Retour des combattants en Tunisie : Gare à la discorde !

Publié le Mardi 27 Décembre 2016 à 17:05
Un non au retour des djihadistes brandi dans l'hémicycle. Le retour des combattants en Tunisie enflamme le débat public. La scène politique est largement divisée là-dessus. Entre ceux qui préconisent leur rapatriement pour qu’ils soient jugés dans leur pays, et d’autres qui y opposent une fin de non-recevoir, réclamant qu’ils soient jugés dans les pays où ils ont perpétré des crimes.

La polémique trouve son origine dans les déclarations de Béji Caïd Essebsi aux médias étrangers, en marge de sa visite à Bruxelles en début du mois. Dans un entretien avec Euronews, le président a indiqué qu’on ne pouvait interdire aux Tunisiens de revenir en Tunisie, c’est "anticonstitutionnel", affirmant que toutes les dispositions sont prises pour que ces djihadistes soient "neutralisés".

Ces propos ont été largement contestés, ayant été perçus par certains comme une indulgence envers les terroristes.

Face à la controverse, la présidence a publisé une précision à la date du 07 décembre, selon laquelle "le chef de l’Etat est garant du respect de la constitution dont l’article 25 stipule qu’il est interdit de déchoir tout citoyen de sa nationalité, de l’exiler, de l’extrader ou de l’empêcher de retourner à sa patrie". Le chef de l’Etat est revenu lui-même sur le sujet pour affirmer son refus catégorique de gracier les combattants, et son rejet de ce qui est qualifié de "loi de repentir", écartant toute indulgence envers les djihadistes et préconisant qu’ils soient jugés dans le cadre de la loi de lutte contre le terrorisme.

Vendredi 23 décembre, le ministre de l’Intérieur, Hédi Majdoub, a dit, lors d’une plénière à l’ARP, que son département dispose de toutes les informations sur les 800 Tunisiens de retour des foyers de tension, comme il détient toutes les données sur les Tunisiens établis actuellement dans les zones de conflit.

Samedi 24 décembre, le syndicat national des forces de sécurité intérieure met en garde dans un communiqué paru sur sa page officielle facebook contre "le risque de somalisation en cas de retour des combattants des foyers de tension", déplorant "l’absence d’une volonté politique claire et d’une décision souveraine" sur ce sujet.


"Accepter leur retour de gré ou de force dans le cadre des actuels arrangements internationaux pour régler une crise régionale est de nature à élargir la sphère du terrorisme et d’en favoriser la prolifération", considère-t-il en substance.

Le syndicat sécuritaire appelle la diplomatie tunisienne à traiter ce dossier en toute indépendance, et à prendre des mesures fermes au sujet de ces combattants dont "l’interdiction de retour", et si nécessaire "la déchéance de nationalité".

Le communiqué du SNFSI a été repris par une dépêche AFP, relayée par des médias français notamment par le Figaro sous le titre : Tunisie : risque de somalisation «sécurité» et TV5 Monde : Tunisie : risque de somalisation en cas de retour des djihadistes.

Dimanche 25 décembre, le président d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, a déclaré que ces Tunisiens ne peuvent être empêchés de retourner en Tunisie. "Nous ne pouvons imposer des Tunisiens à d’autres pays, le monde est aujourd’hui divisé en nationalités et ces derniers portent la nationalité tunisienne, ils ont renié leur pays, exercé la violence à son encontre et ont Sali sa réputation à l’étranger", a-t-il souligné, appelant "à traiter cette maladie avec sérieux et à assumer notre responsabilité là-dessus".

Dans un communiqué paru lundi 26 décembre, Afek Tounes affirme son refus catégorique de tout accord secret ou déclaré organisant le retour des terroristes, appelant la diplomatie tunisienne à agir en vue de les juger dans les pays où ils ont commis des crimes.

Le Front populaire est du même avis. Son porte-parole Hamma Hammami a exprimé, ce mardi sur Shems un refus catégorique du retour des combattants, mettant en garde contre un éventuel "marché conclu avec des parties extérieures, et dont l’une des clauses est d’accueillir les djihadistes en Tunisie".

Ce matin même, les députés de Nidaa Tounes brandissent des pancartes lors d’une plénière à l’ARP, où c’est écrit "non au retour des terroristes".

Voilà une question d’extrême gravité qui occupe le débat en cette fin d’année et qui est vouée à accaparer la scène politique au début de la toute prochaine année. Une question qui doit être appréhendée loin des tiraillements et des surenchères politiques, qui ne feront que détourner l’attention des vraies solutions à ce problème qui effraie les Tunisiens.

Le retour des combattants des zones de conflit doit être traité selon une démarche rationnelle, et non passionnelle, sous les angles sécuritaire, juridique, constitutionnel, diplomatique…, et à la lumière des plans qui se trament contre la région, où les forces régionales et internationales mènent des guerres par procuration, à travers ce qui est convenu d’appeler l’anarchie créatrice et la déstabilisation interne des pays. D’où la nécessité d’une concorde nationale là-dessus, au lieu de cette discorde qui est en train de se dessiner.

Quant à la déchéance de nationalité, François Hollande a voulu la constitutionnaliser et à l’étendre aux binationaux dans des affaires terroristes, ce qui lui a valu de larges critiques et des démissions même dans son propre camp, l’obligeant à se rétracter. Lors de son allocution télévisée, le 1er décembre dernier, où il a annoncé sa décision de ne pas être candidat à sa propre succession, le président français sortant a affirmé n’avoir qu’"un seul regreté : "celui d’avoir proposé la déchéance de nationalité". C'est dire combien ce sujet est compliqué même dans les démocraties les plus anciennes.

La Rédaction

 

Commentaires 

 
#3 Indignation
Ecrit par Sami Trimeche     07-01-2017 14:11
Qualifier ces terroristes égorgeurs de combattants et de jihadistes , dénote une certaine glorification de l'auteur de cet article envers ces enragés . Les qualifier de malades , comme l'a fait Guannouchi , c'est aussi leur trouver une issue et les absoudre de toute responsabilité . Je crois que le pays a tout intérêt à les juger , je reste persuadé que ces boites noires ont beaucoup à nous apprendre sur les véritables tueurs : leurs maîtres créateurs
 
 
#2 Interdits de retour
Ecrit par Agatacriztiz     29-12-2016 18:04
Ils ont choisi soi-disant de "braver la mort" au nom de la religion mais en réalité et surtout contre paiement des soldes de mercenaires, s'arrogeant le droit de massacrer, violer, voler et commettre les pires exactions inimaginables...
maintenant qu'ils se font tirer comme des lapins, ils veulent retourner dans leur pays comme si de rien était.
Ceux qui appuient cette option de retour c'est ceux qui espère, constituer une "armée des ombres" à leur solde et l'utiliser contre l'état pour asseoir leur puissance de nuisance.
On commence par les "barons" du trafic et de la contrebande (et leurs acolytes politiques) qui gangrènent notre pays...
 
 
#1 Pas de retour pour les terroristes
Ecrit par medeve     28-12-2016 11:37
Les terroristes extrémistes religieux qui se sont mélés de ce qui ne les regardait pas ne devraient retourner en Tunisie. Ils doivent être jugés dans les pays où ils ont commis des crimes gratuits programmés par les terrotristes islamistes orthodoxes.
 
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