Tunisie : Hafedh Caïd Essebsi est le moins influent au sein du parti (BCE) |
Publié le Mercredi 21 Mai 2014 à 00:10 |
Béji Caïd Essebsi a déclaré ce mardi soir que son mouvement, Nida Tounes, s’est développé, et ses dirigeants doivent grandir, admettant que certains dirigeants n’arrivent pas à suivre (cette évolution). Caïd Essebsi répondait ainsi aux critiques adressées au mouvement de l’intérieur, notamment celles de son directeur exécutif, Ridha Belhaj, qui a désapprouvé, la décision prise le dimanche 18 mai, de la tenue d’un congrès constitutif le 15 juin prochain. Caïd Essebsi a rappelé, lors d’une interview accordée à Nesma, la devise qui a présidé à la création de son mouvement, "la patrie avant le parti, et le parti avant ses militants", signalant que son parti appartient au peuple tunisien, et a été créé pour en servir l’intérêt. Selon sa perception, l’approche des échéances électorales suscite des convoitises. "Plusieurs personnes souhaitent entrer (au parti) pour trouver une place, d’autres partent, en pensant que peut-être, ils n’ont pas de place", a-t-il dit, taclant ceux qui parlent à la presse pour exercer des pressions sur lui en vue de l’inciter à aller dans une certaine direction. "S’il y a des problèmes, qu’ils les évoquent à l’intérieur des institutions, autrement, il y aurait anguille sous roche". "Jusqu’à maintenant, c’est moi le président du parti, c’est moi qui décide par le consensus, c’est moi qui ai désigné ceux qui sont satisfaits, et ceux qui ne le sont pas", a-t-il fait valoir, soulignant en revanche que désormais, il n’est plus prêt à procéder seul aux nominations, d’où la décision de la tenue d’un congrès constitutif. Une commission décidera si le congrès optera pour les formules consensuelles ou les élections, a-t-il précisé. Béji Caïd Essebsi a essuyé d’un revers de main les reproches adressés par Ridha Belhaj selon lesquels, Hafedh Caïd Essebsi serait derrière l’idée de la dissolution de la commission des structures (que Belhaj présidait). "Soit Si Ridha ne pensait pas ce qu’il disait, soit, il n’était pas conscient", a-t-il rétorqué. "Celui qui a proposé la dissolution de la commission n’est ni Hafedh, ni Si Ridha, ce sont les coordinateurs". "Le bureau exécutif s’est réuni dimanche pendant huit heures, et est parvenu à un consensus pour la tenue d’un congrès constitutif électif. Personne ne s’y est opposé. Si Ridha n’a pas ouvert la bouche, celui qui ne dit mot, consent". Il a indiqué que la réunion du bureau exécutif du dimanche 18 mai a été organisée, suite aux déclarations de Taieb Baccouche, Ridha Belhaj et Noureddine Ben Nticha, "dans une démarche presque coordonnée". (Ils ont marqué notamment leur désapprobation envers le communiqué du comité constitutif du 8 mai, dont les décisions portent sur la restructuration du parti, et la nomination de Caïd Essebsi junior à la tête du département chargé du suivi des aspects administratifs et organisationnels des structures régionales du mouvement). "C’est surtout Ben Nticha qui a suscité la crise en évoquant l’argent sale qui menace le parti, des propos qui ont eu un impact négatif sur le mouvement...on n’a pas d’argent sale, et on n’a pas d’argent". Il a récusé toute immixtion extérieure dans son mouvement. "Tant que je suis la, personne ne s’immisce dans le parti, sauf les militants, mais ils n’ont pas droit de sortir de l’unanimité", a-t-il prévenu, s’adressant à ses pourfendeurs au sein du mouvement en ces termes, "s’ils veulent quitter le parti, et créer un mouvement, qu’ils le fassent, on travaillera avec eux". Sur la position de son fils au sein du parti, il a indiqué que "Hafedh Caïd Essebsi a moins de poids que le Secrétaire Général, Ridha Belhaj et le trésorier. Mon fils a 52 ans, il est compétent, et n’a aucun pouvoir au sein du parti", a-t-il affirmé, estimant qu’il se tient lui-même à égale distance de tout le monde. Béji Caïd Essebsi s’est défendu de tout règlement de compte, est s’est dit contre l’exclusion, estimant que Ridha Belhaj a le droit de rester, de partir ou de s’allier avec d’autres. "Si Ridha, reviens à l’évidence, votre position ne nous honore pas", a-t-il asséné. Sur sa position envers la décision de son parti de le désigner comme seul candidat aux présidentielles, Béji Caïd Essebsi a réaffirmé l’annonce qu’il a faite il y a une année, d’être candidat, si l’intérêt de la Tunisie l’exige. "Etre candidat, c’est un sacrifice, je ne cherche pas un fauteuil, je les connais tous, mon but est de servir la Tunisie". Il a encore indiqué que son mouvement est pour la séparation entre présidentielles et législatives, en commençant par les premières. "Mais, si le consensus issu du dialogue national est autre, nous ne départirons pas". Pour ce qui est du calendrier des élections, il a estimé qu’il vaudrait mieux que l’on respecte les délais inscrits dans la constitution, jugeant difficile d’organiser le scrutin dans des délais aussi courts. Il y a ceux (experts) qui estiment que les élections doivent être organisées dans leur intégralité avant la fin de 2014, d’autres ne voient pas d’inconvénient à ce que l’on commence en 2014 et l’on termine début 2015, a-t-il relevé, espérant que l’on parviendra à "une interprétation consensuelle". Libye : "Non au putsch contre la légitimité" S’agissant de la situation en Libye, il a estimé que le pays est presque confronté à une guerre civile, l’Etat n’existe plus, mais il y a des milices et de groupes armés, et l’unité de décision fait défaut. Caïd Essebsi a dit désapprouver le putsch contre la légitimité. "La situation en Libye est différente de celle ayant prévalu en Egypte, où il y a eu un soulèvement populaire, et l’armée est intervenue a posteriori", a-t-il considéré, conseillant néanmoins les Libyens de ne pas accepter l’ingérence, même de la part des Tunisiens. "Je suis contre l’ingérence, et le soutien d’un camp aux dépens d’un autre, a fortiori que la situation en Libye a un impact sur la situation économique de la Tunisie, déjà difficile". A ses yeux, "la diplomatie tunisienne est celle du consensus, de la légalité internationale et de la raison". Béji Caïd Essebsi estime que Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaâfar sont en "campagne électorale anticipée", les appelant à avoir la conduite qui sied à leur niveau de responsabilité, s’agissant de se résoudre à quitter ou à se maintenir à leur poste jusqu’aux élections. Le président de Nida Tounes a dit soutenir le gouvernement de Mehdi Jomaâ, appelant à l’encourager et à le laisser travailler. Il a néanmoins relevé une lenteur en matière de la révision des nominations, de l’impartialité des mosquées et de la question des LPR. "Je suis contre la chasse aux sorcières, mais il faut revenir sur les nominations effectuées d’une manière arbitraire au cours de la dernière année, sinon cela risque d’hypothéquer les prochaines élections", a-t-il dit en substance. Tout en constatant une amélioration de la situation sécuritaire, Caïd Essebsi estime que la Tunisie, a elle seule, ne peut pas maîtriser le terrorisme qui requiert une coopération avec l’Algérie, la Libye, le Mali, le Niger et l’Europe, déplorant l’absence d’une stratégie en la matière. Selon ses dires, le gouvernement n’a pas les moyens de régler les difficultés économiques, et ne doit pas s’engager dans de grandes réformes. Il a néamoins fait constater que "la présence de Mehdi Jomaâ est meilleure que son départ qui sera une catastrophe". Le président de Nida Tounes a récusé toute entente avec Ennahdha sur l’article 167 du code électoral portant sur l’exclusion, indiquant qu’"Ennahdha n’est pas un ennemi, et fait partie du paysage politique". Il n’a ni confirmé ni infirmé une alliance avec Ennahdha après les élections, attestant qu’il n’y a pas un parti ou un mouvement qui est capable de diriger les affaires de la Tunisie à lui seul. H.J. |