout apprendre à consulter tous les partenaires sociaux, utiliser à bon escient les renseignements généraux, écouter tous les opérateurs économiques avant de prendre des décisions primordiales pour le futur du pays. Or irriter certaines susceptibilités (dont certaines n'attendent que ça d'ailleurs) ne va pas dans le bon sens de la recherche du consensus.

A titre d'exemple, si le fait que le problème des Banques publiques peut être résolu par leur vente ou par leur absorption par les Organismes Financiers du secteur privé, ceci ne résoudra pas automatiquement le réel problème représenté par une "masse monétaire floue" grandissante, issue de trafics en tous genre et qui circule clandestinement en "metres cubes" de billets de banques et qui, soit dit en passant, fait le bohneur (illicite) de certaines grosses légumes du pays et alimentent, n'ayons pas peur des mots, les caisses de certains partis.

Il faut prendre son temps mais d'une manière urgente, Monsieur le Premier Ministre...
 
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