Tunisie : L'interdiction des sacs en plastique provoque l'ire des industriels

Publié le Mercredi 13 Avril 2016 à 17:07
Vue de la conférence de presseLa Chambre syndicale nationale des fabricants et transformateurs de plastiques, organisera un rassemblement le 28 avril à 11h devant le ministère de l'Environnement, en protestation contre le projet de loi portant sur l'interdiction des sacs en plastique.

"A chaque fois, un responsable intervient dans les médias pour parler de choses sans se concerter avec la chambre. Tous ce que nous avons dit dans les médias n'a jamais eu de réponse, et nous avons demandé au ministère de nous recevoir et de parler de cette décision, de l'après l'interdiction. Mais nous n'avons eu aucune réponse. Le ministre refuse de nous recevoir!", a déclaré ce mercredi 13 avril Noureddine Turki, président de ladite Chambre, lors d'une conférence de presse. 
 
Il est revenu sur la question qui oppose les autorités aux professionnels du plastique, et s'est interrogé sur la politique de l'Etat pour lutter contre la contrebande des sacs en plastique. Les autorités ayant elles-mêmes reconnu que 80% des sacs se trouvant sur le marché tunisien proviendraient du commerce parallèle.  
 
"Montrez-nous comment vous allez y mettre fin? Nous avons contacté des responsables par le passé pour essayer de stopper le marché illégal. En ce qui concerne notre production, elle est certifiée selon les normes tunisiennes.", a-t-il indiqué. Selon Turki, le secteur qu'il estime être "menacé" par le projet de loi, emploierait plus de 100 000 personnes. 
 
Un chiffre qui se situerait autour de 3000, selon le ministre de l'Environnement, Nejib Derouiche. 
 
Turki a critiqué la politique de l'Etat qui refuse selon lui, de trouver une solution commune qui conviendrait à toutes les parties, en ajoutant : "Le plus surprenant que l'Etat a lui même participé au lancement d'une unité de production de plastique à Kasserine. Un investissement d'une valeur de 3,5 millions de dinars. Après que l'investisseur ait tout préparé, il ne sait pas comment faire, se lancer ou attendre, tout en sachant qu'il emploie 80 personnes et qu'il a contracté un  crédit bancaire", a-t-il dit.
 
"Nous payons une taxe pour l'environnement de 5% sur notre chiffre d'affaires. Les autorités disent qu'il s'agit d'un revenu de 23 millions de dinars par an pour l'Etat, mais que fait-il avec cet argent? Si l'Etat n'arrive pas à utiliser à bon escient cet argent,  s'il n'arrive pas à préserver l'environnement, que fait-il alors avec notre argent?", s'est-il interrogé 
 
La chambre syndicale nationale des fabricants et transformateurs de plastique accuse l'Etat de ne pas accorder l'intérêt escompté aux centres de transformation du plastique. Noureddine Turki affirme que les machines de transformation sont en panne dans plusieurs de ces centres, sans qu'il n'y ait de suivi. 
 
La chambre avait adressé le 29 janvier dernier, un courrier au ministre de l'Environnement dans lequel elle l'invite à dialoguer, et à trouver des solutions. La Chambre estime qu'il est nécessaire que plusieurs corps de métier soient concernés par la décision d'interdire les sacs en plastique et doivent prendre part au dialogue. 
 
Hamadi Riahi, directeur général du centre technique de chimie  au ministère de l'Industrie, est intervenu lors de la conférence de presse pour affirmer qu'une étude technico-industrielle sur l'impact de cette décision et les moyens de l'appliquer, serait necessaire. "L'objectif est de garder l'équilibre social de ces sociétés. par ailleurs, les ressources naturelles servant à la fabrication des matériaux biodégradables sont très limitées, la technologie n'est pas bien maitrisée, et son coût est très élevé", a-t-il dit, avant d'ajouter "A première vue, il serait difficile d'appliquer cette décision", a-t-il dit. 
 
Le président de la Chambre des collecteurs des Produits en plastique, Hamza Chaouch, a pour sa part appelé à améliorer le système de collecte, au lieu d'interdire la fabrication du plastique. "Un Tunisien a évoqué la question d'améliorer le système mais  sans écho de la part des autorités. Il a fini par aller travailler en Algérie", a-t-il regretté.
 
Hedi Chebili, directeur de qualité au ministère de l'Environnement, présent lors de la conférence de presse a exposé la vision du ministère, telle que adoptée lors d'un conseil ministériel le 18 décembre 2015. "Nous avons opté pour l'activation de la loi 117 de l'année de 1992 pour la protection du consommateur. Nous ne visons pas à fermer les usines, mais nous visons à faire diminuer les sacs en plastiques à usage unique, et ceux qui sont légers. Contrôler également l'importation de ces sacs. Tout sac non conforme aux normes, soit inférieur à 50 microns sera interdit. Toute importation de sacs en plastique fera l'objet d'un contrôle douanier...ce projet sera soumis aux institutions de l'Etat dont le tribunal administratif et l'ARP, avant qu'il ne soit adopté, et puis j'assume que ce projet contient des points positifs et des points à améliorer", a-t-il terminé.  
 
Noureddine Turki a aussi affirmé que toutes les usines du plastique fermeront leur portes le 28 avril, jour du rassemblement prévu devant le ministère. Mais aussi que le syndicat n'hésitera pas à durcir le ton, en faisant rallier à leur cause tous les intervenants du secteur.
Chiraz Kefi