Tunisie : La majorité change de camp, mais le statu quo reste de mise !

Publié le Mardi 12 Janvier 2016 à 17:39
La présence de Ghannouchi au congrès de Nidaa confirme le maintien du statu quo. La Tunisie n’est pas en période postélectorale, elle a pourtant une nouvelle majorité parlementaire, et un gouvernement largement remanié. La majorité issue des urnes n’a pas résisté longtemps, le quinquennat amorce un nouveau tournant, à peine une année après son démarrage.

L’actuelle situation politique est quelque peu inédite. Dans d’autres pays, après un chamboulement aussi profond du paysage parlementaire, le président de la république aurait procédé à la dissolution de l’Assemblée et appelé à des élections anticipées. Ce n’est nullement le cas, les choses sont maintenues en l’état ; la présence de Rached Ghannouchi le week-end dernier au congrès de Sousse, côte à côte avec Béji Caïd Essebsi, ne fait que le confirmer.

Bien qu’il ait perdu la majorité, Nidaa se considère toujours comme étant le parti majoritaire, faisant valoir les résultats des législatives d’octobre 2014. Même argument invoqué par Ennahdha qui exclut toute intention de revendiquer la première place au palais du Bardo, affirmant par la voix de son numéro un Rached Ghannouchi,  que ce sont les urnes qui permettent de reclasser les partis, et non les crises et les différends survenus dans telle ou telle formation politique.   

Tout ça n’est pas conforme aux usages politiques, mais a des explications. La première tient au fait que le consensus est tacitement érigé en règle inviolable, au nom de la stabilité nécessaire pour sortir le pays de l’ornière. La deuxième tient à l’attitude de Nidaa qui refuse de renoncer à son premier rang, même s’il l’a perdu de facto, considérant son double-victoire aux scrutins de 2015 suite à une large adhésion populaire à son projet, plus fort que la crise ayant mené à son implosion.  La troisième a trait à la position d’Ennahdha qui continue à faire profil bas, et n’affiche pas, pour le moment, une quelconque envie de tirer profit du changement de l’équilibre des forces, trouvant dans le statut de deuxième parti, une position confortable, qui lui attire le minimum d’ennuis. A fortiori que la conjoncture régionale reste toujours en sa défaveur, que l’expérience du pouvoir, alors à la tête de la troïka, était beaucoup plus émaillée d’épines, que de fleurs, et que le mouvement islamiste donne toujours l’impression d’être en quête de reconnaissance, notamment dans des milieux populaire et politique qui lui sont hostiles.

L’ensemble des ces facteurs font que les changements politiques rapides et profonds ne vont pas donner lieu à un nouveau rapport de force, notamment dans l’immédiat et en apparence. La situation serait peut-être appelée à évoluer à l’issue du congrès d’Ennahdha prévu au printemps prochain. Si le mouvement islamiste parvient à régler ses discordes internes, à concilier ses différents courants, et à sortir uni et renforcé de ses dixièmes assises, là, l’on pourra s’attendre à ce qu’il soit plus tenté d’exercer toute son influence et de peser de tout son poids sur le cours des choses.

Entretemps, c’est le statu quo politique qui sera de mise. Le large renouvellement de l’équipe gouvernementale, opéré suite au remaniement ministériel du 06 janvier dernier, est plutôt voué à apporter un changement de forme et de style que de fond.

Le gouvernement Essid 2 est officiellement entré en fonction ce mardi 12 janvier, après avoir prêté serment ce jour même, et obtenu hier le vote de confiance du parlement. Il est attendu sur de nombreuses urgences, comme sur un changement de méthode et de cadence. Habib Essid a déclaré en mai dernier que son gouvernement ne pouvait-être évalué qu’au bout d’une année, c’est à cette échéance que le Tunisien allait commencer, selon ses dires, à percevoir les changements concrets. Côté évaluation, elle a été faite par le chef du gouvernement, après s’être rendu compte, de son aveu même, que certains ministres ne sont pas les hommes de situation. Côté changement concret, il n’y a guère de choix que d’être patient.
H.J.

 

Commentaires 

 
+1 #1 RE: Tunisie : La majorité change de camp, mais le statu quo reste de mise !
Ecrit par Royaliste     13-01-2016 05:16
Ca sera interessant de voir la position de ces nouveaux 'amis' lors des elections municipales prevues l'an prochain.

entre temps je me demande qui est le candidat a la présidence qui a recu du financement de l'étranger...
 
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