Tunisie, "le gouvernement est faible, et l’opposition non-constructive" |
Publié le Samedi 26 Mai 2012 à 10:35 |
"Le gouvernement a des problèmes de casting, de sureffectif et un manque de How to do. De l’autre côté, il y a une opposition qui n’est pas constructive, et qui n’a pas de programme", dit Abdessatar Mabkhout, économiste. Ce consultant auprès du cabinet international de conseil financier, PriceWaterHouseCoopers, minimise les effets de l’abaissement de la note de la dette de la Tunisie par Standard & Poor’s, qui a, à ses yeux, "un impact indirect". Interview. Qu’est-ce que signifie l’abaissement de deux crans, par Standard & Poor’s de la note de la dette de la Tunisie ? Est-ce grave ? Franchement, c’est exagéré de dire que c’est grave. Cet abaissement serait grave dans un pays qui fonctionne et qui se finance par les marchés. Plus le risque pays est élevé, plus le taux d’intérêt augmente. Dans le cas de la Tunisie, la majorité des dettes, soit les 2/3 sont contractés auprès des banques et des pays, seul un 1/3 à peu-près provient des marchés internationaux. L’impact est donc indirect. Les économistes sont excités et communiquent mal par rapport à la situation. Des pays comme la France qui sont très liés aux marchés de capitaux sont affectés par un abaissement de la note par les agences de notation. En Tunisie, nous sommes des conservateurs, nous n’avons pas de bourses, tout est contrôlé. Quant aux IDE (investissements directs étrangers), ils se financent ailleurs, ils ramènent l’argent de leur pays essentiellement, et non de notre pays. Cette dégradation de la note ne contribue-t-elle pas à envoyer un signal négatif à nos bailleurs de fonds, en l’occurrence les banques est les pays, qui pourront nous sanctionner en appliquant des taux d’intérêts plus élevés à nos emprunts ? Je ne le pense pas. Nos emprunts sont contractés dans le cadre de contrats de longue durée. Sur ce registre, il y a le durable et le fluctuant. Le Scoring impacte le fluctuant, et non les engagements qui sont dans la durabilité. Hussein Dimassi, ministre des Finances, a déclaré que l’abaissement de la note par S&P n’est pas fondé sur des critères objectifs. Partagez-vous son opinion ? Personnellement, je ne peux pas critiquer les agences de notation, pour la simple raison que la Tunisie donne à l’heure qu’il est une image catastrophique. Et là, je parle du gouvernement et de l’opposition qui ont montré leurs limites en termes de compétence. Tout autant que les partenaires sociaux : UTICA et UGTT. Tous sont à blâmer. Les problèmes de la contrebande, des biens mal acquis… ne sont pas résolus. Le nettoyage des banques, de la banque centrale, des structures de la douane, de la fiscalité n’a pas encore eu lieu. Les acteurs politiques font passer leurs intérêts égoïstes et électoraux aux dépens de l’intérêt du pays. Pour le gouvernement, il y a de la faiblesse, de l’incompétence, et l’éparpillement des centres de décision, sans compter que les membres de la troïka ne sont pas complémentaires. Il y a aussi au sein du gouvernement, des problèmes de casting, de sureffectif et un manque de How to do (comment on va faire). De l'autre côté, il y a une opposition qui n’est pas constructive, et qui n’a pas de programme. Normalement, une opposition doit s’opposer par rapport à la réactivité du gouvernement à ses propositions, or, il n’en est rien. Il y a donc une prestation médiocre tant de ceux qui sont dans le pouvoir, que de ceux qui sont dans l’opposition. Dans ce laxisme ambiant, il y a un réveil des mafieux, une multiplication de voyous et de délinquants économiques. La situation inspire donc réellement inquiétude Je demeure optimiste. Il faut se projeter dans une perspective de 3 à 4 ans. On va réussir à redémarrer le pays. Actuellement, dans cet environnement de turbulence, de non-gouvernance, et de non-Etat, nous avons un taux de croissance de 1 à 1,5 %. Je considère que le modèle tunisien a une limite physique. Avec nos ressources locales, on ne peut pas dépasser un taux de croissance de 2 à 3 % au maximum. Or, ce taux est insuffisant pour répondre au stock de chômage. Nous devons séduire les IDE à forte valeur ajoutée. La Tunisie est un petit pays, son marché local est étroit, elle ne peut trouver son salut que dans les exportations. Il faudrait changer de type de formation, et de type d’emplois ; développer une économie de savoir, de technologie et de créativité. Cela nécessite un travail en profondeur, il faut agir sur deux fronts : Etre dans le modèle ancien, tout en essayant de stabiliser le pays pour envoyer un signal rassurant aux IDE, et attirer les IDE nouveaux investissant dans la technologie, la créativité et la Tunisie de demain. L’emploi est tributaire de croissance, et la croissance ne peut se réaliser qu’avec la création de valeurs et de richesses. Comment jugez-vous la décision de recruter 25 000 agents dans la fonction publique, sur le court terme ? Recruter 25 000 agents dans la fonction publique, mais pour faire quoi ? Ces postes d’emploi doivent répondre impérativement à des besoins réels. On peut créer, notamment 10 mille postes de policiers et de militaires pour garder nos frontières ; 5 mille postes de magistrats, puisque l’appareil judiciaire est miné par la corruption ; des postes de gendarmes économiques.... Selon vous, quelles sont les mesures urgentes à prendre pour sortir de l’ornière ? Il faut que les politiques au pouvoir et dans l’opposition fassent preuve de plus de sérieux, et cessent de faire de la surenchère. Il faut appliquer la loi immédiatement à ceux qui font des grèves et sit-in anarchiques et bloquent les routes ; à ceux qui ne paient pas les impôts. Les hommes d’affaires doivent investir. L’UTICA doit établir une charte, une sorte de déclaration sur l’honneur pour pousser les hommes d’affaires à investir, à payer l’impôt, et exclure les gens qui volent et magouillent. L’UGTT doit faire son travail loin de toute politisation et cesser de tomber dans la revendication pour la revendication. On sait que la centrale syndicale a réalisé des études économiques, mais elle n’en parle pas et ne cesse d’exiger des augmentations. L’UGTT doit participer à réformer le pays. Le gouvernement s’est rétracté sur l’idée d’une année blanche, sans augmentations salariales. Pensez-vous que le maintien d’une telle décision aurait aidé au redressement de la situation ? Le moment est grave, et c’est tout à fait compréhensible que l’idée d’une année blanche soit posée, mais le gouvernement n’est pas fort pour imposer ses décisions. Personnellement, je suis pour l’application de la suppression de 4 jours de salaire pour tout le monde, mais on ne peut pas être gentils avec les employeurs et demander aux employés de faire des sacrifices. Certains appellent à un remaniement ministériel, y voyez-vous une utilité ? Nous avons besoin d’un gouvernement de salut. Oui à un remaniement ministériel dans le cadre de la troïka. Il faudrait mettre un vrai économiste à la tête du gouvernement ; changer le gouverneur de la banque centrale ; réduire le nombre de ministres, et créer un super-ministère de l’économie et des finances. Le gouvernement remanié aura principalement un mandat économique, qui consiste à présenter une vision 2040 de la Tunisie, car ce qui va attirer les IDE, c’est notre capacité à voir loin. Ce gouvernement doit parvenir à promouvoir une économie de rupture ; changer en profondeur le modèle de financement de l’économie, le mode de gestion sécuritaire du pays, et promouvoir l’open Gov ; tout doit être publié dans une totale transparence. Les Tunisiens ont le droit de savoir ce qui est en train d’être fait. La deuxième mission a trait à la rédaction de la constitution, l’assemblée constituante doit avancer sérieusement là-dessus. C’est seulement ainsi, qu’on parviendra à rétablir la confiance des opérateurs mondiaux dans notre pays. Propos recueillis par H.J.
|
Commentaires
Ecrit par Montygolikely 29-05-2012 19:33
Ecrit par tunisi4ever 29-05-2012 17:56
la seul chose qui est correcte et que l'opposition post election est mediocre on a besoin de nouveaux visage et sang le plus vite.on n'a pas besoin de ceux qui dise seulement non en veux savoir c'est quoi l’alternative et c'est le moment car ceux au pouvoir ne savent pas leur tetes de leur queues.
Ecrit par Royaliste 28-05-2012 03:52
je m'en fou de l'opposition et de son programme, je veux que mon gouvernement élu TRAVAIL.
dire que la dégradation dela note de la Tunisie n'est pas grave est une bêtise : 30% de nos dettes vont couter plus chere , et monsieur trouve ca pas grave :pire que Mr Dilou
Ecrit par TUNISIAN 27-05-2012 22:06
TRAVAIL..TRAVAIL..TRAVAIL ET TRAVAIL….
SECURITE..SECURITE.. SECURITE ET SECURITE….
TOUT LE RESTE VIENDRA AUTOMATIQUEMENT.
Ecrit par samir 27-05-2012 19:15