Tunisie : Le vote au parlement et les alliances futures

Publié le Jeudi 04 Décembre 2014 à 17:47
Mohamed Ennaceur, installé au perchoir. La nouvelle Assemblée des représentants du peuple s’est dotée ce jeudi 04 décembre de son président, et de ses deux adjoints, un triumvirat issu de trois partis différents, avec Mohamed Ennaceur (Nida Tounes) au perchoir, Abdelfattah Mourou (Ennahdha), en tant que 1er vice-président, et Faouzia Ben Fodha (UPL) comme 2ème vice-présidente.

Cette élection a été précédée par un arrangement entre les grands et moyens groupes parlementaires ; personne ne s’en cache. Mohsen Hassan, chef du groupe de l’Union patriotique libre (UPL), a déclaré ce matin que son parti a mené des concertations avec les deux principales entités parlementaires, qui ont débouché sur des accords.

Dans une déclaration aux médias, le député d’Ennahdha Sahbi Atig a confirmé qu’un accord est intervenu, dont le but, a-t-il dit, d’avoir "un paysage pluriel au sein de l’assemblée", récusant qu’il y ait eu un consensus politique global, ou que cela ait un quelconque lien avec la position de son mouvement de la présidentielle.

Khemaïs Ksila a exclu, à son tour, toute alliance avec Ennahdha, signalant que le vote est intervenu selon les rapports de force au sein du parlement. "Le Front populaire reste l’allié naturel de Nida tounes, avec qui il partage un projet sociétal moderniste et démocratique", a-t-il déclaré à Mosaïque.

Si l’on croit ces déclarations, l’entente Ennahdha/ Nida est occasionnelle, et ne concerne guère les autres processus qui restent à conclure, en l’occurrence, la formation du futur gouvernement et le deuxième tour de la présidentielle. Nida a ratissé large pour installer son candidat au perchoir, en obtenant l’appui d’Afek Tounes. Celui-ci a reconnu l’existence d’un accord bilatéral préalable sur le soutien de Mohamed Ennaceur, excluant toute entente sur Abdelfattah Mourou.

Le front populaire est resté, lui, en dehors des compromis parlementaires, et n’a pas réussi à faire élire sa candidate, Mbarka Aouinia Brahmi au poste de premier vice-président. La situation aurait pu être différente, si la veuve du défunt Mohamed Brahmi était candidate au poste  de 2ème vice-président.

Autant le tableau est clair s’agissant du vote de ce jeudi 04 décembre à l’hémicycle, autant les choses baignent dans le flou quant à la configuration politique en devenir, lors des cinq ans à venir. Personne n’est en mesure de dire aujourd’hui qui sera au pouvoir, et qui sera dans l’opposition. Inquiétant à l’heure où la commission parlementaire des finances, devant être présidée par l’opposition, doit être formée pour plancher sur la loi de finances avant le 10 décembre.

Nida Tounes exclut, à ce stade, toute alliance avec le mouvement islamiste, étant plutôt enclin à étendre sa future coalition gouvernementale à Afek, au Front populaire et selon toute vraisemblance à l’UPL. Ennahdha dit et redit ses dispositions à être soit au pouvoir, soit dans l’opposition.  

Les alliances se font et se défont selon la position de chaque parti  envers le deuxième tour de la présidentielle. Afek a déjà annoncé son soutien à Béji Caïd Essebsi. Le front populaire et l’Union patriotique libre lui emboîteraient le pas, à se référer à leurs déclarations respectives.

Le mouvement islamiste prendra sa position envers le 2ème tour de la présidentielle lors de la réunion de son conseil consultatif, Majless al-choura, la plus haute autorité entre deux congrès. Il semble s’acheminer vers la même attitude affichée au premier tour, celle de la neutralité. Le cas échéant, et sous les pressions de Nida Tounes, il sera amené à clarifier sa position, en levant tout soupçon d’ambivalence. Toujours est-il qu’indépendamment du mot d’ordre donné par la direction, et quelque ferme soit-il, il est peu probable que les électeurs et sympathisants d’Ennahdha soient de simples moutons de panurge.
H.J.