Tunisie : Le Front populaire propose un budget de l'Etat alternatif

Publié le Jeudi 06 Mars 2014 à 17:32
Hamma Hammami a présenté  ce matin aux médias, le projet d’un Budget de l’Etat « alternatif », élaboré par un groupe d’experts en finances, en économie et en droit dont il a donné une copie au ministre des Finances aujourd’hui même.

« Mehdi Jomâa a déclaré lors de son interview du 03 mars, que le pays passe par une grande crise…il a même parlé d’une crise aigue, lors de la réunion avec les partis politiques, le 1er mars…Il a fait le diagnostic de la situation, mettant en garde contre un avenir incertain si l’on n’y trouve pas de remède. Tandis que le gouvernement passé avait dit que les choses allaient bien, qu’il n’existait pas de grandes craintes. Et c’est Mehdi Jomâa qui a raison… », a déclaré ce matin, Hamma Hammami, leader du Front populaire, imputant la responsabilité à la Troika, qu’il accuse de «mauvaise gouvernance », de « mauvaise gestion », et «d'incompétence ».

Dans sa version du budget de l’Etat, le front populaire se base sur six principes : Pas d’austérité, pas d’endettement et pas d’ingérence de pays tiers, compter sur les ressources internes, effectuer un emprunt national pour garantir l’indépendance nationale, et redonner à l’Etat son rôle d’investisseur et d’employeur.

Lotfi Ben Aissa, diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure et expert en Finances publiques et en fiscalité a présenté les points saillants du projet. Soit, suspendre l’endettement, le temps de faire l’inventaire des toutes les dettes extérieures, majorer les dépenses réservées au développement de 40% (soit 30% du total des dépenses), et créer près de 61 mille postes de travail. Mais aussi, annuler la recapitalisation des banques publiques d’une valeur de 500 millions de dinars, et annuler les décisions de supprimer la compensation dans l’attente d’une solution globale.

Il prévoit également de réserver 400 millions de dinars pour les allocations du chômage, qui profiteront aux 170 mille diplômés du supérieur. «Une prime de 200 dinars, qui sera bien entendu accordée selon certains critères. Les bénéficiaires doivent se soumettre à certaines conditions pour pouvoir en profiter », a-t-il expliqué.

Les agriculteurs verront par ailleurs, leur dette annulée. Une dette qui s’élève à environ 400 millions de dinars et qui concerne 100 mille agriculteurs.

Les ressources du budget proposé, sont à 71%, fiscales (20 500 MD), 9% de ressources non fiscales (2500 MD), 17% de l’emprunt national (5000MD) et 3% des comptes de trésorerie.
Les dépenses seront par ailleurs, allouées, aux salaires à raison de 36% (10 500MD), les subventions 16% (4600 MD), les allocations sociales 2% (600MD), les allocations pour le chômage 1% (400MD), les dépenses pour le développement 28% (8150 MD) et l’emprunt national 10% (2950MD).

Le total des ressources, serait ainsi égal au montant des dépenses, soit 29 000 mille dinars.

Selon la loi de finance 2014, les ressources fiscales s’élèveraient à 17081 MD, le projet du Front Populaire propose d’annuler les dispositions fiscales de la loi de finance qui généreraient 336 millions de dinars, et d’annuler la baisse du taux d’impôt pour les sociétés qui devait passer de 30% à 25%.

En échange, il préconise d’introduire un impôt exceptionnel pour l’année 2014, d’un taux de 5% sur les bénéfices générés en 2013 par les sociétés des secteurs suivants :

Télécommunications, Grande distribution (hypermarchés), banques, assurances, et secteur de l’énergie. Générant ainsi des ressources de 496 Millions de dinars, selon les prévisions des experts dépêchés par Le Front populaire.

Il  y aurait également une révision de la fiscalité imposée aux personnes physiques. « Cette dernière disposition fera baisser les ressources de 420 Millions de dinars, car nous avons proposé que  la tranche qui gagne entre 0dt et 5000 dinars et qui répond actuellement au régime de 15%, soit exonérée d’impôt, ce qui correspondrait à près d’un 13ème mois de gagné pour ces personnes », a expliqué Mahmoud Mtir, avocat et expert en fiscalité.

Il a exposé les manières de combattre l’évasion fiscale, tout en réexaminant le régime forfaitaire : «Il faut réétudier la loi sur le secret bancaire et mettre de l’ordre dans le secteur…il existe des gens qui gagnent plus d’argent qu’ils ne déclarent, et l’administration fiscale ne peut pas accéder aux comptes bancaires des personnes. C’est une question que nous devons traiter de manière sérieuse », a-t-il dit. Dans ce projet de loi, le Front populaire préconise également la réactivation de la loi incitant à s’acquitter de la dette fiscale, et à renforcer les équipes de contrôleurs fiscaux, de douaniers et des agents receveurs.  Ces dispositions permettraient de générer 3500 millions de dinars.

Tout en préservant les ressources non fiscales prévues dans la loi de finance de la Troika, ce projet de budget propose de faire écouler une partie des véhicules administratifs, pour collecter près de 500 millions de dinars de recettes.

Le reste des recettes proviendraient des obligations à court terme de 2500MD, et d’un  emprunt obligataire national de 2500 MD.

Ce projet s’appuie par ailleurs, sur une série de mesures pour le développement. Parmi elles, la création d’une raffinerie de pétrole à Skhira, d’une capacité de 8 millions de tonnes de pétrole brut par an. Son coût s’élèverait à 1800 MD.

Un projet de réhabilitation de l’usine de métallurgie à Menzel Bourguiba pour porter son niveau de production à 400 mille tonnes. Ce qui créerait 1000 emplois directs et 1500 emplois indirects.

Un autre projet : Moderniser la Société nationale de Cellulose et de Papier Alfa à Kasserine, pour un coût de 100 millions de dinars, pour faire augmenter la capacité d’embauche de 1200 à 1800 postes, et créer une usine de fabrication de verre à Bouarada du Gouvernorat de Siliana. « Nous disposons d’une qualité de sable inégalée, qui est le produit de base pour le verre.  Nous devons créer notre propre unité de production au lieu d’exporter notre silice vers l’Italie qui produit du verre et nous l’exporte contre de la devise »,  a dit Hassine Rahili, ingénieur et expert en développement durable.  Un projet qui coûterait 200 MD et permettrait la création de 400 emplois directs et 600 emplois indirects.

Le projet de loi comporte également d’autres projets industriels, à l’instar d’une usine de ciment dans le gouvernorat de Gafsa et une unité de recyclage de métaux, à Kairouan.
Chiraz Kefi

 

Commentaires 

 
#1 RE: Tunisie : le Front populaire propose un budget de l'Etat alternatif
Ecrit par Montygolikely     06-03-2014 21:21
Un véritable programme électoral avant l'heure...
 
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