Blanchiment d’argent : La Tunisie sortira de la liste noire fin 2018 (CTAF)

Publié le Jeudi 11 Octobre 2018 à 11:25
La corruption et la mauvaise gouvernance coûtent chaque année à la Tunisie quatre points de croissance. Sachant qu’un seul point équivaut à 40.000 emplois. Elles représentent un manque à gagner de 2000 milliards de dinars en matière de marchés publics. Le chiffre le plus marquant reste néanmoins, celui de ce qu’on appelle la petite corruption. En 2015, les Tunisiens ont payé 500 milliards de dinars en pots-de-vin. Des chiffres hallucinants qui nous font nous demander si la Tunisie est réellement en train de lutter contre la corruption et le blanchiment d’argent.

Vue de la conférence de l'INLUCC, mercredi 10 octobre.

Le rôle des avocats dans la lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent. C’est sous ce thème que l’INLUCC (Instance nationale de lutte contre la corruption) a démarré ses travaux mercredi 10 octobre à Tunis. Différentes institutions étaient présentes lors de la cérémonie d’ouverture, dont la Commission Tunisienne des Analyses Financières.

La corruption persiste en Tunisie. Les chiffres sont effrayants. Selon les résultats de l’Afro-baromètre sur la corruption en Tunisie publiés au début du mois d’octobre, 7 Tunisiens sur 10 estiment que la corruption a augmenté en 2018.

La décision de l’Union Européenne de placer la Tunisie sur la liste noire des pays exposés aux risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme n’a fait que conforter ce sentiment.

Rappelons que la sentence est survenue en février dernier après un rapport du  GAFI (Groupe d’action financière).

Depuis, la CTAF (Commission tunisienne des analyses financières), organe de la Banque Centrale, travaille sans relâche à un plan d’action qui permettra une sortie prochainement. Lotfi Hachicha, Secrétaire Général de la CTAF s’est confié à GNET. « Nous sommes en train de finaliser le plan d’action du GAFI. Quand nous aurons terminé, d’ici la fin de l’année, le GAFI nous sortira de la liste des pays sous surveillance et l’Union Européenne nous fera sortir, dans la foulée, de la liste noire. Dans ce plan, il y a  notamment des travaux sur les professions non financières ».

Lotfi Hachicha, Secrétaire Général de la CTAF.

Les professions non financières ou plus communément appelées professions libérales, sont directement visées par la CTAF. Il s’agit des avocats, des huissiers-notaires, des experts-comptables ou encore des agents immobiliers. En effet, la commission prévoit de réglementer leurs déclarations de manières plus étroites. Ces professions devront désormais déclarer tout soupçon de blanchiment d’argent qui pourrait intervenir dans le cadre de leur travail.

Une décision également valable pour les avocats, pour qui le secret professionnel risque d’être entravé. Le bâtonnier de l’Ordre des avocats, Amer Mehrezi, s’est exprimé à ce sujet en marge de la journée d’étude. « Le secret professionnel est garanti par la Constitution. En ce qui concerne le rôle de l’avocat, on ne peut en aucune manière imposer une loi pour la levée du secret professionnel. Mais nous sommes engagés dans la lutte contre toute forme de corruption. Nous ferons de notre mieux pour collaborer avec les instances».

La Tunisie semble faire les efforts nécessaires pour lutter contre la corruption et le blanchiment d’argent, et sortir de cette fameuse liste noire. Le projet de loi de finance 2019 prévoit notamment des propositions visant la réduction des transactions en liquide. Ainsi, les paiements en liquide des biens immobiliers d’une valeur supérieure à 5000 dinars, seraient taxés à 1%.

Mais la lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent n’est pas seulement l’affaire du gouvernement, les citoyens ont leur rôle à jouer. La première étape serait de diminuer la circulation d’argent cash qui est aujourd’hui pratique courante même pour dans des transactions qui peuvent atteindre des centaines de milliers, voire des millions de dinars.

Wissal Ayadi