Tunisie : Pourquoi Youssef Chahed est-il le candidat de BCE à la primature ?

Publié le Mardi 02 Août 2016 à 13:31
Youssef Chahed. Le 04 juillet dernier, lorsqu’il a clos le premier round des concertations autour de la formation d’un gouvernement d’union nationale, ayant abouti quelques jours après à la signature du document de Carthage, le président de la république a affirmé avoir agi au sujet de son initiative dans le cadre de ses prérogatives constitutionnelles. BCE a précisé à cette date ne pas être concerné par le choix de la personnalité qui sera chargée de former le nouveau cabinet, envoyant la balle dans le camp des partis, et affichant son intention d’approuver la décision du parlement. Un mois après, le chef de l’Etat semble se raviser, en lançant un nom, au premier jour du début du 2ème round du dialogue à Carthage.

Le président a proposé Youssef Chahed, ministre des Affaires locales du gouvernement démissionnaire d’Habib Essid, pour succéder à ce dernier. Même s’il se prévaut d’un CV riche et respectable, le candidat du président n’est pas spécialement distingué, ni connu. A l’instar de plusieurs de ses collègues ministres, il reste pour le large public un inconnu qui fait partie de cette armada d’anonymes ayant rejoint la politique après la chute de l’ancien régime.

Sa biographie dégage des atouts. Le premier est son jeune âge. L’heureux prétendant, un quadra, fait partie de la génération Aléxis Tsípras. Tout autant que la Grèce, la Tunisie vit une crise profonde dont la jeunesse de l’un des dirigeants clefs,  peut quelque peu en favoriser le dénouement. On aura ainsi l’expérience et la force morale à Carthage ; l’enthousiasme et la force physique à la Kasbah. Le conseil et la sagesse d’un côté, la persévérance et l’effort de l’autre.

L’autre particularité du candidat - un avantage pour les uns, un défaut pour les autres - est sa proximité de l’Union européenne, des Etats-Unis, de l’a FAO (Organisation Alimentaire Mondiale).

Chached a travaillé comme expert international en agriculture auprès des institutions internationales, et a mis en place des politiques de partenariat agricole tuniso-américain. Sa spécialisation dans le domaine agricole ne sera pas de trop, à l’heure où la Tunisie entame le processus de suppression des barrières avec l’union Européenne, pour ce qui est des secteurs agricole et des services, dans le cadre de l’ALECA (Accord de libre échange complet et approfondi).

La désignation de YC à la primature, si elle venait à se confirmer, consacrera la politique de libéralisation que la Tunisie est amenée à adopter, de gré, étant créatrice de richesses, mais aussi de force, dans la mesure où il s’agit là, de l’une des injonctions du Fonds monétaire international (FMI),  de la Banque mondiale (BM), de l’Union européenne, des Etats-Unis…tant et si bien que le profil du futur locataire de la Kasbah doit trouver grâce beaucoup plus aux yeux de nos partenaires étrangers et autres bailleurs de fonds, qu’à ceux des acteurs politiques internes, du fait du niveau de dépendance de notre  économie des crédits et soutiens étrangers. 

D’emblée, des réserves s’expriment autour du prétendant à la succession d’Habib Essid, dans la mesure où personne ne semblait s’attendre à ce que son nom soit posé dès la première réunion d’une manière unilatérale par le président, alors que cette question devra faire l’objet de concertations entre les trois organisations nationales et les neuf partis signataires de l’accord de Carthage.

Mais, jusque-là, il n’y a pas de véto clairement avoué. Certainement, les uns et les autres seraient en train de fouiner dans son présent et son passé pour voir, s’il répond aux critères d’intégrité, de compétence, de non-implication dans des dossiers de corruption exigés…et voir aussi son bilan au ministère des Affaires locales qui ne brille pas forcément, ne serait-ce qu’au regard l’état de dégradation environnemental généralisé dans le pays, même s’il ne peut être le seul responsable d’un problème qui dure depuis des années.

Parallèlement, des tractations secrètes seraient engagées autour du nouveau chef du gouvernement, et c’est au niveau de cette face cachée, que les jeux seront faits. 

Entretemps, BCE aura court-circuité tout le monde, en allant directement au but et en dirigeant le débat. Si son choix est plébiscité par les participants au dialogue, il aura atteint son objectif et sera celui qui aura fait gagner du temps au pays afin qu’il ne s’éternise pas avec cette situation provisoire qui lui est fort préjudiciable. S’il est, a contrario, désapprouvé, et une alternative consensuelle n’est pas vite trouvée, la faute sera celle des partis et organisations qui ne cessent de faire perdre un temps précieux au pays. Dans une telle hypothèse, ou telle l’autre, c’est le patriarche qui aura tiré son épingle du jeu.
H.J. 

 

Commentaires 

 
+2 #4 Essebsi joue aux dés
Ecrit par hb     04-08-2016 10:13
Lorsqu'on est pas spécialiste de formation en politique (sciences po ena...), ni spécialiste en gestion des affaires de l'etat, on doit avoir roulé sa bosse au haut niveau du gouvernement pour une durée minimale de 15 ans (comme habib essid qui a presque la même formation initiale que echahed). Si on ajoute à cela que la pays est en une situation critique, il lui faut en plus des connaissances en économie et en gestion des ressources humaines, chose qu'on apprend pas sur le tas. Si on accepte au chef de l'etat de ne pas être spécialiste (car il pourra s'entourer de bons conseillers); ce n'est pas du tout permis au chef du gouvernement qui a un pouvoir décisionnel de haute importance. Il est clair; là; que Essebsi prends un gros risque. Et justement c'est pour celà qu'on dit que Echahed a un lien de parenté avec Essebsi, car, en absence de logique dans le choix, on pense automatiquement à l'influence familiale. Savez vous qu'en Tunisie, les gens qui ont des dipl$omes de très haut niveau (Echahed n'en fait pas partie car il a un diplôme banal pour ceux connaissent)et qui ont de l'expérience comptent par milliers. PAUVRE TUNISIE!!!
 
 
+3 #3 Les liens familiaux, ça rapproche considérablement...
Ecrit par Mansour Lahyani     03-08-2016 15:57
Le gendre du président est le frère de l’épouse de l’oncle de Youssef Chahed... Ça n'est pas forcément la cause unique de la préférence de BCE pour YC, mais ça crée de belles affinités... Croyez-vous que BCE aurait distingué YC, s'ils n'avaient pas pré-existé ?? Tout comme pour HCE, son fils, la tendance dynastique prend le dessus sur BCE, et ça fait peur...
 
 
#2 Manager
Ecrit par Belhassine     03-08-2016 10:44
Excellent choix qui réuni jeunesse et compétence !
 
 
-2 #1 lien de parenté
Ecrit par tiji     02-08-2016 22:05
Le gendre du président est le frère de l’épouse de l’oncle de Youssef Chahed
Vous croyez qu'avec ça ils sont vraiment proches?
Et qd je vous dit que mustapha ben jaafaar est son cousin germain!!!
 
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