Tunisie : Vérité, justice et défiance populaire

Publié le Mercredi 02 Février 2011 à 12:29
Ordre, liberté, justice. A la base d'une révolution, réside toujours un formidable sentiment d'injustice qui, fait de la soif de justice son véritable moteur, une irresistible force de la résistance populaire.

Après la chute des symboles de l'injustice, personnes ou institutions, les acteurs de la révolution s'attendent à une justice, qui à défaut d'être révolutionnaire (immédiate, violente et populaire) ne soit quand même pas juste cosmétique ou trop lente pour être sincère. C'est cette soif de justice, qui anime et continuera d'animer encore, victimes et manifestants. Elle est tout à fait légitime.

De même, dans le processus de stabilisation d'une révolution, la justice occupe une place centrale, dont le rôle n'est pas seulement de punir l'impardonnable, mais également de pardonner les naïfs, les seconds couteaux et les supports de la dictature pour raison alimentaire.

Mais pour pardonner, il faut idendifier les processus et les personnes qui ont participé à cette dictature  mafieuse, les catégoriser, des architectes aux exécutants en passant par les planificateurs. Pour pardonner, il faut que ces gens demandent pardon ; pour pardonner, il faut que la justice fasse son travail en toute indépendance, avant que les victimes lassées d'attendre ne cherchent à faire justice eux même, pour s'opposer au fait accompli.

A défaut d'une justice rendue rapidement (ce qui est presque antinomique), les victimes et plus largement les acteurs de la révolution, s'attendent au moins à une communication honnête, claire et transparente sans faux-fuyants qui réponde à des questions légitimes, inscrites au plus profond de nous mêmes, que nous ruminons depuis de nombreuses années et dont les réponses pourraient calmer l'inquiétude populaire, réduire au minimum la période d'instabilité et donner du temps aux nouvelles institutions pour acquérir plus de légitimité.

Au lieu de cela, nous avons des autorités qui n'anticipent pas l'attente populaire (excepté la prestation du ministre de l'Intérieur hier sur Hannibal que nous allons développer ci-dessous), et qui restent systèmatiquement sur la défensive, alimentant ainsi la défiance et les revendications populaires et ralentissant en conséquence le processus de stabilisation. Ainsi par exemple, si le gouvernement choisi par M. Ghannouchi (ou par les officines cachés au public), était celui qui siége aujourdh'hui, sans nul doute, que la Tunisie aurait gagné dix jours de stabilité, de travail et une confiance plus prononcée du peuple dans le gouvernement actuel.

De même, si l'ATCE n'était qu'une machine de propagande du mensonge officiel, donc un complice actif de la dictature mafieuse, le silence actuel du gouvernement et des commisions supérieures peut-être perçu comme de la complicité passive, car taire donc cacher des vérités tant attendues risque d'ôter encore de la légitimité à ces institutions qui semblent alors jouer un rôle ambigu.

Pour lever ces ambiguités, et renforcer la légitimité de ces institutions, les autorités devraient répondre trés rapidement aux questions de fond dont voici un échantillon non exhaustif :

–    Qui se cache derriere M. Ghannouchi et détient réellement les rênes du pouvoir ?
–    Les biens du RCD et des OVG* ont-ils été transférés à l'Etat ? A t-on réellement coupé tout lien entre l'Etat d'une part et RCD et OVG d'autre part ?
–    Y-a t-il encore des fonctionnaires employés par le RCD et les OVG ?
–    Pourquoi, ne traite t-on pas le problème des emplois fictifs au sein de l'administration ? S'agit-il de milliers ou de dizaines de milliers de personnes ? Que va t-on en faire ?
–    Pourquoi ne parle t-on pas de la façon avec laquelle les élections étaient, sous le règne du Président déchu,  truquées ?
– Pourquoi la chaîne de commandement de la torture n'a pas encore été rendue publique ?
–    Combien y a t-il de miliciens du RCD, de la police, de la présidence et des ex- familles régnantes ?
–    Pourquoi les plus hautes autorités de l'Etat ne se sont toujours pas rendues dans les zones non sinistrées, notamment celles qui ont été le théâtre des  massacres ?
–    Pourquoi la justice est-elle si timide dans cette phase cruciale ?
–    Pourquoi le syndicat de la magistrature pourtant indépendant s'enferme dans une thématique corporatiste allant même jusqu'a défendre l'infime minorité de juges qui a sali le corps de la magistrature en étant complice actif des atrocités commises par l'ancien régime ?
–    Pourquoi les commissions supérieures censées rétablir les vérités et qui disposent pourtant de pouvoirs étendus ne communiquent pas sur leurs objectifs et n'ont pas annoncé leur modus opérandi ?
- Pourquoi des répresentants des acteurs de la révolution ne sont-ils pas représentés ?
–    Comment l'Etat va recupérer tous les biens dont il a été spolié ? Pourquoi les mesures conservatoires ne concernent-elles que trentre trois personnes ?
–     Qui sont les alliés et les associés de l'ancien régime qui ont massivement profité et qui seront poursuivis par la justice ? Pourquoi n'a t-on pas gelé leurs biens acquis après novembre 1987 ?
–    Pourquoi, alors que tout le monde appelle à la reprise du travail pour la sauvegarde de nos emplois, l'administration fonctionne au ralenti en séance unique ?

Toutes ces questions expliquent sans doute la combativité et la défiance populaire vis à vis  des autorités, c'est ce qui rallonge la période d'instabilité que le gouvernement semble pourtant chercher à juguler.

Le goût amer de la révolution inachévée qui est etouffée commence à se faire sentir. Si la première ligne ou le sommet du régime est tombé, une partie importante de l'ancien système est toujours debout, son discours a seulement changé et il attend son heure. Il revient au gouvernement de s'en dissocier clairement s'il ne veut pas de saut dans l'inconnu.

Hier on a entendu sur Hannibal TV, un début de réponse sur cette dissociation et pour la première fois, nous avons vu une communication intélligente, déterminée et humaniste d'un nouveau ministre, qui plus est, celle du ministre de l'intérieur, un ministre traditionnellement habitué a vivre dans sa tour d'ivoire, le langage franc et direct de Farhat Rajhi augure d'un changement majeur, où toutes les cartes seraient désormais sur la table, où plus rien ne serait sous la table et où la transparence dans les affaires publiques serait la règle.

Nous espérons tous que l'ensemble du gouvernement partagera ce souci de transparence, pour nous rassurer sur l'irréversibilité de notre révolution.
 
 N.C.


*OVG : Organisations véritablement gouvernementales. 

 

Commentaires 

 
#20 DE TRANSITION.......
Ecrit par Bouazizi     03-02-2011 13:20
.....NE L'OUBLIEZ PAS NC.

PREPAREZ VOS CANDIDATS, VOS CAMPAGNES ET VOS PROGRAMMES.
 
 
#19 Réponses à Monsieur N.C
Ecrit par mfl     03-02-2011 10:38
Monsieur je dois vous dire après le salut, que le peuple tunisien n'est plus celui de 87. la mensonge ne collera plus. La révolution a mené le peuple a dire STOP à toutes les manipulations de la dictature. Maintenant, Le nettoyage est le plus difficile, sachant que toutes les institutions , administrations, entreprises, gouvernementales ou privés sont contaminés, pour ne pas dire que la société est pourrie. Il est tout à fait normal, car la dictature pour vivre avait besoin de semer la corruption de la société civile. le régime dictateur a privilégié la culture du favoritisme, du crime, du vol de société bidon. La Tunisie est classée la dernière dans tout les domaines du savoir, de culture et des sciences, la première dans le domaine de contrebande, d'injustice et de magouille politique.Les pilleurs,les voleurs, les ingrats,les indignes,les irresponsables, les criminels ont fait les lois, presque tous complice. Le nettoyage est obligatoire nécessitant l'extrême vigilance pour bien filtrer les nouveaux responsables. Le peuple aujourd'hui n'a confiance que dans les faits, loin des discours bidons de LAILA Elmatri et compagnie.
Réponses à Monsieur N.C et au Gouvernement GANNOUCHI:
-1- La CIA, aidés par les agents RCD, avec un pouvoir fictif.
-2- Pas encore.
-3- Oui, partout.
-4- Ce n'est pas le moment, maintenant on a besoin de sécurité.
-5- On n'a pas le droit de parler des élections truquées, car les artistes est les témoins de ses élections sont encore là.
-6- Il n'y a pas nécessitée, pour ne pas fâcher les maitres de la torture installés à JEDDAH et au CANADA ???.
-7- La révolution est l'affaire du peuple et non du gouvernement GANNOUCHI.
-8- La dernière réponse, pour conclure , M.GANNOUCHI, vous devez savoir que le peuple a suffoqué l'époque ALI BABA, alors ne rejouer plus avec le même feu, vous risquer la brûlure. Nous peuple, en a mare, alors le refus, la rue, sont capable de nous débarrasser de vous avec tous vos SERIATI, au moment utile.Je vous conseille de ne plus pleurer sur les écrans de télé, le peuple ne croit plus en ça.J'espère que vous avez appris la leçon.
 
 
#18 LE COURAGE
Ecrit par BORHEN     03-02-2011 05:20
L'AUTEUR N.C. A EU LE COURAGE ET LE TEMPS DE POSER DES QUESTIONS LEGITIMES. OU IL S'AVERRE QUE J'AI MOI MEME LES MEMES QUESTIONS ET PLUS. MERCI N.C.
 
 
#17 Tunisie: Les jeunes ont marre des questions ou sont les solutions !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Ecrit par M.N     03-02-2011 01:08
Aujourd'hui , nous n'avons pas besoin de questions (les gens qui ne veulent pas savoir posent des questions à des gens qui ne peuvent pas répondre). Nous avons besoins de solutions. j'ai essayer de faire un effort pour trouver des solutions en les classifiant par ordre de priorité :
1. Instaurer un climat de sécurité chose qui est faite partiellement suite à l'intervention du ministre de l'intérieur .
2. Le gouvernement communiquer avec le peuple ( c'est notre avenir qui est en jeu).
3. Travailler et revenir a notre rythme habituel de la double séance.
4. Promouvoir l'image de notre Tunisie afin d'encourager les investissement étranger de ce fait réduire le chômage surtout dans les zones sinistrés.
5.Inciter et subventionner les investissements Tunisiens pour la création dans les zones sinistrés.
6.La mise en place d'un plan de sécurité sociale et non pas une arnaque comme la CNAM/CNSS/CNRPS afin d'en assurer une bonne couverture sociale pour les Tunisiens.
....
la liste des propositions est très très très très longues cela est un échantillon non exhaustif .

N.C j'aimerais bien que votre prochain article soit adresser aux jeunes avec des solutions nous avons marre des questions depuis toujours nous n'avons eu que des fausses promesses .
A la prochaine :)
 
 
#16 Sans hésitation
Ecrit par Khammous     02-02-2011 22:29
A mon avis il faut passer immédiatement à la Révolution CULTURELLE
cAR C'EST LES MENTALITES QU'IL VA FALLOIR REVOIR, LES HABITUDES, LA MANI7RE DE VOIR L'AUTTRE, LE PARANOA, LES COMPLEXES DE SUPERIORITE L'EXCLUSIVITE DU PATRIOTISME
L'ECLUSIVITE DE LA FOI
ETC...
CHACUN DOIT LA MENER CETTE REVOLUTION CULTURELLE SUR LUI MEME
 
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