Tunisie : Youssef Chahed sauve sa coalition, un camouflet pour Yassine Brahim !

Publié le Lundi 18 Décembre 2017 à 17:12
Youssef Chahed a sauvé l’unité de son gouvernement, et a évité une nouvelle crise politique qui aurait menacé le maintien de sa coalition, issue du document de Carthage, en refusant la démission des quatre ministres et secrétaires d’Etat d’Afek Tounes. Ces derniers ont rencontré ce lundi 18 décembre le locataire de Carthage pour lui demander de les dispenser de leurs responsabilités, en application de la décision du Conseil national de leur parti, réuni samedi 16 décembre en session extraordinaire, de se retirer du document de Carthage et du gouvernement.

Une démarche qu’ils ont dit avoir accompli par discipline partisane, tout en marquant leur désapprobation avec cette décision, prise sur instigation de Yassine Brahim, la jugeant illégitime. Et partant trois d’entre eux ont gelé leur adhésion au parti, et le quatrième, en l’occurrence, Abdelkoudous Saâdaoui, en a carrément démissionné, tout en acceptant de demeurer au gouvernement.

Dans une déclaration médiatique, le chef du gouvernement, Youssef Chahed a indiqué ce lundi que "le gouvernement d’union nationale intervenu suite à une initiative du président de la république et de l’accord de Carthage ne repose pas sur le principe des quotas partisans, mais sur le rassemblement des compétences nationales de différents familles politiques, autour des objectifs de l’accord de Carthage pour faire face aux grands défis dans le pays".

Il a ajouté qu’il n’y avait pas lieu de démettre de leurs fonctions les membres Afek de son équipe, a fortiori après qu'ils aient exprimé leur attachement aux objectifs du document de Carthage, et à la philosophie du gouvernement d’UN, faisant état de sa décision de les maintenir à leurs responsabilités, étant donné que l’intérêt du pays et de l’Etat est au dessus des intérêts et des calculs étriqués des partis.

Youssef Chahed a encore signalé que les membres Afek Tounes de son gouvernement ont annoncé le gel de leur adhésion à leur parti, histoire d'insister sur le fait qu’ils ont fait prévaloir l’intérêt national sur l’intérêt partisan.

Un camouflet pour Yassine Brahim, dont la décision de rompre avec le document de Carthage et le gouvernement, n’aura pas à déstabiliser la coalition gouvernementale, comme il semble l’avoir cherché. Outre les remous et la discorde que cette décision suscite désormais au sein de sa formation politique, où sa ligne politique, est de plus en plus contestée.

Yassine Brahim s’est défendu ce lundi sur Express qu’Afek soit un parti stalinien, soulignant que 75 % de son parti ont voté pour la sortie du gouvernement. "Nous sommes sortis du gouvernement et notre positionnement est aujourd’hui l’opposition constructive", a-t-il dit, fustigeant la loi de finances 2018, et la qualifiant de "la loi des contrebandiers". 

A l’origine, c’est le vote en rangs dispersés de la loi de finances par les députés d’Afek, lequel a été contesté même par leurs collègues ministres, qui a jeté les germes des tensions actuelles, qui ont jusque-là tourné à la défaveur du président du parti.

Au-delà dAfek, la loi de finances reste vivement critiquée. Sans aller jusqu’à se retirer du document de Carthage, comme elle avait menacé auparavant, l’organisation patronale avait jugé vendredi dernier sévèrement ce texte, qui attente, à ses yeux, "profondément au principe du consensus, qui est à la base du document de Carthage". L'UTICA avait mis en garde contre  "la fermeture d’entreprises, la perte d’emplois, et les tensions sociales pouvant en découler, du fait de nouvelles charges introduites par la LF". Des tensions restent dans l’air, et l’avenir de la coalition gouvernementale reste hypothéqué et sujet à plusieurs impondérables, dans la perspective d’une année 2018 redoutée par tous. 

Tout cela intervient au moment où la Tunisie célèbre le 7ème anniversaire de la révolution du 17 décembre ; le jour où la première étincelle de ce qui est appelé le printemps arabe a éclaté. Une célébration qui s’est faite dans l’amertume et le mécontentement général. Sept ans après, on est bien loin de l’idéal révolutionnaire. L’espérance née avec ce soulèvement populaire, pour une société plus juste, plus égalitaire et plus prospère, a été trahie, l’enthousiasme pour le changement s’est émoussé, et la désaffection envers la politique et les politiciens est grandissante ; les législatives partielles en Allemagne et leur faible taux de participation en sont le meilleur baromètre.
Gnet