Tunisie : Le conseil de l’IVD fustige le projet de loi sur la réconciliation

Publié le Mardi 21 Juillet 2015 à 12:25
"L’instauration de la Justice transitionnelle en Tunisie, en vertu de la loi organique n’o 53 du 24 décembre 2013 est une exigence de la révolution de la liberté et de la dignité, celle du 17 décembre 2010-14 janvier 2011, dont la revendication principale est de s’affranchir des dispositifs de corruption et de despotisme, comme il s’agit d’une exigence, et de l’une des garanties de la transition démocratique saine, prévue dans la constitution de 2014, tant dans son préambule et que dans ses dispositions transitoires, notamment le point 09 de l’article 148 ayant contraint l’Etat à appliquer le dispositif de justice transitionnelle dans ses différents domaines, dans les délais impartis", c’est ce que souligne  le conseil de l’Instance Vérité et Dignité, réuni hier lundi 20 juillet 2015, au sujet du projet de loi organique portant sur les dispositions relatives à la réconciliation économique et financière, sujet de l’initiative législative de la présidence , adoptée par le conseil des ministres, du 14 juillet 2015.

Après un premier communiqué rendu public au lendemain de l’adoption en conseil des ministres de l’initiative législative présidentielle, l’Instance Vérité et dignité livre à l’issue de la réunion de son conseil, hier lundi, une position critique et désapprobatrice dudit projet de loi, qu’elle juge attentatoire au principe de justice transitionnelle.

"La justice transitionnelle constitue, conformément aux principes et standards internationaux, un processus complet et indissociable devant conduire à la compréhension et au règlement du passé des violations des droits de l’Homme dans leur acception la plus globale, et ce à travers la révélation de la vérité, le questionnement, la reddition des comptes, la réparation et la réhabilitation des victimes, de manière à instaurer des garanties empêchant que de telles violations ne se reproduisent, à contribuer à réformer les institutions, les législations, à parvenir à la réconciliation nationale escomptée et à consolider la construction de l’Etat de droit", relève l’IVD dans un communiqué dont une copie est parvenue à Gnet.

"Le projet de loi sur la réconciliation, sujet de ladite initiative législative, vide le dispositif de justice transitionnelle de sa substance, et mène à abandonner ses plus importants mécanismes en matière de révélation de la vérité, de questionnement, d’arbitrage, de réconciliation et de réforme des institutions, comme il garantit l’impunité pour les auteurs de corruption financière et de détournement de deniers publics", s’insurge l’instance de Sihem Bensédrine.

Ce projet de loi a été élaboré sans la consultation des institutions et structures en rapport avec le sujet, particulièrement l’Instance Vérité et Dignité, d’autant plus qu’il y a été stipulé la participation des membres de l’IVD dans la composition de la commission d’arbitrage, dans la limite de 1/3. Ce choix, outre son inopportunité juridique, est en contradiction avec la qualité des membres de l’Instance, étant élus au sein d’un appareil indépendant. Il constitue par ailleurs un double-emploi en matière d’attributions, avec la commission d’arbitrage et de réconciliation au sein de l’IVD, en vertu d’une loi antérieure, souligne-t-elle. 

Pour l’IVD, les dispositions de l’initiative de BCE sont aux antipodes de la constitution, et "ne sont pas en harmonie avec les engagements de l’Etat en matière de lutte contre la corruption, et de mise en application des lois y inhérentes, à l’instar de la convention onusienne de lutte contre la corruption, adoptée par la Tunisie. Ledit projet de loi ne garantit pas l’impartialité et l’indépendance de la commission d’arbitrage proposée, étant une commission purement administrative, dépendant de l’appareil exécutif, de par sa composition et sa supervision", indique-t-elle.

Le mécanisme d’arbitrage et de réconciliation dans les affaires de corruption financière et les crimes économiques relève des missions de la commission d’arbitrage et de réconciliation relevant de l’IVD, dont la mise en place a été entamée conformément aux articles 45 à 50 de la loi organique sur la justice transitionnelle, dans le cadre d’un dispositif juridique efficace permettant la réconciliation ou l’arbitrage, ce qui rend inutile toute formule parallèle à ce sujet, estime l’instance.

L’IVD plaide pour une stratégie nationale de lutte contre la corruption, préalable à l’instauration d’un climat propice aux affaires et à l’investissement, qui ne saura être "résumée dans le règlement de dossiers particuliers de personnes impliquées dans des violations financières et de détournement de l’argent public". "Le développement économique réel exige la réforme des législations et des institutions ayant contribué à instaurer le dispositif de corruption, et à ruiner l’économie nationale tout au long de la période couverte par la loi sur la justice transitionnelle".

L’instance Vérité et Dignité considère le projet de réconciliation, comme étant "un message négatif envoyé aux investisseurs locaux et étrangers, et à l’ensemble des pays et des institutions financières et internationales qui exigent qu’il y ait un climat propice, sans corruption financière et administrative, reposant sur la suprématie de la loi et l’indépendance de la justice".
Gnet

 

Commentaires 

 
-1 #2 attentatoire?
Ecrit par eshmoun     25-07-2015 09:59
je n'en sait rien ! ce que je sais et que j'ai constaté c'est qu'elle (la "ci-devant" présidente)s'y connait en matière d'actes attentatoires dont on peut lui attribuer une large panoplie depuis qu'elle évolue dans les eaux troubles de la période post-révolutionnaire ! alors à quand le retour de manivelle ?
 
 
-1 #1 amnistie ou amnésie générale ?
Ecrit par Royaliste     21-07-2015 16:00
je repose la même question : pourquoi la Tunisie a accordée une 2 eme chance aux terroristes des années 1986-2010 en adoptant une amnistie générale et ne veut pas donner une 2eme chance aux corrompus?

Qu'est ce qui est plus grave?
1- égorger un tunisien
2- voler les caisses de l'Etat

a mon avis, les énergies doivent se concentrer sur le présent, combattre la corruption généralisée qui empoisonne la vie des tunisiens et qui entrave le développement et le terrorisme quotidien.
 
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