Tunisie : La crédibilité de Youssef Chahed désormais tributaire de l’affaire Halk El Menzel

Publié le Lundi 03 Septembre 2018 à 16:32
Le limogeage du ministre de l’Energie, de plusieurs hauts cadres du ministère et la suppression de ce département en lui-même pour le rallier au ministère de l’Industrie continuent à agiter la scène politique et civile. L’opposition de Youssef Chahed s’est radicalisée et trouve dans cette affaire un motif supplémentaire pour s’en prendre à lui, en l’accusant d’avoir procédé de la sorte à des fins politiciennes.

De tous les chefs du gouvernement qui se sont succédé après la révolution, Youssef Chahed est celui qui aura provoqué les affaires les plus tonitruantes. Mais contrairement aux décisions qu’il avait prises en Mai 2017 d’arrêter des hommes d’affaires et des chefs de la contrebande et de les assigner à résidence en vertu de la loi sur l’état d’urgence, qui lui ont valu des soutiens sur la scène politique, outre une large adhésion populaire, ses décisions de vendredi dernier au sujet du ministère de l’Energie suscitent scepticisme et interrogations en milieu politique , et des réactions de soutien timides sur les réseaux sociaux, où l’on réclame de préserver les richesses naturelles, et de mettre un terme à la corruption et à la mauvaise gouvernance dans le secteur des hydrocarbures.  

La version présentée vendredi dernier par le porte-parole du gouvernement, sur les violations ayant entaché la concession du champ Halk el-Menzel, dont le détenteur serait dans l’illégalité depuis 2009 ne convainc pas. Des voix ont apporté la contradiction. L’ancien ministre de l’Industrie, et de l’Energie, Kamel Ben Naceur a déclaré ce lundi sur Express que la présidence du gouvernement était prévenue, dès l’expiration du délai de la concession, et qu’une consultation juridique a été menée à ce sujet jusqu’en 2015.

L’ex-ministre a encore ajouté que le gouvernement  a présenté le projet Hakl El-Menzel à la conférence Tunisia 2020, ce que l’investisseur tunisien a considéré, selon ses dires, comme un feu vert pour continuer à travailler.

Le Directeur Général de la société Topic, qui détient la concession d’exploitation du champ Halk El-Menzel, a déclaré sur Mosaïque que la durée d’exploitation s’étale sur à 50 ans. La concession arrive à son terme en 2029, avec l’approbation de la direction générale de l’Energie, a-t-il souligné, ajoutant que la société n’est pas arrivée au stade de la production et de l’exploitation du pétrole depuis la découverte du gisement en 1977.

Le gouvernement sera amené à se prononcer de nouveau et à faire toute la lumière sur cette affaire.

Et là, il y a deux hypothèses. La première est que Youssef Chahed parvienne à écarter les accusations le visant, et à prouver que sa décision de démettre de ses fonctions, le ministre de l’Energie et ses coéquipiers et de supprimer tout un ministère, est largement justifiée, n’a rien de politicien et s’appuie sur un dossier solide qui a été instruit au pôle judiciaire financier, et qui a montré de graves violations. Il aura ainsi renvoyé ses détracteurs dans les cordes, acquis en popularité et donner du fil à retordre à ceux qui veulent sceller le sort de son gouvernement, selon leurs propres conditions. Il en sortira gagnant et renforcé.

La deuxième hypothèse est qu’il ne saura pas défendre comme il se doit sa position, et donnera l’impression de s'être précipité. Et là, il confortera la position de ses nombreux détracteurs qui inscrivent cette affaire dans le cadre du conflit opposant le chef du gouvernement, au chef de l’Etat, et de la propension de Chahed de soigner son image et d’augmenter sa popularité en prévision des prochaines élections, chose qui le fragilisera.

A ce stade, de nombreux responsables politiques se sont prononcés et ont mis en doute les intentions de Youssef Chahed, et lui ont prêté des visées électoralistes. L’UGTT qui semble voir d’un mauvais œil qu’un ministre qui lui est proche, soit démis de ses fonctions de la sorte, affiche scepticisme sur les raisons ayant motivé cette décision.

Désormais, la crédibilité de Youssef Chahed et son avenir politique seront en grande partie, tributaires de cette affaire. Si l’enquête qu’il a lui-même ordonnée, et la justice confirment qu’il y a illégalité et transgression de la loi, le locataire de la Kasba sera celui qui aura frappé fort contre la corruption, la malversation, et les violations qui entachent le secteur pétrolier, et fait un pas concret pour préserver les richesses du peuple contre le pillage. 
Gnet

 

Commentaires 

 
+1 #1 RE: Tunisie : La crédibilité de Youssef Chahed désormais tributaire de l’affaire Hakl El Menzel
Ecrit par Agatacriztiz     03-09-2018 17:09
Lui au moins, ils les fout en tôle ou les vire séance tenante, ses prédécesseurs faisaient affaire avec eux ou les nommaient hauts responsables de l'Etat, c'est là où est toute la différence...
Qu'ils vérifient entretemps, au sein du Ministère de l'Energie, combien de concessions (de puits de pétroles, de carrières, etc.) sont en cours de validité et il risque d'y avoir des grosses surprises, à commencer par l'exploitation des carrières dont les matériaux sont destinées aux cimenteries, industries du gypse, de la chaux etc...
 
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