Tunisie : Le parcous semé d'embûches des jeunes lauréats tunisiens

Publié le Jeudi 12 Septembre 2013 à 17:23
Des compétences tunisiennes livrées à elles mêmes, Leur seul tort est d'être brillantes.Badreddine Messaoudi est un jeune, originaire du Gouvernorat de Sidi Bouzid. Ayant obtenu son baccalauréat en 2009 avec mention, il fût orienté vers l’Institut supérieur de l’Informatique et des Mathématiques de Monastir, section Mastère appliqué en informatique de gestion. Cette année là son père, travailleur journalier de son état, est tombé malade et a été hospitalisé pendant deux mois. Ce qui a contraint Badreddine à retourner auprès de sa famille et à passer une année blanche. L’année d’après, il demande une réorientation vers Sidi Bouzid, pour des considérations sociales, et l’obtient. Trois ans plus tard, le jeune homme obtient sa licence avec la meilleure moyenne de sa section sur tout le territoire tunisien, et reçoit le prix du Président de la République.

Lors d’une conférence scientifique organisée ce matin par «l’Association pour la Paix et la Prospérité » sous le titre « Jeunes compétences scientifiques marginalisées en Tunisie après la révolution ; cas et solutions », Badreddine a relaté son histoire avec beaucoup d’amertume. voulant terminer son cursus dans une école d’ingénieurs, il se heurte au refus de l’administration de l’enseignement supérieur, car ne remplissant pas le critère de non redoublement.

Son seul tort a été de ne pas avoir retiré l’ inscription de la première année. « J’ai rencontré le ministre de l’enseignement supérieur au bout de la cinquième tentative, et il m’a promis de régler mon problème…mais j’attends toujours », a-t-il ajouté.

Un autre cas, celui de Hayet Omri. Elle est née à la délégation de Regueb du gouvernorat de Sidi Bouzid et a obtenu en 2007 son mastère d’ingénieur en chimie industrielle, et son doctorat en Chimie appliquée en février 2013 avec mention très honorable. Hayet Omri possède à son actif deux médailles d’or aux Olympiades des inventeurs qui ont eu lieu cette année à Hammamet et a été reçue par le chef de l’Etat, pour avoir réalisé quatre inventions. La plus brillante d’entre-elle consiste en un procédé pour faire extraire l’acide phosphorique, à faire diminuer la production de phosphogypse, et la purification de l’acide phosphorique des résidus, pour l’utiliser dans l’industrie pharmaceutique et agroalimentaire. Ce procédé fera gagner 11.5 millions de dinars à la Tunisie chaque année, d’autant qu’il l’allègera des déchets organiques, nécessaires à cette invention. Bien qu’elle ait reçu le prix présidentiel lors de  la journée du savoir et avoir été saluée par l’Union européenne, pour son invention, Hayet Omri se voit refuser récemment le droit de bénéficier d’un poste de maitre-assistant dans l’enseignement supérieur. « Bien que mon parcours soit brillant, comme peuvent l’attester mes travaux, j’ai été recalée suite à mon exposé devant le jury…j’ai essayé de contacter les responsables, mais aucun ne pouvait me donner une raison convaincante, qui expliquerait ce refus de faire partie du corps enseignant…dès que je mets dans mon CV que j’ai donné des conférences à l’international, on m’en veut presque », a relaté Hayet, avec dépit.

Mourad Khemiri, originiaire de Sfax est lui aussi inventeur. Il est à l'origine d'une invention saluée voire primée à l'étranger, à savoir un dispostif mécanique pour aggrandir les machoires chez les enfants souffrant d'une dyscroissance maxilaire. Son seul souhait est de continuer à travailler dans le service de stomatologie pour pouvoir terminer ses recherches. Une requête, malheureusement, refusée par les autorités compétentes.

Mourad Rouissi, professeur de Sociologie à l’université de la Manouba  a expliqué ce phénomène d’absence d’égalités des chances par plusieurs facteurs. «L’inégalité des chances commence au début du cursus scolaire, où souvent des familles aisées se lient d’amitié avec les hauts responsables des écoles de leurs enfants, et qui à coup d’influence ou de financements, font que des classes  spéciales soient formées, réunissant les meilleurs éléments pour que les enfants de ces familles en fassent partie …c’est d’ici que commence l’inégalité des chances…Les autres enfants accumulent les lacunes et sont souvent médiocres en langues…ils arrivent donc aux concours avec l’impossibilité de s’exprimer correctement, et se trouvent refoulés…peut-on prendre le risque de donner à quelqu’un qui n’a pas le niveau, la charge de former les prochaines générations ? », a-t-il expliqué, avant d’ajouter que parfois même le jury émette des jugements subjectifs, à propos des candidats. « Il suffit qu’un membre de jury n’aime pas sa façon de se tenir, de parler, de s’habiller ou la région dont est originaire le candidat, pour qu’il soit rejeté », dit-il. Selon lui, évoquant les grands penseurs en sociologie, le système répond aux exigences « d’une classe dominante, qui se réserve l’avantage d’un avenir prospère, à ses enfants ». Par ailleurs, l’Etat est lui-même responsable de cette injustice. Les écoles, universités, et centres de formation et de recherche que l’on trouve dans les grandes villes ne sont pas les mêmes que l’on trouve dans les régions de l’intérieur. C’est sans parler des routes, des conditions de vie, des chances d’embauche, de la santé…etc.

Mais lorsque Badreddine Messaoudi ou Hayet Omri ont fait fi de tous ces obstacles sociaux pour briller dans le domaine de la science, la balle revient dans le camp de l’Etat qui a instauré  un système rigide, qui ne prend pas en compte les cas particuliers pouvant apporter une valeur ajoutée certaine à la Tunisie. « Dès que l’on sort du moule, on se retrouve rejeté », ont-il tous répété. Dès que les candidats ne répondent pas à certains critères établis à l’avance, et quelque soient leurs compétences effectives, ils sont laissés pour compte. Un responsable du ministère de l’Enseignement supérieur, Sofiène Mansouri a pour sa part indiqué son département planche sur l’amélioration de la grille d’évaluation lors des concours d’accès à l’enseignement, mais reconnait que ce sont les mentalités qui devraient évoluer, pour donner davantage de chance aux cas particuliers. 

Chiraz Kefi

 

Commentaires 

 
#3 transparence
Ecrit par klay     18-09-2013 10:07
Encourager les stratèges à réfléchir...
Appliquer les outils de transparence dans tous les domaines...
Apprendre,la démocratie la justice etc, des autres même des états ennemis...
Pour réussir un changement: Commencer par soit même et par la tête de la pyramide.
 
 
-3 #2 de quoi on parle
Ecrit par air     13-09-2013 20:51
Que les personnes dont vous parlez aient fait leurs preuves dans l'invention ou autres choses ne fait aucun doute. Mais de quel droit dites vous qu''il y a injustice ou corruption ou quelques autres insinuations ? Savez vous ce que ces personnes ont répondu durant leurs concours de recrutement, ce qu''elles ont dit, leur expérience pédagogique, l'étendue de leur Il est connaissances de base en scientifiques? Le jury est souverain. Il est ridicule de faire croire qu''il y a un problème de laisser-pour compte ou d'origine. Celà ne s'est pas encore vu. Bien sur les parcours classiques sont plus faciles à juger mais tous les dossiers sont consciencieusement examinés. Aux candidats de se remettre en question. Les candidats sont bon mais le jury doit choisir les meilleurs pour le bien de nos enfants et de notre pays.Arrêtez de medire sans savoir.
 
 
#1 RE: Tunisie : Le parcous semé d'embuches des jeunes lauréats tunisiens
Ecrit par Royaliste     13-09-2013 13:18
le ministre ne s'occupe que des priorités !!!

niqab ou pas niqab, c'est tout ce qui interesse notre ministre.

dommage pour ses jeunes dont le seul tord est d'etre gouvernés par des incompetants
 
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