Tunisie : Mustapha Ben Jaâfar annonce la fin imminente de la troïka

Publié le Jeudi 02 Janvier 2014 à 22:49
Mustapha Ben JaâfarA la veille du démarrage du débat de la constitution article par article à l’assemblée nationale constituante, demain vendredi 03 janvier, Mustapha Ben Jaâfar s’est dit confiant que les consensus jusque-là conclus au sein de la commission des compromis seront introduits dans le projet de loi fondamentale. Le président de l’ANC a tenu à dissiper les craintes et les suspicions quant à l’aboutissement des accords conclus. "Je n’imagine pas un instant que quelqu’un renie ses engagements. Les consensus vont enter en vigueur et seront introduits dans la constitution", a-t-il déclaré ce jeudi soir dans une interview accordée à al-Wataniya, évoquant "un engagement politique et moral qui réunit tout le monde".

Le président de l’ANC s’est dit optimiste quant à l’adoption de la constitution le 12 janvier avant la célébration du troisième anniversaire de la révolution.

Il a confirmé que le règlement intérieur de l’Assemblée sera amendé pour conférer un caractère légal à la commission du consensus. Ben Jaâfar n’a pas tari d’éloges sur la nouvelle constitution, qui répondra à toutes les attentes et les aspirations des Tunisiens, et qui de l’avis des experts, une fois les consensus introduits, sera une constitution formidable "دستور يعمل سة و ستين كيف".

"La constitution est celle des libertés, de l’indépendance de la justice et de la liberté d’expression et de la presse", a-t-il dit, ajoutant qu’"en cette période transitoire, où plusieurs secteurs requièrent des réformes radicales, on ne peut pas faire quelque chose d’idéale comme c’est le cas en Scandinavie". Le président de l’ANC rétorquait ainsi à une question sur les critiques adressées par des secteurs à l’instar de la magistrature ou des médias au projet de constitution. "Chaque secteur défend ses intérêts et tire la couverture à lui", a-t-il indiqué, insistant sur la place des libertés dans la nouvelle constitution. "L’article 48 consacré aux libertés est un pilier  de la nouvelle constitution et rompt avec la constitution de 1959".

Sur le devenir de l’Assemblée nationale constituante après l’adoption de la constitution, il a souligné que "dans la nature des choses, l’ANC transmet les clefs à l’Assemblée du peuple à l’issue des élections législatives". "Ce n’est pas dans l’intérêt du pays, qu’il y ait un vide, qu’il n’y ait pas un rôle législatif et qu’on laisse travailler seul le gouvernement et sans contrôle", a-t-il soutenu, en précisant : " Il a été toutefois convenu de rationaliser  le travail législatif et de limiter l’initiative législative des députés aux questions liées à la période constitutive, à l’instar du code électoral, de la justice transitionnelle... Les instances constitutionnelles seront, elles, laissées à l’Assemblée élue, à l’instar du conseil supérieur de la magistrature qui doit être mis en place dans les six mois (après l’installation de l’Assemblée élue), la Cour constitutionnelle dans une échéance d’une année", etc.

Ben Jaâfar a dit ne pas avoir d’inconvénient que la motion de censure contre le futur gouvernement, soit votée aux 2/3, afin de lui assurer une stabilité, appelant à laisser la liberté à Mehdi Jomaâ en matière de formation de son gouvernement, louant "le travail sérieux qu’il a accompli au ministère de l’Industrie et sa  capacité de management." Sur l’exigence du quartette et des partis de l’opposition quant à la nécessité à ce que le futur chef du gouvernement démarre d’une page blanche et change tous ses ministres, Ben Jaâfar estime que c’est l’intérêt du pays qui doit être pris en compte en la matière. "Il ne faut pas le contraindre, si une personnalité a fait son rôle comme il se doit dans un secteur donné, faut-il la changer juste pour le principe", s’est-il interrogé. A ses yeux, les conditions sine qua non en matière de formation du futur gouvernement, sont "l’indépendance et la compétence". "L’essentiel est que ce gouvernement soit à l’abri des tiraillements politiques", a-t-il prôné.

"Ce qu’on a fait en deux années, on aurait pu le terminer en une année et un mois ou deux mois, n’eût été le temps perdu dans les tiraillements. On est en campagne électorale depuis les dernières élections, et cette campagne ne s’est pas arrêtée", a-t-il fait constater.

Au sujet de la révision des nominations qui revient tel un leitmotiv dans les revendications de l’opposition, Ben Jaâfar estime que cette révision doit toucher les nominations dans les postes de décision et les hautes responsabilités  dans les entreprises publiques, même celles effectuées en 2011 par le gouvernement de l’époque. "Toutes les nominations qui ont un impact sur l’aspect politique doivent être révisées selon les critères de compétence et d’indépendance". S’agissant des ligues de protection de la révolution, et de l’appel pressant de les dissoudre, le président de l’ANC a appelé "à appliquer la loi avec fermeté contre celui qui l'enfreint, ou qui entrave l’action des rivaux politiques, en vue de rassurer toutes strates de la société et de sécuriser l’opération électorale".

Il a estimé possible la tenue des élections avant l’été en mai ou juin prochain, laissant la latitude à l’instance électorale, en la limitant un peu, de donner la date des prochaines échéances électorales.

Pour Ben Jaâfar, la polémique suscitée par le fonds de la dignité est "une tempête dans un verre d’eau". Toute en exprimant ses réserves sur "la forme, l’emballage et la précipitation" avec lesquels le fonds de la dignité a été présenté, il estime que "l’idée est bonne". "Si elle a été  faite avec calme et après concertations, les choses auraient passé normalement sans faire du bruit", a-t-il considéré.

Mustapha Ben Jaâfar a reconnu la fin imminente de la troïka. "La troïka est une coalition gouvernementale, qui va se terminer dans une semaine ou une dizaine de jours (ndlr avec la démission du gouvernement d’Ali Laâridh). Il a annoncé que son parti procédera à l’évaluation de cette coalition, de "cette expérience de gestion commune du pouvoir," pour décider de ces éventuelles futures alliances. A ses yeux, "si la Tunisie a réussi et est restée comme la dernière bougie dans le printemps arabe, c’est grâce aux alliances et aux consensus".

Ben Jaâfar a estimé plus probable qu’Ettakatol se présentera seul et défendra sa bannière lors des prochaines élections.  Sur sa présence à l’ANC après l’adoption de la constitution, il a réitéré qu’il ne s’accroche pas au fauteuil et que le jour où il sent qu’il a terminé sa mission et qu’il n’a plus rien à faire, il partira.
H.J.






 

Commentaires 

 
+1 #1 Deux tunisies, deux destins..
Ecrit par fidelepress     06-01-2014 09:23
Deux tunisie..deux destins..
Dans l'article 6 qui bani à juste titre "l'accusation gratuite d'apostasie à autrui " ne devrait-on pas le compléter à juste titre par "le banissement de l'accusation malintentionnée et diffamatoire à autrui par des termes comme "terroriste intellectuel /opérationel que vient de proférer monsieur Samir à l'encontre de son collègue et également les termes comme "intégristes" " islamistes" sans aucune raison valable et qui peuvent porter atteinte à l'image et à la personnalité? Pourquoi " deux poids deux mesures alors qu'en même temps on nous parle de "liberté de conscience dans un autre article: une liberté totale pour les uns et une liberté partielle d'expression pour les autres.. Comme s'il était bcp plus acceptable de critiquer et de rejeter les valeurs de l'islam que de critiquer le comportement de ceux qui s'acharnent sur l'islam.. Et pour être bien vu et bien apprécié (quitte à se mettre éventuellement sous la colère du divin) le monde "intellectuel" et les responsables politiques se rangent derrière les intégristes laïques qui ont déformé le sens du vivre ensemble en laïcisme et qui critiques et rejettent indirectement et sans cesse cette religion sans retenue et sans se soucier des conséquences... Quel troc! ..alors que la plupart ont appris le verset "Wa mane lam yahkoum bimaa anjalallaahou fa oulaa ika houmouzzaalimoun".. C'est pas étonnant de voir que c'est l'opposition( pourtant minoritaire) qui dirige l'ANC face à ce enahda de plus en plus laxiste et trangisant
 
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