Tunisie, la lecture du Cheikh n’est pas fausse, mais révèle une phobie !

Publié le Jeudi 11 Octobre 2012 à 17:50
Rached Ghannouchi. La Tunisie ne connaît quasiment plus de trêve. A chaque fois que l’on commence à se rapprocher d’une ébauche de solution pour mettre fin aux tensions, et parvenir à la concorde nationale tant souhaitée, une crise éclate pour exacerber ce climat de suspicion et d’inquiétude qui règne dans le pays. Des vidéos-scandales, on en a connu pas mal depuis le 14 janvier ; elles ont nourri les tiraillements et semé la zizanie dans le pays. La toute dernière, celle du président d’Ennahdha, jette un pavé dans la mare. Sortie à quelques jours du 16 octobre, date à laquelle les partis politiques se sont donnés rendez-vous en vue d’établir une feuille de route, sous la férule de l’UGTT, pour la gestion de ce qui reste de la période transitoire, constitutive ; la vidéo vieille de huit mois, qui serait sur Youtube depuis avril 2012, est, selon le mouvement islamiste, truquée, et comporte des passages tronqués sortis de leur contexte.

Cela n’a, néanmoins, en rien calmé la polémique. Tout au contraire, les déclarations incendiaires et les pronostics les plus noirs ont été exprimés depuis hier, par médias interposés, sur les dangers qui guettent la Tunisie, et les plans qui se trament pour notre avenir. On parle d’une volonté de diviser le pays entre laïcs et musulmans, de l’avènement programmé d’une dictature théocratique, des tentatives d’Ennahdha d’asseoir sa mainmise sur les différents rouages de l’Etat, de son approche progressive dans l’application de la charia, de ses convergences avec les salafistes, etc. L’on ressent certes un malaise à juger à sa juste mesure le contenu de cette vidéo, pour sa non-fiabilité supposée, la lecture de Ghannouchi de la réalité -claire par certains endroits sur cet enregistrement- n’est pas toutefois tout à fait fausse. L’administration tunisienne n’est pas entre les mains des islamistes, et ne devrait pas l’être, car dans un pays démocratique, l’administration doit être neutre, impartiale, et se tenir de la même distance de tous les partis politiques. Ses agents doivent-être patriotes, et mettre l’intérêt suprême du pays au dessus de toute autre considération. Sinon, ce sera la porte ouverte à l’allégeance partisane, à l’imbrication parti/Etat, et au retour aux vieilles pratiques dont le peuple tunisien a souffert des années durant.

L’analyse du Cheikh laisse apparaître toutefois une phobie chez les Islamistes, envers un retour de manivelle. Les "Khouyanjia" (terme du dialecte tunisien pour désigner les islamistes) qui ont été désignés à la vindicte publique du temps de l’ancien régime, et bien avant sous Bourguiba, diabolisés, réprimés, marginalisés qu’ils étaient,  ne semblent pas prêts à oublier cet épisode noir qu’ils ont vécus, et pendant lequel, ils ont été persécutés, jetés en prison, condamnés à l'exil, leurs familles abandonnées, voire décomposées et détruites. Ces épreuves semblent les marquer à jamais, et créer en eux une certaine fragilité psychologique, qui les incite à se protéger d’un renversement de situation.

Cet état de fait s’illustre à travers leurs déclarations, dans les conciliabules ou en public, et leur politique de nominations exagérément basée sur l’allégeance. C’est là aussi où s’inscrit leur hostilité envers le mouvement Nidaâ Tounes, de Béji Caïd Essebsi, qui comporterait, selon leurs dires, "des éradicateurs" incarnés par des personnalités de gauche qui se sont tues, voire ont soutenu la politique de répression de l’ancien régime à leur encontre.

Les islamistes au pouvoir vivent avec tout cela, c’est lourd à porter indéniablement, mais il est temps qu’ils s’en débarrassent, et qu’ils évacuent ce passé lourd. Car, maintenant qu’ils sont au pouvoir, qu’ils constituent une force politique majeure dans le pays, qui aspire contribuer à la construction de la Tunisie nouvelle, il faut qu’ils soient forts, ouverts et s'adaptent réellement à la diversité de la société. A fortiori, qu’ils ont défendu dans leur programme la notion de l’Etat civil, démocratique et pluriel, où les principes de liberté, de justice et de droits de l’homme sont respectés. D’ailleurs, la notion de l’Etat religieux n’existe pas en Islam, le Calife Omar qui a bâti une civilisation islamique prospère, où règne la justice dans son sens le plus sublime, a instauré un Etat civil, fondé sur le principe de citoyenneté, où les droits de musulmans et non-musulmans sont respectés.

La Tunisie est un pays musulman par excellence et les Tunisiens sont profondément attachés à l’Islam. La contribution des partis islamistes n’est pas d’islamiser la société qui l’est déjà, mais de participer à la moraliser, de réconcilier les Tunisiens avec les règles de la morale et de bonne conduite, qui induisent civisme, respect d’autrui et du vivre ensemble, et attachement à l’intérêt suprême de la patrie. Ce sont ces valeurs mêmes, qui sont sanctuarisés en Occident, et dont, nous autres arabo-musulmans, faisons peu de cas.

La Tunisie est parfaitement réconciliée avec son mode sociétal basé sur la modération, la tolérance et l’ouverture sur l’autre. Elle aspire le promouvoir vers la progression du citoyen et son épanouissement, et non sa régression.

La révolution a donné de grands espoirs aux Tunisiens, mais ils n’ont pas cessé d’enchaîner les déconvenues depuis son déclenchement. Le peuple est de plus en plus en décalage avec son élite politique, et les préoccupations de l’un et de l’autre sont loin de concorder. Le politique cherche à préserver le pouvoir ou à y accéder, et le Tunisien aspire à un statut de citoyen à part entière, et à une vie décente. Les Tunisiens en ont assez d’être manipulés, de vivre dans une angoisse permanente, de dormir la nuit pour se réveiller le matin sur un nouveau scandale qui sape les volontés, et tue cette espérance naissante. Sortir cette vidéo en ce moment précis vise clairement à déstabiliser le pays, à torpiller ce processus transitoire, et à empêcher le pays de s’acheminer vers la construction d’un nouveau modèle démocratique pérenne.

A l’heure qu’il est, les Tunisiens sont suspendus à la date du 23 octobre, des voix s’élèvent pour prédire l’apocalypse...A-t-on fait une révolution pour tomber de Charybde en Scylla ? tout ça pour ça ! Il est temps que l’élite politique, dans ses différentes sensibilités idéologiques, se réveille et assume sa responsabilité historique devant le peuple tunisien et le monde entier. Non à la division . que l’on s’appelle Ennahdha, Ettahrir ou Nidaâ Tounes, unissons-nous …c’est notre seule voie de salut pour sortir de l’impasse et couper l’herbe sous les pieds des âmes malveillantes qui cherchent à nous entraîner dans la spirale de l’anarchie, et faire avorter ce rêve tunisien né un 14 janvier 2011.

H.J.


 

Commentaires 

 
#10 RE: Tunisie, la lecture du Cheikh n’est pas fausse, mais révèle une phobie !
Ecrit par MAN     16-10-2012 13:15
on dit "tomber de Charybde en Scylla" chère HJ.

Ndlr :
C'est corrigé, merci.
 
 
-1 #9 Arrétez la polymique!
Ecrit par Citoyen libre     15-10-2012 16:19
Il faut respecter les partis politiques. Ennahdha est un parti de la majorité (41% des élus). Ceux qui ne veulent pas Ennahdha, on les rappelle que Ennahdha a réussi dans le cadre de la troïka de rendre positif tous les indicateurs de performances du pays.
Les partis qui ont perdu les élection ne seront jamais au pouvoir tant qu'ils cherchent à détruire l'état tant qu'il n'est pas sous leur contrôle.
En fin, les partis de paille doivent arrêter de rendre la vie du citoyen difficile en exploitant la complaisance des média audio visuels!
 
 
+3 #8 Vraiment
Ecrit par HOR     13-10-2012 21:56
A ce point ! Qu’il n’a pas compris que la majorité ne l’aime pas ! Vraiment il faut être imbécile pour admettre une telle situation.
Gannouchi, occupe-toi de tes affaires privées STP. Les Tunisiens libres ne te veulent pas.
 
 
+4 #7 RIEN N A CHANGE
Ecrit par LE PATRIOTE     12-10-2012 15:10
Le fait que rached ghannouchi parle de l armee et la police de cette maniere , et le dit "salafiste" etait a sa gauche se tournait a gauche et disa"les armes " ( esslaa7) suffit de conclure que la theorie de prendre le pouvoir par foce est toujours dans sa tete ce qui justifie tout verdict prononce concernant les "5wenjiyya" des les annes 80 ....toute autre tracdiction des revelations de rached ghannouchi est une temptative de le sauver lui et ses allies de la colere du peuple tunisien connu comme "Kariiim"
 
 
+3 #6 le diable doit bruler définitivement en enfer
Ecrit par hannibal     12-10-2012 15:09
Ghannouchi le fourbe
Pour mieux se poser en victime, le Fourbe avait dénoncé une campagne de boules puantes.

Il jugeait là en fin connaisseur, puisqu’il en était le principal fabriquant, et premier exportateur.

ghannouchi est le principal ennemi de la Tunisie , débarrassons nous de lui et de ses acolytes et il sera plus facile de trouver le chemin de la réconciliation et du développement
Ce type doit être mis en résidence surveillée le temps de démonter tout son processus d'obscurantisation de tout un pays
 
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