Tunisie, pour réussir la transition démocratique il faut instaurer des valeurs

Publié le Vendredi 29 Avril 2011 à 16:47
Après plus de trois mois du 14 janvier, et à autant de temps qui nous sépare des élections de l'assemblée constituante, la rue se pose des questions sur l’avenir : qu’est-ce qui nous attend sur le plan économique, politique et social ? Pour qui allons-nous voter, comment réussir la transition démocratique dans le calme ? Autant de questions, et d’autres encore ont été posées hier au cours de la deuxième journée du Forum organisé par le magazine Réalités, sous l’intitulé : «La révolution tunisienne les enjeux de la transition démocratique et le rôle de la société civile». Et auxquelles ont répondu des experts tunisiens et étrangers dans tous les domaines.

«La révolution tunisienne a réalisé les ¾ de ses enjeux, il reste actuellement qu’il faut passer du mouvement social à l’institutionnalisation », explique Mahmoud Ben Romdhane, économiste tunisien, après quoi il dissèque l’enjeu économique « Il est tel que nous avons un déficit sensible des recettes cette année, et une explosion des demandes…et que la crise est aggravée par l’attentisme des investisseurs nationaux et internationaux ». Selon lui, les résultats du 24 juillet traduiront la volonté du peuple tunisien de s’ouvrir sur l’extérieur et de sauver l’économie, « si le choix est le refus de l’ouverture vers l’extérieur, c’est choisir de s’enfoncer dans la crise», a-t-il dit.

Gérard François Dumont, professeur à la Sorbonne pose la question de quel exemple serait le meilleur à suivre pour la Tunisie de demain : « Certains évoquent l’exemple de la Turquie, or ce pays est différent de la Tunisie de part son histoire et de sa géopolitique, d’ailleurs la Turquie vit une recrudescence de l’autoritarisme », argumente-t-il dans son intervention.

Il évoque un nombre d’exigences primordiales pour l’accomplissement d’une transition démocratique réussie, dont la transparence des financements des partis : «Il faut réfléchir à une loi extrêmement ferme pour la transparence des financements des partis politiques, il faut aussi séparer les pouvoirs, former les Tunisiens dans les métiers dont la Tunisie a besoin ». 

Lech Walesa : Pour réussir, il fau être solidaire

Lors de cette rencontre qui a réuni plusieurs politiciens, économistes, juristes et sociologues, l’invité d’honneur demeure l’ex-président polonais, Lech Walesa, l’emblématique syndicaliste qui a conduit la révolution polonaise contre lé régime soviétique, devenu en 1990 président de son pays.

« Vous voulez réussir une révolution, et allez de l’avant ? Il faut être solidaire. Il faut porter le fardeau à plusieurs. Quand la Pologne a vécu sa révolution, elle avait des ennemis extérieurs, la menace nucléaire, le système soviétique, mais ce n’est pas le cas chez vous, vous devriez être unis»,  répète-t-il, à plusieurs reprises. Il a appelé à ce que les syndicalistes gardent un œil vigilant sur ce que font les politiciens : «  non pas pour faire des grèves et revendiquer, mais pour surveiller et voir comment l’argent a été dépensé», ajoute-t-il. Lech Walesa, syndicaliste devenu président, connaît plus que quiconque comment réussir une transition d’une dictature vers une démocratie, il refuse toutefois de donner une recette toute faite, il dit que chaque pays doit construire un modèle qui aille avec ses valeurs, son histoire et l’attente de son peuple. Il prône la participation des masses dans le processus de démocratisation, et que chaque prise de position soit argumentée de part et d’autre. « Toute négociation doit être faite dans le cadre d’un triangle équilatéral, à savoir les patrons, l’administration et le syndicat. Pour ce faire il faut réinstaurer la notion de responsabilité chez les citoyens. Quant on enlève ses droits à un peuple, il oublie ses responsabilités. Maintenant, il faut responsabiliser. Chacun doit être responsable de sa maison, de son quartier, de sa ville », explique-t-il. A la question, lequel des systèmes, présidentiel ou parlementaire, serait le meilleur à suivre, Lech Walesa répond : « C’est au peuple tunisien de décider, s’il voit qu’il existe un homme à la hauteur de la charge, qu’ils élisent un président. Le régime présidentiel est plus efficace, si ce n’est la peur du retour d’une dictature. Le système parlementaire quant à lui est probablement plus adéquat, mais il va plus lentement vers l’atteinte des objectifs ». 

Interrogé sur son avis au sujet de la décision de dissoudre le RCD, ancien parti au pouvoir et d’exclure ses membres de la vie politique, Lech Walesa répond : « En démocratie on ne peut pas exclure, c’est la cour qui décide et non pas les politiciens. Ce n’est pas bien quand les politiciens prennent leur revanche. Il y a quelques jours en Pologne, il y a eu le jugement du général qui a instauré la loi martiale, bien que tout le monde sache qu’il est coupable, il a été acquitté parce qu’il n’y avait aucune preuve contre lui. C’est la loi. On peut modifier une loi mais on ne peut pas l’enfreindre ».

Arun Kapil, professeur universitaire à Paris est du même avis. « Dans aucun pays révolutionnaire le parti autoritaire n’a été dissout. Je crains que la dissolution ne soit pas un choix prudent », s’exprime-t-il.

Aux côtés du défi politique, celui de la continuité économique.Hakim Ben Hammouda, expert à l’OMC, révèle qu’une étude faite par 20 chercheurs montre qu’il y a stagnation des investissements privés et aversion à l’investissement dans les secteurs à haut risque. « L’année 2011 sera difficile avec un taux de croissance ne dépassant pas les 1.3% », constate-t-il. Au même moment, lors de tout changement politique, les comportements économiques changent. Pierre Delval, président de la Fondation Waito, prévient contre la recrudescence du crime organisé. «  En moment de crise, les mafias et les bandes organisées  se disent : focalisons-nous sur la détresse des populations ». Ils sont spécialistes dans la contrefaçon des produits alimentaires, les médicaments, le tabac, les produits cosmétiques. «  C’est le véritable ennemi de demain, il y a une mutation qu’il faut prendre avec beaucoup de sérieux. La solution est d’abord d’établir les faits, construire une analyse précise de la situation en Tunisie, ajouter des aspects plus répressifs au code pénal comme « tromperie aggravée », et rétablir la relation police-douane entre la rive nord et la rive sud de la méditerranée ». Selon lui, ces trafics génèrent plusieurs centaines de milliards de dollars par an dans le monde. Le Maroc a par exemple vu le narcotrafic baisser de 25%, mais la contrebande augmenter de 30%.

Les élections du 24 juillet. Adrianus Koestsenruijter, ambassadeur et chef de la délégation de l’Union européenne en Tunisie, évalue la situation pré-électorale, selon les données actuelles.

«Il y a des experts européens des élections qui sont venus en janvier, et qui ont quitté il y a juste une semaine. Ils ont rencontré tous les partis politiques tunisiens qui ont été crées jusqu’à leur départ. Ils ont fait un grand rapport, qu’ils ont présenté au gouvernement provisoire ». Ce rapport évoque notamment la complexité et la difficulté de la tâche. A savoir mener à bon port ces élections. Principalement parce que le délai serait trop court pour pouvoir instaurer toute la logistique (enregistrement de tous les votants, renouvellement des cartes d’identités). «Le déroulement des élections aura des faiblesses dans certaines régions ; c’est un grand défi et un risque », confie l’ambassadeur européen. Il annonce :« je vais bientôt avoir une réunion avec l’équipe observatoire, pour voir si oui ou non ils vont observer ces élections. Parfois il n’est pas possible de le faire tellement les conditions sont mauvaises ». Cette équipe restera une dizaine de jours au cours desquels elle rencontrera l’équipe de Yadh Ben Achour.

Quant à l’avenir de la Tunisie, Adrianus Koestsenruijter est optimiste : « si la région se stabilise, économiquement la Tunisie deviendrait le Tigre du Maghreb ».

Parmi l’auditoire, des intervenants ont tout de même fait part de leur inquiétude. Certains se sont interrogés sur le contenu des programmes des partis politiques, ont déploré l’absence de communication de ces mêmes partis et ont appelé à ce que la société civile soit plus concernée, qu’elle participe plus à l’avenir politique, social et économique du pays.
Chiraz Kefi
 

Commentaires 

 
#11 Bien sûr..
Ecrit par KHAMMOUS     02-05-2011 17:14
Bien sûr la justice craignant DIRU AVEC DES HOMMES CRAIGNANT DIEU .
Le génie de la Tunisie moderne, celle qu'avait bâtie le père de la nation, est justement dotée de cette justice et les hommes qui l'avaient servi à l'AUBE DE L'INDEPENDANCE CRAIGNAIENT DIEU .Ces hommes n'étaient pas seulement des destouriens . Les premières élections en 1956 étaient carrément plurielles Il y avait des communistes ( BEN SLMANE etc...) des indépendants qui avaient remporté aussi leurs sièges sans aucun trafic .
C'est vrai que cette période n'avait pas trop duré .
Après il avait d'autres hommes d'une autre trempe .
A-t-on, pour aujourd'hui et demain, les hommes qu'il faut ??.
Je le pense .
Prions DIEU pour que les idéologies ne les corrompent pas et qu'elles ne prennent pas le dessus sur l'intérêt général et l'unité nationale.
Car dans ce cas je ne réponds plus de rien .C'est la raison pour laquelle je suis foncièrement contre la Constituante. La convocation de cette assemblée peut semer les ingrédients d'une rupture profonde entre les Tunisiens si l'on n'y prend pas garde.
Tout cela pour servir des petits partis préssés de prendre le pouvoir ...
 
 
#10 justice républicaine et les risques de dérapages?
Ecrit par Dédé     02-05-2011 13:11
justice républicaine?
La justice, cher ami, est au-dessus de la république, au-dessus des monarchies, elle est la justice point barre, comme tu dis.
Elle vaut par la valeur et la qualité des magistrats qui la rendent au-delà des systèmes politiques.
Elle peut être rendue au nom de la république, elle peut être rendue au nom du monarque, elle peut être rendue au nom du peuple et elle peut être rendue au nom de Dieu.
Il y a aussi le justice révolutionnaire.
De toutes ces justices, la plus authentique est la justice divine rendue par des croyants craignant Dieu selon la loi de Dieu.
Ceci n'est pas un mystère pour un croyant musulman qu'il soit ou non "nahdhaoui" ou de toute autre obédience.
La république dont certains parlent je n'ai jamais pu la croiser dans la rue, il y a des citoyens certes mais la république demeure un concept abstrait qu'on peut employer à tort et à travers.
ZABA avait lui aussi sa république, il en avait, parait-il, une pour demain جمهورية الغد,
Je ne pense pas qu'il y ait un seul tunisien qui ne soit pas pour l'indépendance de la justice, n'est-ce pas.
L'indépendance de la justice, c'est par rapport aux hommes à leurs bons vouloirs, à leurs faiblesses à leurs magouilles, etc.
Une justice indépendante est une justice totalement confiée à Dieu et rendue par des croyants craignant Dieu.
Ce n'est qu'ainsi qu'on peut diminuer les risques de dérapages.
 
 
#9 RE: Tunisie, pour réussir la transition démocratique il faut instaurer des valeurs
Ecrit par KHAMMOUS     02-05-2011 11:10
LECH VALEZA avait bien raison de parler de VALEURS pour une transition démocratiques.
Heureusement que nous les Tunisiens nous en avons des valeurs Aucun doute même si parfois on est agressif dans le débat surtout quand on est à court d'arguments. Dans ce cas il y a mieux que d'être agressif : c'est de repenser ses propres convictions et affirmations (Comme démagogue, se foutre de la gueule du peuple.. etc....).
OUI pour une JUSTICE juste,juste,
mais R2PUBLICAINE .C'est la seule justice qu'une Révolution dmocratique reconnaîsse.
Le reste n'est que vengeance et pire; une vengeance réclamée par de pseudo révolutionnaires qui n'avaient pas cessé de collaborer avec ZABA.
OUI A LA JUSTICE REPUBLICAINE NON A LA VENGEANCE NON AUX PROCES POLITIQUES
Je sais que c'est dur d'être démocrate au lendemain d'une Révolution mais je n'ai pas l'intention de m'arrêter à dénoncer ses dérives
Je ne suis pas du tout intimidé . Je ne l'avais pas été aux temps forts de la dictature . Mes écrits l'attestent...
POINT BARRE.
 
 
#8 Il ne peut pas y avoir d'ordre, de démocratie sans une justice bien ferme
Ecrit par Dédé     01-05-2011 22:58
Il ne peut pas y avoir d'ordre, de démocratie sans une justice bien ferme et bien exemplaire.
Les coupables, tout le monde les connait.
Pourquoi attendre alors?
Ceux qui ont profité su système zaba et qu'en contre partie, ils l'ont poussé àse présenter en 2009 et 2014, tout le monde les connait.
Pourquoi avoir pitié d'eux et de l'état d'âme de leurs enfants et de leurs familles?
La justice doit être neutre, sans couleur, sans odeur, sans sentiment.
Elle doit être indépendante et surtout juste, juste, juste!
Beaucoup d'innocents ont été tués injustement, beaucoup de citoyens ont été écrasés sans aucune raison valable sans que l'on tienne compte des souffrances des enfants, des mères et des familles.
Allons, Khammous, ZABA et sa bande te font pitié?
Arrête ta démagogie, arrête de te foutre de la "gueule" du peuple!
 
 
#7 Où est le texte du jugement
Ecrit par KHAMMOUS     01-05-2011 21:48
Dédé Sieur Dédé...
La Tunisie a fait une Révolution démocratique et non une campagne de destruction de familles tunisiennes entières avec son lot d'enfants traumatisés pour la vie, de mères et d'épouses outragées, de prestige des gens bafoué . Et tout cela parce que moi j'ai décidé qu'il en soit ainsi vu que mes biceps sont plus forts que les autres et que je gueule plus fort dans l'AVENUE
Derrière mon écran d'ordi j'ai décidé que tel est criminel parce que il n'est pas ou il n'a pas été à un moment donné du même avis politique que moi.
Et si quelqu'un OSE défendre le droit des citoyens présumés innocents jusqu'à leur culpabilisation je les accuse de pêcheurs dans de l'eau trouble .
Oubliant que je devrais au moins changer un langage qu'on a entendu pendant 23 ans comme:
°Eau trouble chirdhma fi kouloubhom maradh °°
Et pourquoi d'après vous je fais tout çà?? Ce n'est pas par méchanceté mais parceque je n'ai pas confiance à la JUSTICE de mon pays et je veux la remplacer par le linchage et le molestage populaire .
ET SURTOUT PARCE QUE J'AI BIEN
COMPRIS LE SENS DE LA DEMOCRATIE et que je refuse les procès politiques
 
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