Tragédie arabe : Vengeance et sauvagerie, au lieu de procès équitables

Publié le Mardi 05 Décembre 2017 à 16:55
Ali Abdallah Salah assassiné le 04 décembre à Sanaa. Le monde arabe tourne le dos à la civilisation, et semble s’accommoder du chaos et de l’insécurité, un état de fait qui le rapproche chaque jour un peu plus des abysses du précipice. Dès son début, ce 21ème siècle a été tragique pour une région qui voit éclater des conflits militaires, politiques, diplomatiques… de toutes sortes, mettant en péril son présent et hypothéquant son avenir, la transformant, au passage, en plaque tectonique où les forces mondiales s’affrontent, et les rapports de force se dessinent.

Que de promesses trahies, et que d’espoirs déçus dans cette partie du monde qui, à chaque fois qu’elle s’imagine entrevoir le bout tunnel, se retrouve face à un destin pire que celui qui l’a précédé.

Après les affres de la colonisation, et les tentatives acharnées des forces occupantes d’asservir les peuples et de leur ôter leurs richesses et potentialités, intervenait la gloire des décolonisations, devenue possible après des combats longs et éprouvants, marquant l’histoire de mouvements nationaux dans tel pays, ou tel autre. L’élan des indépendances, outre le fait d’avoir restitué aux peuples leur fierté et dignité, les a fait rêver et leur a redonné espoir en des lendemains enchanteurs. De ces mouvements ont émergé des leaders, des chefs charismatiques qui ont érigé le nationalisme en mode de gouvernance ; une idéologie déclinée à travers la région, sous de larges variantes, et diverses doctrines : conservatrice, libérale, socialiste, communiste, laïque...des expériences multiples certes, qui ont basculé peu à peu, à des degrés variables, dans le monolithisme, le despotisme et la dictature.

L’Etat autocratique, érigé dans l’espace géographique arabe en système institutionnel, a empêché pendant des décennies les peuples de prendre leur destin en main, et les a réduit à des sujets, empêchant leur citoyenneté de s’exercer et de s’épanouir, bridant leur liberté, étouffant leur parole, et les confinant dans une colère vive, restée longtemps inexprimable.

La dictature qui a échoué sur toute la ligne, réussissait à maintenir la stabilité et la sécurité. Quand bien même les sociétés étaient complexes, multiconfessionnelles et multiethniques, la coexistence était apaisée et pacifique ; une situation ayant prévalu jusqu’à la deuxième guerre du Golfe où la guerre d’Irak de 2003. Dès lors, la boîte de Pandore a été ouverte, et la région a été précipitée dans un processus d’embrasement qui parait jusque-là irréversible. L’Irak s’est disloqué, et est passé du règne de l’homme fort, Saddam Hussein, exécuté par les Américains en décembre 2006 à Bagdad, à l’avènement de plusieurs chefs qui étendaient leur emprise sur plusieurs zones d’influence, chiite, sunnite, kurde, et on en passe.

Le monde arabe assistait amer à la chute de l’ancienne Mésopotamie, jusqu’à ce qu’à la même décennie, un nouveau mouvement porteur d’espoir et de changement, s’amorce ; celui du printemps arabe, dont la première étincelle a éclaté en Tunisie. Son rouleau compresseur a englobé dans la foulée  la Libye, l’Egypte, le Yémen, la Syrie…Excepté la Tunisie qui a réussi à préserver le caractère pacifique de sa transition, et qui s’en sort tant bien que mal, malgré les difficultés ; le passage de la dictature à l’espérance démocratique a mal tourné dans les autres pays.

Militarisées, les révolutions ont dégénéré en guerres civiles, et conflits armés, la destruction est méthodique. En Libye, en Syrie, et au Yémen, l’idéal démocratique a été enfoui sous les champs de ruines, et les peuples, assassinés, décimés, déportés...,  sont tombés de Charybde en Scylla.

Au milieu du drame, ceux qui assument, en grande partie, la responsabilité du devenir terrifiant de la région, au lieu d’être jugés dans des procès équitables où ils auraient eu à rendre des comptes, comme il devrait en être le cas dans ce monde dit civilisé, se voient assassinés sauvagement, selon une méthode primitive et vengeresse. C’est ainsi que l’ancien président Yéménite, Ali Abdallah Salah, a retrouvé hier, lundi 04 décembre 2017 à Sanaa, quasiment le même sort, que l’ancien homme fort de Libye, Mouammar Khadafi, assassiné le 20 octobre 2011 à Syrte. La tragédie arabe présente encore tous les signes de la dégénérescence et du pourrissement.
Gnet

 

Commentaires 

 
#1 @Gnet
Ecrit par Léon     06-12-2017 12:58
Vous avez bien évolué depuis le 14 maudit. C'est que les réalités de la vies et les faits têtus de l'Histoire, sont les meilleurs éducateurs.
Souvenez-vous de vos réactions lorsque Gaddafi avait été bien plus sauvagement lynché (avec un tube métallique dans le fondement).
Elles étaient bien moins urbaines. Aurait-il fallu que votre bénite révolution autant de morts dans le monde arabe pour que vos consciences commencent à se mettre en route.
Je me souviens que j'étais LE Pestiféré de votre journal, parce que je me permettais d'appeler les tunisiens à la raison, par des termes un peu choquant (pour les réveiller) et en citant le
VERSET 112 de la SOURATE des ABEILLES.

LÉON.
 
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