Tunisie : La consultation nationale sur la réforme de la fonction publique lancée

Publié le Lundi 10 Octobre 2016 à 16:30
A l’occasion du lancement de la consultation nationale portant sur la réforme de la fonction publique, ce lundi 10 octobre, le ministre de tutelle, Abid Briki a declaré ce matin que l’administration tunisienne regorge de compétences, arguant que lors de la révolution, l’administration tunisienne n’a pas flanché. Il n’en demeure pas moins qu’une réforme est necessaire, selon lui.

« La situation actuelle de la fonction publique est le reflet de choix antérieurs. Si le secteur n’est pas réformé, il restera la porte ouverte à la corruption et au clientélisme »,a-t-il declaré. Il a pris pour exemple, un entrepreneur qui désire lancer son entreprise et qui se heurte à une masse de procédures complexes, facilitant la corruption.  Briki estime que la  réforme de la fonction publique est un pas vers le principe de transparence, longtemps revendiqué.

«On prend l’exemple des recrutements, l’opacité qui plane dessus est aussi une porte aux interventions et au clientélisme. Une loi générale portant sur la fonction publique est aujourd’hui necessaire », a-t-il dit. Il a également évoqué la gestion des ressources humaines au sein de la fonction publique.  D’après le ministre, le nombre de fonctionnaire qui avoisine les 630 000 personnes, recrutées à travers plusieurs mécanismes  dont l’aministie générale ou le mécanisme 16, est mal réparti.

«Il ne s’agit pas de revenir en arrière, mais tous ceux qui ont rejoint la fonction publique alors qu’ils n’ont pas travaillé depuis longtemps, ont besoin de formation avant d’être réaffectés, car il existe des administations qui sont saturées alors que d’autres sont en manque d’effectif », a expliqué Briki.

Cette réforme vise également le système de promotion professionnelle. Selon le ministre, le système de promotion systématique devra être remplacé partiellement par un concours qui révèlera le mérite des fonctionnaire qui accèderont à la promotion. « Bien évidemment, on prendra en compte aussi l’ancienneté afin de créer un équilibre », a précisé le ministre de la Fonction Publique et de la Gouvernance.  Le ministre entend, par ailleurs, faire participer les syndicats et les parties sociales dans toutes ces décisions. 

Il est prévu par le ministère d’organiser des consultations régionales auxquelles peuvent participer la plus large représentation de la société, selon Briki. Après cela, une conférence nationale sera organisée pour faire un récapitulatif du projet, avant que la réforme ne soit mise sur les rails.

Abid Briki a relevé que ces réformes entamées ne sont pas dictées par les organismes financiers internationaux comme le FMI et la Banque Mondiale, mais émane d’un besoin interne et propre à la Tunisie.

« La Tunisie a besoin de réformes et lorsqu’on est amené à négocier avec les organismes en question, il faut que nous soyons dotés d’un climat stable qui nous permet d’accéder à nos aspirations », a-t-il dit.

Afin d’évaluer les résultats,  une commission d’évaluation, et la possible création d’un observatoire sont prévus dans ce projet de réforme, a indiqué Briki. « Cet observatoire décèlera les failles et proposera des solutions. Il créera une dynamique interne », a-il dit.

"250 000 nouveaux fonctionnaires ne sont pas necessaires à l’administration"
Le directeur général de la Fonction Publique, Lotfi Khadmi, a évoqué la question des recrutements exceptionnels qui ont survenus après 2011. Il parle de 250 000 nouveaux fonctionnaires, qui ne sont pas toujours necessaires à l’administration. « Ces recrutements ne répondent pas toujours aux besoins réels et puis la répartition géographique  connait un certain déséquilibre », a-til dit. Il préconise la redistribution des fonctionnaires, qui a été l’objet d’un décret gouvernemental au début de cette année.

« Cette révision doit se faire dans deux sens. D’abord rééquilibrer le nombre de ressources humaines entre l’administration centrale, la région et la localité, et ensuite rééquilibrer le nombre de fonctionnaires entre les ministères », a-t-il dit.

Lotfi Khadmi a aussi parlé d’identifier les besoins de l’administration, necessitant d’identifier en premier lieu, les prérogatives de chaque ministère, d’après lui.

La Directrice générale de la Formation et du développement des compétence au sein du ministère de la Fonction publique, Khawla Laabidi, a parlé pour sa part du volet de la formation, qui connait plusieures lacunes.

« D’abord la formation ne correspond pas toujours aux besoins des fonctionnaires et puis elle est centralisée aux dépends des régions. Malgré l’abondance des centres de formation, sans effiscience, nous visons à diversifier les modes de formation », a-t-elle declaré.

L’objectif, selon elle, est qu’il y ait une formation de base, une formation continue, une formation de réhabilitation, une formation pour l’amélioration des compétences des hauts cadres, une, pour la préparation des concours internes, une autre pour les formateurs au sein de l’administration publique, pour la reconversion professionnelle, pour la prise de fonction, et une formation pour les administrations régionales et locales. Le projet de réforme contient également l’introduction de la formation en ligne et à distance, de mettre une stratégie nationale de la formation, et faire participer les entreprises de formation.

Khaled Sallemi, directeur général des réformes administratives, a déclaré quant à lui, que le but de la modernisation de l’administration est d’abord d’appliquer le texte de la constitution, de mettre en place une politique de réforme générale de l’administration, répondre aux attentes des citoyens, et être conforme aux standards internationaux. 

« Nous avons effectué un diagnostic de l’intérieur de l’administration et avons évalué les précédents projets de réforme entamés lors des 20 dernières années. Nous avons également organisé des rencontres avec des chefs de structures au sein de la présidence du gouvernement et du ministère de la Fonction Publique et de la Gouvernance. Nous avons organisé 5 ateliers de travail. Un sondage a été mené à la fin de 2015 autour des services administratifs, et qui a touché un échantillon de 8000 citoyens… », a-t-il énuméré.

Après avoir consulté les différents concernés,  une première mouture de la stratégie nationale de réforme a été élaborée. « Le diagnostic élaboré a révélé un certain nombre de choses, dont l’abscence de continuité dans l’application des programmes et des projets. Chaque nouveau responsable entame une série de changements qui sont interrompus à son départ. Nous avons constaté le manque d’encouragement des fonctionnaires à faire partie du changement. Il y a aussi l’absence de la réforme administrative dans les régions, et l’absence de volonté politique avec la prise de décisions peu compatibles, en donnant la priorité au respect de la procédure aux dépends des résultats », a-t-il expliqué.

Le sondage d’opinion initié par la direction de la Réforme administrative a révélé  que 56% des interrogés ont exprimé leur contentement du rendement de l’administration. 51% des Tunisiens ont une mauvaise perception de l’administration, qui revient essentiellement au manque de productivité (77% des cas), au clientélisme, à la corruption (68%), au système caduc (58%).Les citoyens estiment qu’il faut améliorer en premier lieu, la discipline des fonctionnaires, la vitesse des services rendus, l’accueil et le respect de la loi. 
Chiraz Kefi

 

Commentaires 

 
#1 anti corruption
Ecrit par non à la corruption     16-10-2016 16:41
Le sondage résume à lui seul l'état de l'administration tunisien : lamentable.
 
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