Tunisie : Yahyaoui, un juge intègre, l’un des rares à avoir défié Ben Ali

Publié le Mercredi 23 Septembre 2015 à 12:47
Feu Mokhtar YahyaouiMokhtar Yahyaoui décédé hier, mardi 22 septembre à l’âge de 63 ans à Bizerte, est un juge, militant, activiste des droits de l’homme et opposant à l’ancien régime. Il est connu spécialement pour sa lettre incisive sur la dégradation de l’état du pouvoir judiciaire, qu’il avait adressée le 06 juillet 2001 au président déchu, en tant que président du Conseil supérieur de la magistrature. Il a été révoqué de la magistrature dans la foulée, et a été victime de restrictions et de pressions, comme c’était le cas de l'ensemble des opposants.

Yahyaoui a pointé dans cette lettre datant du 06 juillet 2001 la dégradation de l’état du pouvoir judiciaire, et le fait que les magistrats soient dépouillés de leurs pouvoirs constitutionnels, ce qui les empêchait d’assumer leurs responsabilités en tant qu’institution républicaine indépendante, et de s’acquitter de leur rôle en matière de défense des droits et libertés.

"Les magistrats tunisiens sont partout consternés de prononcer des jugements parachutés… sont traités avec arrogance dans des conditions de suspicion et de délation et sont exposés aux moyens de répression et de terreur, ce qui leur ôte leur volonté et les empêche d’exprimer leurs réelles convictions", écrivait le défunt.  

Yahyaoui condamnait dans cette lettre ouverte "la tutelle exercée sur les magistrats, du fait de l’emprise d’une catégorie d’arrivistes et de thuriféraires qui ont réussi à instaurer une justice parallèle, en dehors de toute légitimité".

Le défunt finissait sa lettre en s’adressant au président déchu en ces termes : "Vos responsabilités constitutionnelles vous imposent de prendre les mesures nécessaires pour lever la tutelle sur la magistrature, et sur toutes les institutions de l’Etat, de manière à garantir les libertés constitutionnelles pour tous, afin de concevoir le changement réel auquel aspire notre peule, et que requiert l’intérêt de la patrie".
Gnet

Voici sa lettre dans sa version originale en arabe :