Tunisie : Une démocratie naissante, avec les démocrates en moins ! |
Publié le Mercredi 05 Novembre 2014 à 17:43 |
Les tiraillements émergent de nouveau, et la polarisation reprend de plus belle. La campagne présidentielle est ponctuée de dérapages, et les risques que le débat sorte de son cadre républicain et démocratique, pour céder la place à une atmosphère de conflictualité, sont réels. Les Tunisiens n’ont pas l’air d’avoir exorcisé les démons de la rancœur et de la haine idéologique. Le spectre de la division plane de nouveau, les tensions ayant marqué les premières années de la révolution, qui se sont exacerbées lors du règne de la troïka, notamment pendant la crise politique ayant atteint son point culminant l’été 2013, refont insidieusement surface. Pendant les législatives, la polarisation était de mise. Certains partis ont fondé leur campagne sur la division et ont opposé les modernistes, progressistes, aux obscurantistes, rétrogrades, un discours fallacieux et suranné, étant donné que les questions identitaire et sociétale ont été tranchées par la Loi fondamentale. Lors de cette campagne présidentielle qui en est à sa première semaine, la polarisation idéologique est toujours présente et a la vie dure, mais elle est supplantée par une polarisation d’un autre genre, basée sur l’ancrage démocratique, voire entre ceux qui se prévalent d’un long passé militant, et qui se proclament de la famille sociale-démocrate, et ceux qui sont considérés comme étant une résurrection, du moins en partie, de l’ancien régime. Ces tiraillements ont été attisés par les résultats du scrutin du 26 octobre 2014, ayant profondément changé la donne politique, et débouché sur un nouveau rapport de force, quelque peu inattendu quatre ans après la révolution. La disparition des partis centristes, sociaux-démocrates, qui ont joué un rôle central pendant cette transition démocratique, soit à partir de leur position au pouvoir, ou dans l’opposition, est difficile à digérer. L’histoire retiendra que ces partis ont jeté les fondements de l’édifice démocratique et de la deuxième république, en dotant la Tunisie d’une nouvelle constitution unanimement saluée à l’intérieur et à l’extérieur, et en acheminant le pays, malgré les difficultés et les achoppements, à des élections législatives et présidentielles. Il retiendra aussi que ces partis ont incarné la modération, notamment pendant la grave crise politique de l’été 2013, pour concilier les deux fractions de la société alors en rupture, et éviter que la situation ne dégénère en guerre civile. N’oublions pas aussi que ces partis ont montré un attachement indéfectible aux institutions et les ont préservées de tous les appels de dissolution. N’oublions pas aussi le passé honorable de ces partis et de leurs leaders. Ceux qui ont longuement milité, pendant les années de braise, contre le despotisme et la répression, et ont consenti de grands sacrifices pour voir un jour la démocratie, la liberté se traduire dans les faits. Ils étaient minoritaires lorsqu’ils ont mené ce combat contre la répression et l’autocratie, et les voilà de nouveau minoritaires aujourd’hui. Le peuple les a sévèrement jugés, il les a rejetés et les a évincés du paysage politique. Bien sûr, la décision du peuple souverain est sacrée, et ne peut-être discutée, mais c’est regrettable que ces acteurs clefs de la scène politique post-révolution, soient réduits à de simples opposants, avec une faible représentativité parlementaire. Ils n’auront ainsi aucune prise sur le cours des événements pendant l’étape à venir qui reste décisive, étant celle de la consolidation des institutions démocratiques, et du développement socio-économique. Ces élections, législatives et présidentielles, ne concernent pas seulement le quinquennat à venir, mais balisent le terrain pour l’avenir de la Tunisie, soit qu’elle aille de l’avant dans le parachèvement de l’instauration d’une démocratie stable, pérenne et irréversible, soit qu’elle connaisse une régression. Les peurs d’un retour en arrière sont légitimes. Les appels pour un rééquilibrage du paysage politique ne visent personne et ne mettent en rien en question le verdict des urnes, ils ont seulement pour objectif d’immuniser notre démocratie fragile et naissante et de prévenir toute dérive à même de la mettre en péril. Il y a, bien entendu, plusieurs points de vue qui s’expriment à ce sujet, à chacun son opinion et sa perception et on est là au cœur du débat démocratique, mais lorsque cette pluralité d’opinions est mal gérée, et lorsque les insultes, les invectives et la déformation, à travers notamment des procédés calomnieux sur les réseaux sociaux, prennent le dessus, des dérapages sont à craindre. Le débat démocratique et l’éthique politique sont, dans le cas d’espèce, sacrifiés sur l’autel d’une idéologisation outrancière, et d’un extrémisme intellectuel de mauvais aloi. Preuve supplémentaire, s’il en est, que notre démocratie est vulnérable et a besoin d’être protégée. H.J.
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Commentaires
Ecrit par khammous 11-11-2014 18:15
Pour être franc avec tout le monde ma culture politique m'oblige à dénoncer ce °dégage°.. Je ne suis pas d'accord.. .
Mais ma culture m'oblige aussi à constater avec regret que le candidat MMM n'ait pas été disqualifié immédiatement par la Justice et mis en examen après les appels au meurtre du TAGHOUT qu'il avait proféré en public à Kairouan.
Voilà ce que font les grandes démocraties
Peut être qu'un jour on y arrivera
Ecrit par Jasmine 05-11-2014 23:59
Ecrit par Ali Bobo 05-11-2014 18:48
Et le moins démocrate c'est vous...