Tunisie, Moncef Marzouki appelle l'opposition à faire montre de fair-play

Publié le Mardi 13 Décembre 2011 à 11:19
Moncef Marzouki, arborant le V de la victoire. Par son discours d’investiture, Moncef Marzouki, président de la République élu, affiche la rupture au niveau du fond et de la forme. Enfilant un burnous beige, sur un costume gris clair, sans cravate ; le nouveau président a commencé par prêter serment devant le tout Tunis réuni au sein de l'hémicycle, pour passer par la suite à prononcer un discours rassembleur et engagé, où il est remonté aux origines de la construction de l’Etat moderne postindépendance en Tunisie, rappelant les dérapages de ce processus  vers les dérives dictatoriales, et monolithiques.

Le nouveau président se dit pleinement conscient de la tâche colossale qui l’attend, "l’histoire nous jugera, aussi bien en cas d’échec qui sera perçu comme une trahison contre notre peuple, qu'en cas de réussite dont on sortira grandi", souligne-t-il en substance.

Le quatrième président de Tunisie fait un flash back pour se souvenir de la première assemblée constituante postcoloniale, celle qui a engagé l’histoire de la construction de l’Etat moderne en Tunisie, "si ce n’était cette première assemblée, nous ne serions pas là aujourd’hui", admet-il.

Marzouki s’attarde sur  l’œuvre de Bourguiba, qui a jeté les bases de l’Etat moderne à travers différents leviers, dont l’éducation, l’émancipation de la femme, l’amélioration du niveau de vie des Tunisiens, etc, indique-t-il.

En épargnant Bourguiba des critiques, le chef de l’Etat élu pointe les dérives dictatoriales survenues pendant son ère, à cause des éléments de son régime. "Ceux qui ont tenu les rênes du régime politique vers la fin et qui ont institué le monopartisme et le culte de la personnalité ; ont nié le caractère pluraliste de la société, refusé l’alternance pacifique au pouvoir, rejeté les réformes demandées par l’opposition nationale modérée". "N’eût été la loyauté de certaines personnalités au sein de l’Etat et de l’administration, nos institutions se seraient effondrées".

"Le despotisme a atteint son apogée avec le régime déchu", rappelle-t-il, énumérant la série noires des actes de répression survenues pendant ces années de Plomb, avec des milliers de détenus politiques, des familles détruites, le feuilleton des procès politiques ayant touché les islamistes, les nationalistes, la gauche, etc.

"Cette répression a transformé la Tunisie en une terre d’où l’on veut fuir, et non où l’on souhaite se rendre", souligne-t-il en substance, évoquant le phénomène de la "la Hargua" (immigration clandestine) avec ces jeunes qui se hasardent en mer, pour fuir un pays qui n’a pas réussi à leur fournir le pain et la dignité. "Comment rattraper les erreurs du passé et prévenir un retour du despotisme sous toutes ses formes", s’interroge Moncef Marzouki, en relevant que "cela passe par la mise en place d’institutions solides et pérennes permettant la construction d’une République démocratique et d’une société pluraliste et modérée, où prévalent les valeurs de la justice et de l’égalité".  "Les défis sont à la mesure de l’ampleur de la destruction commise par la dictature", ajoute-t-il.

"Nous sommes tenus de réaliser les objectifs de la révolution, de préserver la stabilité, de lutter contre le chômage, d’accélérer la mise en place des réformes urgentes et de ne pas se hâter à engager les réformes structurelles, de protéger les droits des employés et des employeurs, de trouver le juste équilibre entre le questionnement et le jugement d’un côté, et la réconciliation de l’autre, de protéger les femmes portant le Niqab, le voile et les femmes non-voilées, de garantir la sécurité sans menacer les libertés, de rassurer les personnes inquiètes....", déclare-t-il.
 
Le nouveau président appelle ses détracteurs, sans les citer, "à éviter la vindicte et la vengeance", rappelant que les nouvelles autorités en Tunisie représentent la volonté populaire. Il exhorte chacun à remplir son devoir, indiquant qu’il n’y a pas lieu de faire tout maintenant. "Cette période est celle de la mise en place des fondements, nous allons semer pour cueillir les fruits des efforts par la suite".

"La responsabilité du gouvernement est de gagner la confiance des gens", admet-il en promettant "de rompre avec le passé et de plancher en priorité sur les dossiers de familles des martyrs et des blessés de la révolution, ainsi que sur la mise en place des mécanismes de la justice transitionnelle".

Le nouveau chef de l’Etat s’adresse à l’opposition pour lui demander "de procéder à une évaluation rigoureuse de l’action du gouvernement, mais de faire montre de fair-play et d'être une partie de la solution et non du problème".

"Je suis le Président de tous les Tunisiens", affirme-t-il, annonçant sa décision de démissionner de toutes ses responsabilités au sein du Congrès pour la République (CPR). "Je ne ménagerai aucun effort pour instaurer des concertations continues tant avec le gouvernement qu’avec l’opposition, et de préserver les institutions de la République". Ce militant de longue date pour la promotion des droits de l’Homme s’engage à traduire dans les faits le respect des principes de la déclaration universelle des droits de l’homme, et à préserver les droits de la femme non seulement le statut personnel, mais ses droits socio-économiques.

Le nouveau Président dit entamer sa mission avec un bon moral, rendant hommage à son prédécesseur Foued Mebazaa ; au Premier ministre Béji Caïd Essebsi et à son gouvernement sortant, tout en soulignant le rôle joué par l’institution militaire dans la protection de la révolution.

"Les réussites qui nous attendent sont le prolongement des réussites cruciales déjà réalisées", dit-il, ajoutant que "nous n’avons d’autre choix que de réussir, pour éviter tout risque d’une contre-révolution ou d'une autre révolution se déclenchant dans les poches de pauvreté".

Le nouveau président ne joue pas les cassandres et avoue ne pas pouvoir prédire comment les choses vont évoluer mais il se dit confiant, priant à la fin avec des larmes pour les martyrs et les blessés de la révolution, pour la Palestine, le Yémen, la Syrie, la Libye…histoire de dire que ces rêves et son engagement dépassent les frontières pour embrasser toute la région arabe, lui l’instigateur de l’idée de l’Union démocratique arabe.

H.J.


 

Commentaires 

 
-5 #14 RE: Tunisie, Moncef Marzouki appelle l'opposition à faire montre de fair-play
Ecrit par hammadi     15-12-2011 11:47
A quand les portraits 3*4 partout de moncef marzouki ? ou est madame leyla marzouki ?
 
 
+2 #13 @ GNET
Ecrit par tounssi     14-12-2011 09:22
Pour ceux qui rédigent les articles à GNET : Vous commencez à revenir à l'époque de ben ali où on adule un président. 5 articles qui se suit sur Moncef Marzouki. Tant que vous y êtes, mettez le fond d'écran de votre site avec la photo de Marzouki. je ne suis pas contre marzouki mais yéziw blé tbandir. Vous faites honte aux Tunisiens.

NDLR
Comme vous pouvez le constater tous ces articles se rapportent à l'actualité, ça n'a rien à voir avec du tbandir comme vous dites. Merci.
 
 
+2 #12 Marzouki Marionnette
Ecrit par alfalfa     13-12-2011 22:35
Marzouki a trahi ses principes, toutes ses années de militantisme et tous les Tunisiens pour un poste fantoche en s'alignant avec Ennahdha et le despotisme de Jebali et le Mollahisme de Gannouchi. Fi
 
 
+2 #11 les reines du pouvoir!!
Ecrit par riad     13-12-2011 19:15
au 4ème paragraphe ligne 3 de l'article: les reines du régime politique!! Il s'agit bien sûr des "rênes" et non des reines, un lapsus qui remet en scène feue Wassila et l'autre reine déchue leila!

NDLR
C'est corrigé, merci.
 
 
+4 #10 RE: Tunisie, Moncef Marzouki appelle l'opposition à faire montre de fair-play
Ecrit par qqun     13-12-2011 17:49
@Zico
J'ai eu beaucoup d'estime pour ce personnage et je crois encore qu'il est de loin un des plus intellectuel sur la scène politique et on n'a qu'a l'entendre s'exprimer aussi bien en arabe qu'en francais pour s'en rendre compte.

parler juste pour parler ou c'est le contenu qui vous laisse s'en rendre compte. Moi , personellement, je ne me rend pas compte , et personnellement , ca m'arrange un Marzouki sans prorogatives.

et ce que je me rends compte est que Marzouki est un activiste de premiere classe et un politicien de la derniere classe.

@Lecture :
Ces declarations malhonnetes et ses discours qui debordent ne m'encourage pas a le lire. En plus, il n'a meme pas passer le premier test de negociation avec Ennahdha ... Et s'il vous plait , ne dites pas qu'on l'attaque a cause de ses coutumes et ses apparences. Je suis du Sud Tunisien et je n'epargne pas Mr Marzouki des critiques ... Sais tu pourquoi ? Simple, car il doit influer la vie de 10 millions d'ames ... tu realises ???

Bcp de Tunisiens ne confondent pas la competence et la morale . Ces deux qualites ne sont toujours pas reunies. Ce qui est bien de le savoir ... mais ce qu'ils ne savent pas, c'est que si on pretend la politique , la competence et la morale sont des prerequis.

En plus, la morale , meme au sein d'une religion, est un concept flou et son attribution n'est pas automatique , meme et surtout sur soi-meme.

La morale est tout simplement la conscience de l'homme. Elle peut etre negative comme elle peut etre positive. Dieu seul peut la mesurer.

On ne sait pas si la morale se degradera petit a petit face a des adversaires nuisibles , ou la personne non competente s'eclipsera et laissera des gens incompetents et mal-honnetes s'occuper de ce qu'il ne peut pas faire ...

Ce que je demande a Mr Marzouki est de ne plus faire des declarations malsaines ... et etre un vrai democrate comme il le pretend ...

Une belle regle que je m'initie pour etre un vrai democrate , et meme un vrai musulman :
Ne jamais pretendre la morale ... On ne le sais pas ... Dieu seul le sait.
 
Ces commentaires n'engagent que leurs auteurs, la rédaction n'en est, en aucun cas, responsable du contenu.