La greffe de visage, entre éthique et réalité

Publié le Dimanche 06 Décembre 2009 à 17:32
La chirurgie réparatrice et esthétique, cette spécialité qui fascine les patients autant qu’elle les rebute est avant tout une avancée de taille dans le domaine de la médecine. Elle permet aux personnes nées avec des malformations physiques, portant des disgrâces ou ayant été victimes d’un accident qui leur a laissé des séquelles insupportables de renouer avec la vie. Le 6ème congrès de la Clinique de La Soukra a été consacré hier à la cette spécialité et plus particulièrement à la « greffe du visage, entre débat éthique et réalité chirurgicale ». Un invité de marque a été présent. Il s’agit de l’éminent professeur Laurent Lantieri de Paris, auteur de la première mondiale de greffe intégrale du visage, accompagné par le grand chirurgien plasticien Jean François Pascal.

Ali Adouani Chef de service de la chirurgie maxilo-faciale à l’hôpital Charles Nicolle, et président de cette session, nous explique le choix de ce sujet : « Les chirurgiens tunisiens ont atteint un haut niveau d’expertise en matière de chirurgie réparatrice et esthétique, de ce fait il nous semble évident de nous pencher sur le cas de la greffe du visage qui constitue un volet, certes pointu mais indispensable à la pratique. Cette tribune est également une occasion pour nous de découvrir l’expérience du Professeur Lantieri qui a été l’auteur de greffes de visage réussies». D’après les débats qui ont eu lieu outre-mer sur l’éthique de cette pratique, pensez-vous qu’il serait possible qu’un jour elle ait lieu chez nous ? « Je pense que la greffe de visage est une avancée formidable de la science, et personnellement je suis pour le fait de rendre de l’espoir et de la vie aux gens qui ont en besoin. Il reste qu’il est délicat d’aborder le sujet ici, compte tenu de notre culture et de notre religion », répond le professeur Adouani.

Des patients victimes d’accidents de la route, d’une tumeur, d’un accident domestique ou d’une malformation congénitale sont à l’attente d’une telle greffe. Mais le citoyen tunisien est encore réticent à l’idée du don d’organes, encore plus quand il s’agit du visage. « Il faut responsabiliser et toucher les citoyens pour qu’ils réalisent la nécessité d’un tel engagement », insiste le professeur Adouani.
Pour le cas de la Tunisie les chirurgies faciales partielles de reconstruction sont monnaie courante, soit par greffe ou par lambeaux. Mais seulement dans le cas où la peau émane du patient lui-même. Les exemples de cas exposés par les médecins présents lors du congrès ont suscité l’admiration du Professeur invité. Mais la question du don d’organes fait encore jaser. Même outre-mer.

Pascal Coler greffé en 2007Laurent Lantieri insiste alors sur la nécessité de restaurer le corps du défunt avant de le restituer à sa famille. Pour ce qui est des patients opérés, ils reconnaissent tout de suite ce visage comme le leur. Mais comme toute opération, celle-ci peut échouer. Ayant été également l’auteur d’une double greffe visage-mains sur un patient gravement brûlé, mais décédé quelques mois après l’opération pour cause d’infection sévère, le chirurgien français explique les limites de la greffe du visage: « il n’existe pas d’alternative si l’opération échoue. Lors d’une greffe de la main, on peut toujours recourir à l’amputation en cas d’échec. Pour le cas de la greffe du visage, bien que nous soyons bien parés contre les rejets, il existe des infections aiguës qui ne peuvent qu'être fatales au patient. Je le dis clairement, un échec d’une greffe de visage entraîne la mort, et c’est envisagé d’emblée ». Mais cela ne dissuade pas tous les patients qui sont sur les listes d'attente et qui espèrent un jour retrouver une vie normale. Le cas de la greffe effectuée sur Pascal Coler en 2007 donne espoir à plus d'un, il a subi la première greffe de visage pour réparer les dégâts d’une tumeur qui le défigurait. L’opération est d’une rare réussite. Par ailleurs, le nombre de personnes ayant besoin de ces greffes est en continuelle augmentation surtout avec les blessés des deux guerres d’Irak et d’Afghanistan.

En attendant que les mentalités changent en ce qui concerne le don d’organe, le Professeur Adouani confie que des procédures ont été entamées pour envoyer des élèves en médecine apprendre la grève de visage en France.

Chiraz Kefi
 

Commentaires 

 
#3 Question d\'habitude
Ecrit par Tounsi2     07-12-2009 21:59
Au départ quand elle a été faite la première fois mondiale en France en 2007, ça a choqué tout le monde y compris le corps médical pourtant "habitué aux chocs".
Maintenant c beaucoup mois choquant.
En 2017 ça sera une opération aussi banale que la greffe de reins, qui ont la lourde tâche de rester en place (sans rejet de greffe) et d'épurer 180 litres de sang par jour.
 
 
#2 Acceptable
Ecrit par Funkquy     06-12-2009 20:48
Pour ces gens qui ont le visage ou une partie du corps déformé, que ça soit à cause d'une anomalie génétique, ou à cause de brulures ..., ce genre d'opération est éthiquement acceptable.

C'est par rapport aux à ces qui n'ont pas de problème que ça pose un obstacle éthique, par rapport à la chirurgie esthétique.

Pour les tunisiens qui n'acceptent pas encore cette histoire de dons d'organe ou de chirurgie réparatrice, c'est surtout un problème de la psychologie de la personne, il n y a que l'éducation et l'information qui peuvent faire changer ça. La religion de problème par rapport à ça.
 
 
#1
Ecrit par SouSou     06-12-2009 18:32
Ce type d'opérations est considéré comme nécessité pour les gens qui ont en besoin seulement. Mais pour ceux qui n'ont aucun probléme ça pose toujours des obstacles éthique.
 
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