La condition de la femme arabe en débat en Tunisie

Publié le Vendredi 06 Mars 2015 à 16:21
Vue de la conférenceLa Sixième réunion du réseau des femmes syndicalistes arabes s’est tenue à Tunis, du 2 au 6 mars 2015, réunissant plusieurs femmes militantes du monde arabe.

A la veille du 8 mai, journée internationale de la Femme, la femme arabe est plus que jamais face à des défis majeurs, face à des menaces réelles contre lesquelles elle bataille autant qu’elle peut. Les guerres, les conflits ethniques, l’occupation, la ségrégation, et la violence sont le quotidien d’un grand nombre de femmes à travers la région. Beaucoup d’entre elles ont été déplacées, agressées, voire tuées, tandis que d’autres sont écartées de la vie politique et publique, se voyant interdire la participation à la prise de décision.

A l’issue de ces journées de travail, les participantes à la réunion ont donné une conférence de presse, ce matin. Sarra du Yemen, a parlé du combat de ses compatriotes femmes, depuis le soulèvement de 1930 contre l’occupant britannique, jusqu’au soulèvement de 2011. « Les femmes yéménites ont été les premières à sortir le 15 janvier 2011, devant l’ambassade du Yemen à Tunis, scandant des slogans contre le pouvoir », a-t-elle dit. Aycha de la Palestine s’est dite frappée par la condition des femmes arabes, elle qui pensait que seule la Palestinienne pouvait vivre un calvaire. Celui de l’occupation.

«En tant que Palestinienne, je vais rentrer avec une blessure au cœur, car ce n’est plus la cause de la femme palestinienne uniquement qui est d’actualité, mais la situation des femmes dans d’autres pays arabes est tout aussi douloureuse. Nous avons débattu lors de ces journées de l’importance du travail syndical pour défendre les droits des femmes. Ce qui se passe dans la région, ce sont les femmes qui en paient le prix. Ces femmes sont aussi les victimes de la législation de leurs pays… Il est important qu’il y ait une campagne dans le monde arabe dénonçant la violence contre les femmes », a-t-elle dit, ajoutant que cette réunion a été l’occasion d’évoquer les pressions nécessaires à faire sur les gouvernements arabes  pour les inciter à mettre en application les législations internationales, notamment la Cedaw, pour garantir la place de la femme dans la vie active et sa participation à la vie politique.

Nermine, syndicaliste et militante libyenne, a déclaré pour sa part  avoir commencé le combat pour les femmes libyennes en 2003, et de manière beaucoup plus accrue en 2011, lors du soulèvement contre le régime de Kadhafi.

« Les combats armés qui secouent actuellement la Libye, n’ont pas épargné la femme. Ils ont commencé par tuer la militante Salwa Bugaighis, ensuite il y a quelques semaines ils ont assassiné Intisar hassairi. Les femmes sont devenues une cible dès qu’elles s’expriment ou défendent une cause…pourtant ce sont les femmes qui sont enclines à la paix, et elles ont un rôle important pour l’instauration de la paix civile… », a-t-elle dit.

Zeineb de l’Egypte, a déclaré quant à elle que les femmes de son pays avaient commencé une campagne contre le harcèlement sexuel, surtout qu’elles ont été dissuadées par les hommes de sortir dans la rue lors de la révolution de 2011, contre Moubarak. Elles ont subi des humiliations et ont été victimes d’agressions sexuelles.  « Il y a des lois qui incriminent le harcèlement sexuel, mais se ne sont que des textes, a-t-elle expliqué, sur le plan de la pratique nous n’avons rien vu, aucun coupable n’a été puni par la loi… nous appelons toutes les femmes arabes à faire valoir leurs droits…nous voulons nos droits, nous les voulons ! », a-t-elle insisté.

Le  réseau de la femme syndicaliste arabe appelle dans sa déclaration finale, les gouvernements arabes, surtout ceux dont les constitutions garantissent les droits des femmes, à faire appliquer ces textes, mais aussi à revoir leurs politiques et programmes d’enseignement, et médiatiques, tout ce a trait aux  appels à la violence, au dénigrement des femmes ou à leur maltraitance sous couvert de religion.

Le réseau appelle également toutes les forces progressistes et militantes dans le monde arabe à continuer le combat et à faire bloc pour renforcer le rôle de la femme arabe, imposer ses droits, et lui rendre justice, « surtout actuellement, dans les conditions difficiles et dangereuses dans lesquelles se trouve la région arabe », indique la déclaration.

Le réseau a décidé de lancer quatre campagnes de sensibilisation au sujet de la violence à l’encontre des femmes. Une campagne sera autour de la violence contre les femmes dans les régions en conflit, une campagne audio-visuelle sur les médias arabes pour dénoncer la violence sexiste, une campagne appelant à criminaliser la violence faite aux femmes dans la législation, et une campagne contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

Chiraz Kefi