Tunisie : Les grandes lignes de la loi de finance 2017

Publié le Vendredi 28 Octobre 2016 à 15:50
Nidaa Tounes a organisé ce vendredi avec l’International Republican Institute une journée d’étude autour du projet de loi de finance 2017 qui est actuellement en cours d’examen au sein de la commission des finances à l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP).

Sihem Nemssia, directrice générale des études et de la législation fiscale au sein du ministère des Finances, a passé en revue les principales nouveautés de ce projet de loi, ayant fait couler beaucoup d’encre à cause notamment de certains points qui ne font pas l'unanimité.

Dans le volet d’appui à l’investissement, le projet de loi prévoit une ligne de financement d’une valeur de 250 millions de dinars, destinée aux petites entreprises dont l’artisanat, les petits métiers, les activités agricoles et à caractère environnemental.

La deuxième disposition consiste à faire baisser le taux d’imposition pour les entreprises qui sont introduites en bourse. « Nous savons qu’actuellement les entreprises qui désirent s’introduire en bourse, bénéficient d’une baisse d’impôt de 5% passant de 25% à 20%, qui est valable pour 5 ans. Ce qui est nouveau, c’est que cette année, il est question de faire baisser ce taux de 25% à 15%. Cette baisse est applicable aussi bien pour les anciennes introductions qu’aux nouvelles introductions », a expliqué l’experte.

Pour les entreprises exportatrices, qui sont exonérées d’impôt pendant 10 ans, et qui depuis le 1er janvier 2014 sont sujettes à un impôt de 10%, Sihem Nemssia explique que ces entreprises qui ont déjà commencé à exporter avant la parution de cet impôt continueront à le faire, en étant exonérées, jusqu’à la fin de la période d’exonération de 10 ans. « Mais les entreprises qui ont commencé à exporter à partir du 1er janvier 2014, sont sujettes à l’impôt de 10% », a-t-elle expliqué.

En raison de la crise économique et de la conjoncture, mais aussi en raison d’autres facteurs exogènes, le ministère des Finances a rendu le paiement de l’impôt, pour ce genre d’entreprises, comme étant optionnel pour les entreprises qui ont le droit d’en être exonérées. « Il est vrai qu’il existe des PME en difficulté, qui ne peuvent pas payer d’impôt, mais il existe aussi des entreprises off shore dont le pays d’origine exige qu’elles paient leur impôt si elles sont exonérées dans le pays d’accueil. Un impôt qui peut être beaucoup plus élevé que celui appliqué en Tunisie », a clarifié la responsable du ministère.

Le projet de loi a prévu aussi de redistribuer la charge fiscale de manière plus équitable entre tous les contribuables.

Sihem Nemssia a expliqué que le barème de l’impôt n’a pas été réformé depuis 1990, et qu’il était nécessaire de le réviser en fonction de la conjoncture.

Il est devenu nécessaire, selon elle, de faire appliquer un nouveau barème pour remédier à certaines inégalités évidentes. Elle rappelle l’exonération introduite en 2014, aux personnes gagnant moins de 5000 dinars par an, mais sans que cette tranche de rémunération ne fasse partie du barème d’imposition. « Cette exonération a créé un problème réel. Des personnes gagnant légèrement plus que 5000 dinars ont vu leurs revenus amputés de 525 dinars d’impôt, créant beaucoup de disparités », a-t-elle indiqué, avant d’ajouter que certains se sont plaints, car ceux qui gagnent moins, sont plus avantagés que ceux qui gagnent plus.

La nouveauté apportée dans  le projet de loi 2017, est que cette exonération pour les personnes physiques et morales sera appliquée pour toutes les personnes concernées quelque soit l’activité exercée. Cette généralisation sera d’un coût de 900 millions de dinars, et pour équilibrer, le législateur a prévu d’ajuster les tranches et les taux, et de plafonner les frais professionnels qui sont de 10% pour pouvoir minorer le coût de la généralisation de l’exonération.

Le nouveau barème tel que mentionné dans la loi de finance 2017, aura selon elle, un impact positif sur les personnes dont le revenu annuel est au dessus de 5000 dinars, mais dont le salaire mensuel n’excède pas les 1400 dinars. Elle explique que ces personnes, connaitront une hausse de leur salaire mensuel.

La TVA passe de 12 à 18 % sur les voitures et services Internet

Concernant la TVA, le nouveau projet consiste à aller dans le sens de diminuer le nombre de taux de TVA, soit vers l’élimination du taux de 12%, en ne gardant que le 6% et le 18%.

Le ministère des Finances a prévu de faire baisser sur trois ans, le nombre de produits imposables au taux de 12%. Les sociétés de transport de marchandises et de produits agricoles sont passées de 12% à 6%, ainsi que les cahiers scolaires et les véhicules dédiés au transport en commun.

Les activités qui passeront du taux de 12% à 18% sont essentiellement les importateurs de véhicules touristiques et les entreprises de produits informatiques et de services internet.

Toujours dans le cadre de l’ajustement fiscal, le ministère a instauré un frais d’enregistrement complémentaire de 4%  pour les biens qui font l’objet de donation ou de vente et dont la valeur excède les 1 million de dinars. Sont exclus de cette disposition les biens destinés à une activité économique. Le projet prévoit aussi l’introduction d’un impôt de 1000 dinars pour les particuliers qui possèdent une piscine.

Dans le cadre de la redistribution de la charge fiscale pour les activités libérales, le projet de loi fiscale de 2017  prévoit d’introduire une redevance fiscale pour toutes les affaires traitées par les avocats. « Cette redevance est une avance déductible de l’impôt sur le revenu. Il faut savoir qu’il payait déjà les acomptes provisionnels, qui sont des avances d’une valeur de 30% de l’impôt due de l’année précédente. Si la nouvelle loi est appliquée, il n’y aura plus cette avance », a expliqué Sihem Nemssia.

Au sujet des médecins, elle a indiqué que pour évaluer leurs revenus, il leur sera demandé de mentionner leur identifiant fiscal sur leurs ordonnances. Les cliniques seront amenées à préciser dans leurs factures la valeur des prestations médicales et paramédicales dont a bénéficié le patient.

Pour parer à l’évasion fiscale, le ministère a pensé à la création d’une police fiscale dont la mission est de relever les contraventions fiscales sur tout le territoire et de chercher les contrevenants, tout en aidant le procureur de la République durant les poursuites, et ce en plus de la mission des agents de contrôle fiscal.

Pour la levée du secret bancaire, qui était prévu dans la loi de finance 2014, la nouveauté est que les conditions initialement mentionnés, comme le redressement approfondi,  ont été annulées. 

Aïssa Hidoussi, expert en Finance a réagi à ce projet de loi, en critiquant "le manque de stratégie et de vision dont il se caractérise". "Il s'agit de dispositions radicales qui visent à renflouer les caisses mais qui n'auront pas d'impact sur le long terme", a-t-il dit. Il a par ailleurs critiqué, l'impôt complémentaire de 4% sur la donation des biens fonciers, estimant que dans le reste du monde on opte plus pour l'encouragement du marché immobilier, en baissant l'impôt, évoquant la réaction de la Banque mondiale qui place la Tunisie à la tête des pays qui possèdent le taux d'imposition le plus élevé pour les transactions du genre.
Chiraz Kefi


 

Commentaires 

 
#1 RE: Tunisie : Les grandes lignes de la loi de finance 2017
Ecrit par Agatacriztiz     01-11-2016 18:33
Pour les avocats, c'est très simple, chaque enrolement d'affaire devra faire mention de l'identification fiscale de l'avocat, chaque paiement du client devra être assujetti à la délivrance d'une facture, le tout sera exigible semestriellement pour poursuivre les affaires judiciaires avec vérification fiscale du total des règlements des clients dès la pronociation du jugement, et rebelote en cas d'appel ou de cassation.

Pour les médecins, c'est encore plus simple, c'est l'afhésion de tous les tunisiens à la "couverture maladie universelle" et l'obligation des médecins dr remplir les feuilles de soins, en mentionnant notamment leur identification fiscale et les honoraires, et hop...
 
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