Tunisie : La solution n’est ni dans la rue, ni dans la chute du gouvernement !

Publié le Jeudi 27 Décembre 2018 à 16:31
Le gouvernement Chahed le 12 novembre 2018 à l'ARP, lors d'une plénière de vote de confiance. La Tunisie a désespérément du plomb dans l’aile, ses problèmes continuent à s’accumuler face à une résignation mélangée à l’impuissance. L’année finit dans la difficulté, comme elle a commencé. Et la nouvelle année s’annonce difficile, comme celle qui l’a précédée. 2019 est pourtant censée apporter une certaine embellie, à la faveur d’une trêve fiscale promue par le gouvernement, la loi de finances de 2019 n’introduit pas de nouveaux impôts ni pour les particuliers, ni pour les entreprises, n’a-t-il cessé de marteler, dans un désabusement ambiant.

La loi de finances telle qu’adoptée le 10 décembre dernier dans un hémicycle agité est d’ores et déjà amputée, et sera probablement promulguée dans une version incomplète. L’article 36 sur la levée du secret professionnel passe à la trappe, retoqué qu’il était par l’instance provisoire de contrôle de constitutionnalité des projets de loi. Les professions libérales menées par les avocats ont obtenu gain de cause, le gouvernement a échoué à les mettre au pas sur ce point, et son argumentaire de devoir s’en tenir à ses engagements internationaux et à la réglementation de l’OCDE n’est pas passé. Pourtant, il aurait suffi qu’il y ait concertation au préalable avec les professionnels pour éviter cette levée de boucliers, et toute cette contestation et perte de temps qui en ont découlé. 

La concertation et la coordination n’existent, hélas, que dans les slogans et les discours. La réalité est toute autre, avec des acteurs qui agissent, chacun, dans son petit coin, en vase clos, et selon ses propres intérêts. Une méthode génératrice de tensions et de bras de fer à n’en plus finir, c’est ce qui fait que les actions soient dispersées et l’attention détournée des questions de fond, qui attendent inlassablement des solutions.

Ce qui a manqué le plus au pays, au cours de ces huit ans, c’est cette capacité de se la jouer collectif, cette vision holistique des problèmes, cette propension à traiter les germes des conflits en amont, au lieu de se retrouver dans une impasse en aval.

Au cours des premières années de la révolution, on imputait cet état de fait à l’inexpérience, à l’immaturité, et à l’apprentissage démocratique qui ne pouvait se faire sans faux pas, et sans achoppements. Huit ans se sont néanmoins écoulés, et on n’a pas l’impression que les différents protagonistes de la scène sont en train de tirer les enseignements, de gagner en maturité, d’éviter de reproduire les mêmes erreurs, etc. Ce qui fait peur ce n’est pas tant l’immensité des difficultés qui rongent le pays, mais c’est l’absence de cette volonté collective et déterminée à en venir à bout et à éviter au pays de sombrer davantage. 

Et dire qu’un large pan de l’opposition cherche à envenimer encore le climat, et à attenter à ce semblant de stabilité, en soutenant que la solution passe par l’éviction du gouvernement, et que sa chute passe par la rue.

Miser sur l’agitation dans un contexte aussi critique, et faire tomber le gouvernement à quelques mois d’échéances électorales cruciales constituent le comble de l’irresponsabilité politique. Et si l’on y ajoute que ces voix n’ont absolument aucune alternative que le fait de souffler sur les braises, et de mener au chaos, on se retrouve face à un puérilisme politique aggravé par un déficit démocratique et patriotique.
Gnet