Tunisie : BCE livre sa vérité sur la politique intérieure et étrangère

Publié le Jeudi 04 Février 2016 à 13:14
Béji Caïd Essebsi. Le président de la république, Béji Caïd Essebsi, s’est défendu hier d’être nahdhaoui. "Personne ne peut m’accuser d’être nahdhaoui. Si on se réfère aux résultats des élections, à l’exception de Rached Ghannouchi et dix à quinze personnes autour de lui, tous ont voté contre moi. Je ne suis en rien redevable à Ennahdha", a-t-il déclaré dans une interview retransmise jeudi soir sur al-Wataniya 1, signalant que "la souveraineté appartient au peuple, c’est lui qui a choisi Ennahdha".

Il a réitéré au micro d’Elyes Gharbi que l’alliance avec Ennahda était dictée par les résultats des urnes. "Le peuple nous a transmis un message. Il a choisi Nidaa Tounes, sans lui donner la majorité absolue, et a placé Ennahdha au 2ème rang. On était obligé de prendre cela en considération", a-t-il indiqué, qualifiant la coalition de quatre partis, "la première dans l’histoire du pays, de gouvernement de stabilité".

"L'aile gauche de Nidaa a tort"
BCE considère que Nidaa Tounes n’a pas payé cher l’alliance avec Ennahdha, mais plutôt le différend entre ses cadres pour le positionnement et l’accession au pouvoir, signalant que ce sont "les tenants de la gauche qui ont abandonné les autres, (destouriens, syndicalistes, etc.), et ils ont tort". 

Il s’est défendu de toute propension de transmettre le pouvoir en héritage à son fils, estimant que cela est impossible dans la 2ème république, où "le président est élu au suffrage universel direct". Il a ajouté avoir pris la décision de démission de Ridha Belhaj, son ancien chef de cabinet, en commun accord avec ce dernier, pour éviter que l’on dise que Nidaa a des racines à Carthage, et pour qu’il soit le président de tous les Tunisiens.

Les mains malveillantes, c’était sur la base de rapports
Le chef de l’Etat a dit soutenir les protestations pacifiques, rappelant que c’était lui qui est intervenu auprès du chef du gouvernement, afin que le Front populaire puisse descendre dans la rue et manifester contre l'initiative de réconciliation économique.

S’agissant de l’accusation qu’il a adressée à des mains malveillantes lors du dernier mouvement contestataire, pour avoir eu recours à la violence, il a indiqué qu’elle se basait sur des rapports, selon lesquels "un grand nombre de ces personnes appartiennent à des mouvements politiques". Si les rapports lui seront transmis, la justice saura dire son mot, a-t-il dit, tout en précisant que ce n’était pas de son ressort de divulguer des noms.

Habib Essid maintenu à son poste
Il a qualifié la prestation du gouvernement "de raisonnable", c’était prévu qu’il soit un gouvernement de réforme, il s’est retrouvé en train d’expédier les affaires courantes, a-t-il souligné. Il a exclu toute intention de remplacer Habib Essid, précisant que de toutes les façons, cela ne relevait pas de ses prérogatives, mais de celles du parti de la majorité.

Quant aux rencontres qu’il a eues dernièrement avec des personnalités nationales à l’instar d'Ahmed Nejib Chebbi, Mohamed Nouri Jouini et d'autres, il a révélé qu’elles s’inscrivaient dans le cadre des concertations ouvertes et libres avec "ces hommes d’Etat" sur les affaires nationales.

Il a affirmé qu’il respectait la constitution et décidait dans la limite de ses prérogatives, faisant constater que c’est le peuple qui est enclin au régime présidentiel, et "qui veut un président qui fasse tout et qui soit responsable de tout".

Politique étrangère
Interrogé sur sa politique étrangère, il a souligné qu’il n’était pas néophyte en la matière et que sur ses 60 ans de politique, il était six ans ministre des Affaires étrangères sous Bourguiba.

Les piliers de la politique étrangère sont, selon ses dires, l’indépendance de la décision politique, la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays, et l’ancrage dans nos racines arabo-musulmanes.

"Lorsqu’on a accédé aux responsabilités, nos relations avec les pays arabes à l’instar de l’Algérie, de l’Egypte, les Emirats… n’étaient pas au beau fixe, nous avons tenté de renouer avec notre environnement réel", a-t-il dit, accusant ses prédécesseurs d’être à l’origine d’une telle dégradation. 

BCE a annoncé son intention de se rendre dans deux autres pays arabes soit les Emirats arabes unis et le Qatar.

Il a qualifié les aides économiques de l’occident de limitées, faisant part de la volonté des pays européens et autres de venir investir en Tunisie, mais "le climat n’est pas favorable à l’investissement".

S’agissant de la révélation de la vérité des assassinats politiques, le chef de l'Etat a minimisé son rôle en la matière, estimant que cela reste du ressort de la justice. "L’Etat tunisien doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour révéler la vérité", a-t-il dit. 

Il a écarté les accusations de népotisme qui lui sont adressées. "Je n’ai aucun membre de ma famille qui soit ministre, directeur ou chef de service, et je m’insurge contre de telles pratiques", a-t-il asséné. 

Il a laissé entendre qu’il présentera une initiative pour l’emploi comportant les prémisses d’une solution, sans donner plus de détails, mais "ce sera en dehors du budget de l’Etat, car les caisses sont vides".

Béji Caïd Essebsi a en définitive exhorté les Tunisiens à retourner au travail et à rompre avec ce climat de suspicion qui constitue un frein à l’action.
Gnet