Tunisie : Le gouvernement d’union et les énergumènes de la politique

Publié le Vendredi 22 Juillet 2016 à 13:39
Habib EssidLe gouvernement d’Habib Essid n’obtiendra pas la confiance au parlement, au cours de la plénière du 30 juillet prochain. Les partis représentés à l’Assemblée, toutes sensibilités confondues, ont fait part en majorité, d’une manière explicite ou implicite, de leur intention de ne pas voter le renouvellement de la confiance au locataire de la kasbah sortant et à son équipe.

En dépit de la certitude du résultat, Essid aura sauvé son honneur, en recourant à un procédé constitutionnel pour sortir forcément par la grande porte, sans céder aux menaces et pressions. C’est une manière de consolider l’édifice démocratique, qui reste fragile en Tunisie, face à la délinquance politique rampante.

Les propos relayés par Habib Essid, dans l’interview qu’il avait accordée mercredi soir à la chaîne Atassia, sur les menaces qu’il avait reçues d’être maltraité, s’il ne démissionne pas "كان ما تستقيلش نمرمدوك ", sont scandaleux, d’autant plus qu’ils interviennent après une révolution censée  mettre fin à ce genre d’arbitraire.

Les termes utilisés par l’intermédiaire à l’endroit de l’un des chefs de l’exécutif, et d’un symbole de l’Etat, n’ont pas été puisés dans le vocabulaire politique, mais dans le Jargon de la rue. Cela dénote de l’état de dégradation généralisée dans lequel se trouve le pays, auquel contribue grandement un climat politique malsain, pour lequel la démocratie n’est qu’un alibi, et le pluralisme un paravent. 

A ce jour, il y a un consensus assez large autour de la formation d’un gouvernement d’union nationale. Neuf partis dont ceux de l’actuelle coalition et trois organisations nationales ont adhéré à l’initiative présidentielle, en signant le document de Carthage sur les priorités du futur cabinet. 

Le fait que les partis de sa coalition lui retirent leur soutien devra donner lieu au départ et non au maintien d’Habib Essid, cela va de soi, mais tout est dans la manière d’opérer ce départ. Les mécanismes existent et sont prévus par la constitution, l’un, celui de la démission, a été récusé par l’intéressé, étant, à ses yeux, inopportun et injustifié. Il est de son plein droit de recourir à un autre, en l’occurrence celui de solliciter de nouveau la confiance du parlement, du moment où la loi fondamentale le lui permet.

La démocratie est une affaire d’institutions, de lois et de principes. Si on lui ôte ces attributs pour les remplacer par des raccourcis malvenus, cela risque de la fragiliser, sinon d’en saper les fondements, a fortiori, que notre démocratie est naissante. Ses chances d’être consolidées, équivalent à celles d’être affaiblies.

La petite phrase lancée à Habib Essid qui dépasse l’offense de sa personne pour offenser l’Etat et le peuple, augure mal de la capacité du gouvernement attendu à prendre les choses à bras le corps et à avoir les coudées franches pour régler les difficultés épineuses auxquelles le pays est confronté, dans la mesure où il aura à agir avec une épée de Damoclès au dessus de la tête.

Un pays dont les hauts responsables sont exposés à ce type d’intimidation, et dont la mission et objectifs s’opposent à ceux des forces occultes qui tirent les ficelles derrière les rideaux, ne pourra aspirer relancer sa croissance et son développement et répondre aux attentes de son peuple. Commençons par mettre ces énergumènes hors d’état de nuire, et à moraliser, un tant soit peu, la vie politique, avant de préjuger de la réussite ou de l'échec du prochain gouvernement d’union, investi en théorie de la mission colossale de redresser le pays, mais que la pratique risque de rendre inopérant, et aux pas cahoteux.
H.J.

 

Commentaires 

 
#2 RE: Tunisie : Le gouvernement d’union et les énergumènes de la politique
Ecrit par Montygolikely     23-07-2016 12:08
Tant qu'on abandonnera pas la triste mentalité que c'est "l'autre qui est la cause de tous les problèmes" on avancera pas d'un pouce dans ce pays.
Kennedy a dit un jour "Je ne dois pas me demander ce que le pays peut faire pour moi mais ce que je peux faire pour mon pays".
Tant que les dirigeants tunisiens ne se seront pas ancrés ce principe dans leur tête, tout risque d'être voué à l'échec...
 
 
+1 #1 RE: Tunisie : Le gouvernement d’union et les énergumènes de la politique
Ecrit par Avis     22-07-2016 20:39
Cet article est l'un des plus pertinenet que j'aie eu a lire sur le sujet. Merci.
 
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