La Tunisie, cet interlocuteur "stratégique" chouchouté par l’Amérique

Publié le Mercredi 19 Février 2014 à 17:39
Poignée de main chaleureuse entre John Kerry et Mehdi Jomaâ. La Tunisie est sur le point de se hisser au rang d’interlocuteur stratégique des Etats-Unis d’Amérique. Faut-il s’en réjouir, ou s’en inquiéter ? Ni l’un, ni l’autre, il faudrait juste considérer cette annonce américaine avec le pragmatisme coutumier des rapports qu’entretient le pays de l’oncle Sam avec le reste du monde.

Les Etats-Unis ont eu de tout temps des alliés incontournables dans la région arabe, notamment dans le Proche et le Moyen-Orient où Washington a des intérêts stratégiques énormes, inhérents à la manne pétrolière et gazière, et à la préservation de la sécurité de son allié impénitent, Israël. La présence américaine dans la région a été souvent perçue d’un mauvais œil, tout autant que ses liens suspects avec des régimes autocratiques, qui doivent, en partie, leur longévité au soutien de la superpuissance mondiale.

Les Etats-Unis ont été les instigateurs de la théorie de l’anarchie créatrice dans le monde arabo-musulman, ils ont fait et défait des régimes, enclenché des guerres, anéanti des pays, attisé les dissensions ethniques et confessionnelles, bref ils sont derrière sa déliquescence programmée, et leurs plans dans cette partie du monde, émaillée de bourbiers, n’ont pas encore livré tous leurs secrets.

La priorité de l’administration Obama est, à ce jour,  la résolution du conflit israélo-palestinien, un sujet qui figure en haut de l’agenda du secrétaire d’Etat américain, John Kerry. A l’heure qu’il est, les négociations entre Palestiniens et Israéliens sont au point mort, et le soi-disant processus de paix enclenché depuis Oslo est désespérément dans l’impasse. Washington affiche une détermination à parvenir à une issue au conflit, à travers le plan Kerry. Ce dernier suggère notamment l’instauration d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967, l’arrêt des colonies, et inclut l’idée de la reconnaissance de la judaïté de l’Etat d’Israël. Dans l’esprit de ce dernier point, "Israël sera considéré comme un Etat national pour le peuple juif, et la Palestine sera considérée comme un Etat national pour le peuple palestinien".

Une réciprocité qui ne tient pas, puisque, l’on parle d’une reconnaissance fondée sur la religion pour le premier (Etat juif), et une reconnaissance basée sur la nationalité pour le second (Etat palestinien). Ce point auquel les Palestiniens, dans leurs différentes factions et appartenances,  opposent fermement une fin de non-recevoir, sous-tend la liquidation de la cause palestinienne, ce qui signifie dans l’imaginaire israélo-américain, un pas de géant franchi sur la voie de l’avènement du Grand Israël. Ce n’est pas l’instauration d’un Etat palestinien sur une portion congrue de territoire qui changerait quoique ce soit, à ce rapport de force entre opprimé et oppresseur ; colonisateur et colonisé.

Rappeler, ne serait-ce que succinctement, la nature du rôle joué par les Etats-Unis au Machreq, permet  de comprendre le sens du nouveau rôle que l’Amérique cherche à avoir au Maghreb, en Afrique du Nord et plus particulièrement en Tunisie, traditionnellement pré-carré de la France, et subsidiairement de l’Europe.

Deux principaux motifs semblent être derrière l’engagement enthousiasmant de Washington aux côtés de Tunis. Le premier est la lutte contre le terrorisme, création et hantise étatsuniennes, qui touche actuellement de plein fouet la Tunisie et la région d’Afrique du Nord. Sur ce point, la Tunisie et les Etats-Unis ont un ennemi commun, et leur coopération bilatérale ne sera pas de trop pour le combattre et l’éradiquer. Le dialogue stratégique qui sera entamé lors de la visite de Mehdi Jomaâ aux Etats-Unis, comme l’a annoncé hier John Kerry, lors de sa visite éclair à Tunis, aura tout son sens puisqu’il peut signifier un transfert du savoir faire américain en matière de renseignements, de formation, et une aide militaire, un cycle qui serait logiquement couronné par une vente d’armes et de munitions, chose dont les grands groupes d’armements US raffolent.

Le deuxième motif du rapprochement stratégique tuniso-américain, a trait à cette quête inlassable des Etats-Unis d'améliorer leur image dans le monde arabo-musulman ; une tentative jusque-là vaine. Se présentant comme étant le chantre de la démocratie et des libertés, des valeurs qu’ils disent vouloir répandre partout dans le monde, les Etats-Unis cherchent à donner du crédit et de la substance à ce discours. L’exemple tunisien qui tranche avec la malédiction de l’échec frappant la région, leur servirait ainsi de faire-valoir. C’est là, le sens de leur soutien, moult fois réitéré au plus haut sommet de la Maison blanche, par le président Obama en personne, à la transition démocratique et à la réussite des prochaines élections en Tunisie.

Les Etats-Unis semblent chercher réellement à faire réussir le modèle tunisien, et à contribuer à la naissance d’une vraie démocratie en Tunisie, a fortiori que notre pays est dépourvu de richesses pouvant susciter une quelconque convoitise. Reste à la Tunisie de savoir tirer bénéfice de cette main tendue, sans se faire beaucoup d’illusions sur la finalité de cette magnanimité américaine, et sans perdre de vue que les Etats-Unis perçoivent le monde comme un vaste champ d’expérimentation. En multipliant les expériences dans le temps et dans l’espace, ils ne font en fait qu’enrichir la leur, et conforter leur position de superpuissance.
H.J.


 

Commentaires 

 
+1 #3 Tunisiens sens unique.
Ecrit par Tunisien     23-02-2014 19:44
C’est qu’il faut c’est la réalité, la vérité. Vivre avec et appliquer avec. Si c’est bon ou si c’est mauvais il faut l’avouer. Si ca passe ou ca passe pas. Donc notre relation avec x ou y c’est à nous de le gérer.
La parole on l’a déjà pris et en toute liberté. Donc on n’a pas peur de dire non ou de dire oui tout en regardant notre intérêt.
 
 
-1 #2 USA=hypocrisie et égoîsme
Ecrit par liberté     20-02-2014 17:35
USA Méfiance: Dites vous une chose, tout comme la France, ils ne servent que leur propre intérêts et celui d'Israêl !
Solution: Revenir à nos préceptes les plus anciens à l'époque de l'âge d'or quand l'Arabe "kan handou kima"
 
 
+5 #1 oui mais
Ecrit par Royaliste     19-02-2014 20:34
Les Etats-Unis ont été les instigateurs de la théorie de l’anarchie créatrice dans le monde arabo-musulman

oui mais a qui la faute, aux USA qui ont crée le probléme ou par exemple aux iraqiens qui continuent a s'entre tuer depuis plus de 10ans?

est ce la faute des USA si des tunisiens ÉGORGENT d'autres tunisiens?

est ce la faute des USA si les libyens s'entre tues?

est ce la faute des USA si les saudiens finances l'anéantissement de la Syrie?

si je te donne une arme et je te demande de tuer ton frére, a qui la faute,a moi ou a l'imbécile qui va s'exécuter?
 
Ces commentaires n'engagent que leurs auteurs, la rédaction n'en est, en aucun cas, responsable du contenu.