Tunisie : Des partis progressistes quittent les concertations sur le gouvernement d'union

Publié le Jeudi 04 Août 2016 à 13:26
Les partis Al Massar, Al Joumhouri et le Mouvement du peuple ont annoncé ce jeudi leur retrait des concertations au sujet de la formation du gouvernement d’union nationale. C’est après la désignation de Youssef Chahed, en tant que nouveau chef de gouvernement chargé de la formation de la nouvelle équipe, que les trois partis ont exprimé leur mécontentement lors d’une conférence de presse tenue ce jeudi matin.

« Nous nous sommes réunis avec les autres partis ayant salué l’initiative présidentielle, afin d’élaborer le document de Carthage réunissant les priorités. Nous pensions qu’il y aurait ensuite un dialogue national pour se concerter au sujet de la personnalité qui sera chargée de former le gouvernement, mais nous avons été surpris par la décision du chef de l’Etat d’en désigner une, en brulant les étapes », a déclaré Samir Taieb, secrétaire général d’El Massar.

Surpris de voir un ministre d’un gouvernement dont le rendement a été critiqué, chargé de mener un nouveau gouvernement, les trois partis ne cachent pas leur déception. « Nous avons proposé au chef de l’Etat trois noms de personnalités susceptibles de diriger le prochain gouvernement. Mais le chef de l’Etat a préféré ignorer la proposition et en désigner une toute autre », a indiqué Taïeb. Un choix qui ne fait visiblement pas l’unanimité. Selon Samir Taïeb, cinq partis auraient accepté Youssef Chahed et quatre autres l’auraient refusé. « Et en ce qui concerne nos candidats, 4 partis les ont acceptés, et 5 les ont refusés. Donc il n’y a aucun consensus. D’ailleurs si nous avions commencé par arrêter des critères de choix, les choses auraient été différentes », a-t-il dit.

Zouhaïr Maghzaoui, secrétaire général du mouvement du peuple, a déclaré quant à lui, avoir pris conscience que ce qui a été fait n’était pas le bon choix : « Nous aurions pu faire comme si de rien n’était et continuer dans le but de gagner des places au sein du gouvernement. Mais nous voulons transmettre aux Tunisiens que ce que nous avons fait durant ces deux derniers mois, est un travail sérieux qui visait à entamer une nouvelle étape qui serait meilleure que celle passée », a-t-il dit.

Maghzaoui a ajouté ne pas être disposé à prendre la responsabilité des actions qu’il considère être négatives. « Il ne s’agit ni d’amertume, ni de jalousie, nous voulons préserver les intérêts du pays », a-t-il ajouté. D’autre part, Issam Chebbi d’Al Joumhouri a précisé qu’il n’était pas en rupture avec les institutions de l’Etat, ni avec le gouvernement : « Youssef Chahed a rencontré les partis politiques, nous a invités à le rencontrer et nous allons le faire. Nous sommes des partis qui croyons en la démocratie, au dialogue, et nous ferons tout ce qui serait en mesure d’améliorer les choses. Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour sortir le pays de la crise », a-t-il dit.

Seulement, son parti, Al Massar et le Mouvement du peuple auraient préféré que le chef de l’Etat leur donne l’occasion lors d’un dialogue national d’identifier les critères auxquels doit répondre le nouveau chef du gouvernement, avant d’annoncer un nom.  « Une grande partie des partis politiques avaient pour condition que le chef du gouvernement soit impartial et se tenant à la même distance de tous les partis politiques », a rappelé Chebbi, en allusion à l’appartenance partisane de Youssef Chahed.

Et Samir Taieb d’ajouter que le pays a raté plusieurs occasions depuis le 14 janvier 2011 ; « Le premier dossier que le nouveau gouvernement va traiter, est celui des équilibres financiers ! C’est dire la profondeur de la crise que vit le pays. C’est pour cela que nous estimons qu’il faut bien choisir la composition du gouvernement », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « si Youssef Chahed nous appelle au sujet de la composition du gouvernement, nous n’y répondrons pas, mais s’il s’agit de questions d’intérêt national et pour la manière d’appliquer le document de Carthage nous sommes pour la concertation », a-t-il dit. 

Selon les trois partis, si le gouvernement de Chahed échoue, ce serait à cause de la procédure adoptée : « Nous serions passée d’un gouvernement d’union nationale selon son énoncé de départ, à un élargissement de la coalition au pouvoir. Le projet a perdu son essence », a regretté Taieb.

Chiraz Kefi