Tunisie : Pour un gouvernement pragmatique, rassembleur et non clivant !

Publié le Lundi 29 Décembre 2014 à 17:45
Réunion vendredi du comité constitutif de Nida Tounes.Les choses s’accélèrent en cette fin d’année. L’annonce ce lundi 29 décembre par l’ISIE des résultats définitifs du second tour de la présidentielle clôt l’épisode électoral, et, à travers lui, la première période transitoire constitutive, donnant naissance aux nouvelles institutions qui présideront à la destinée de la Tunisie lors du prochain quinquennat.

Proclamé officiellement président de la République, Béji Caïd Essebsi prêtera serment à la veille du nouvel an, et sera officiellement investi dans ses nouvelles fonctions dans la foulée. Il devait charger pendant les premiers jours de 2015 une personnalité proposée par le chef de parti de la majorité parlementaire (lui-même, avant qu’il ne démissionne pour être président de tous les Tunisiens) de former un gouvernement.  Nida Tounes a tenu la semaine dernière son bureau exécutif élargi et son comité constitutif, rien n’a néanmoins filtré d’officiel sur le nom du futur locataire de la Kasbah. A l’heure qu’il est des noms sont cités, mais le débat ne semble pas encore tranché au sein du parti de la majorité, sur le profil du Premier ministre, est-ce un indépendant, ou une figure partisane, issue de Nida. Les divergences persistent tout autant sur la nature du prochain gouvernement, est-ce un gouvernement d’un large consensus, ou un gouvernement constitué de partis proches et alliés de Nida Tounes.

Les avis sont partagés, et les déclarations se contredisent par moments, au sein du parti du président élu, entre ceux qui prônent un gouvernement de consensus, où le mouvement Ennahdha est représenté, et l’autre camp qui est catégoriquement opposé à l’entrée du mouvement islamiste au gouvernement.

Idem pour la participation du Front populaire qui reste incertaine, étant tributaire, en grande partie, de l’attitude qui sera affichée envers Ennahdha. Le FP oppose un veto à la présence du mouvement islamiste au gouvernement, quitte à ce qu’il le boycotte et choisisse le camp de l’opposition.

Les choses vont se clarifier en début d’année, aussitôt les tractations officielles et officieuses terminées. La désignation du chef du gouvernement annoncera d’emblée la couleur sur les orientations des nouveaux dépositaires du pouvoir.

Indépendamment de la participation de tel parti ou tel autre, le pays a besoin d’une équipe constituée de personnalités compétentes, crédibles et rassurantes, à même de rassembler et non de cliver.

La prochaine étape rompt avec le provisoire et s’appuie sur des institutions pérennes, on ne peut que s’en réjouir, mais cela demeure insuffisant pour donner lieu à la stabilité requise. La conjoncture est d’une telle vulnérabilité, et les défis d’une telle acuité que tout risque de soubresaut doit être éliminé.

Les jeunes institutions élues, nées dans le giron démocratique, sont appelées à se renforcer et à se raffermir, et à ne pas tituber, sitôt heurté à la difficile réalité du terrain. Elles doivent s’immuniser de l’intérieur, en menant à bien leurs missions, et en ne déviant pas de la voie tracée par le peuple souverain, dans sa diversité, et envers l’extérieur, en répondant aux attentes populaires et aux exigences de la révolution, et en redonnant confiance à nos partenaires étrangers.

La Tunisie s’apprête à affronter des années dures, les Tunisiens seront appelés à consentir encore plus de sacrifices, et à se serrer la ceinture. Le futur gouvernement sera acculé à faire passer des réformes douloureuses, qui ne peuvent être engagées que dans un climat de sérénité et de consensus. Quelle qu’en soit la composition, le futur gouvernement sera tenu d’atteindre dès la première partie du quinquennat, des objectifs bien déterminés. Il s’agit de redresser les finances publiques empêtrées dans un déséquilibre abyssal, d'attirer les investissements, de booster la croissance et de lutter contre le chômage, nécessaires à la relance de l’économie, d’autant plus que la Tunisie est face à une échéance cruciale de remboursement d’une bonne partie de la dette en 2017. Il est de surcroit attendu sur le dossier sécuritaire, à travers la poursuite de la lutte  contre le terrorisme. Sans regain sécuritaire, il n’y aura ni stabilité, ni embellie économique.

Pour réussir, le prochain quinquennat doit démarrer sur des bases solides et ne doit pas louper le début. Pour ce faire, il convient de tirer les enseignements des erreurs passées, non seulement celles commises après la révolution, mais à l’ancienne époque.

La nouvelle équipe dirigeante doit envoyer des signes positifs et rassurants à l’intérieur et extérieur. A travers notamment un gouvernement restreint et pragmatique qui saura concilier entre les exigences populaires et l’intérêt du pays, lequel gouvernement doit bénéficier d’un large soutien, notamment des partenaires sociaux, appelés à privilégier une longue trêve sociale, sans abandonner la cause des classes moyennes et démunies.

H.J.